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Hôpital d'Aligre, maison de retraite
France > Nouvelle-Aquitaine > Charente-Maritime > Marans
Historique
La fondation de l'hôpital d'Aligre résulte du legs effectué par le marquis Etienne Jean François Charles d'Aligre (1770-1847), pair de France, héritier des anciens seigneurs de Marans. Par plusieurs testaments déposés chez Me Pournet, notaire à Paris, les 14 novembre 1841, 20 et 29 septembre 1846, et avant son décès survenu à Paris le 11 mai 1847, il lègue une partie de sa fortune, soit 900.000 francs au total, à plusieurs communes de France auxquelles lui et sa famille étaient attachés par leur histoire et/ou leurs biens : Marans mais aussi Bourbon-Lancy et Saint-Aubin-sur-Loire (Saône-et-Loire), Château-Chinon (Nièvre), Pontgouin, Béville-le-Comte, Le Favril et Saint-Maurice-de-Gâloup (Eure-et-Loir), et enfin Croissy-sur-Seine (Yvelines). Dans chacune de ces villes, le legs est destiné à la fondation d'un hôpital (il existe ainsi une maison de charité à Croissy-sur-Seine et un autre "hôpital d'Aligre" à Bourbon-Lancy, dans la chapelle duquel repose le marquis d'Aligre). La donation précise aussi que des pierres commémoratives devront être posées à l'extérieur et à l'intérieur du bâtiment. Par décret du Président de la République en date du 3 avril 1850, la commune de Marans est autorisée à accepter le legs qui s'élève, pour ce qui la concerne, à 100.000 francs, en plus de la cabane du Gros Aubier destinée à fournir des revenus agricoles à l'hôpital.
Le terrain pour la construction du nouvel établissement est vite choisi : il s'élèvera à la sortie sud de la ville, le long de la rue principale qui sera rebaptisée rue d'Aligre, dans un terrain dépendant en partie jusqu'ici de la gendarmerie. Le projet architectural est confié à Antoine Brossard, architecte départemental et diocésain, connu pour de nombreuses réalisations à La Rochelle et aux environs (il est par exemple intervenu à la cathédrale, au marché, à l'hôpital, au lycée Dautet et au collège Eugène-Fromentin de La Rochelle). Brossard présente ses plans le 14 avril 1852, avec un devis de 70.000 francs. L'hôpital, qui pourra recevoir 16 lits, sera abrité dans un bâtiment principal long de 39 mètres, constitué d'un rez-de-chaussée avec soubassement, d'un étage et d'un grenier dans les combles. Il sera divisé en un quartier des femmes, à droite, et un quartier des hommes, à gauche. Le soubassement renfermera les pièces de service, les dépendances de la cuisine, le magasin à bois, le chai à vin et le dépôt des approvisionnements. Le rez-de-chaussée comprendra le cabinet des religieuses auxquelles la gestion de l'hôpital sera confiée, la pharmacie, la cuisine et les salles des malades. L’étage sera occupé par le logement des religieuses, la lingerie, le magasin pour les marchandises sèches, les séchoirs, les couverts, etc. A l’arrière du bâtiment, dans une petite cour, se trouveront une buanderie et un lavoir. Un jardin potager s'étendra à gauche de l’entrée, tandis qu'à droite, des plantations en forme de bosquets donneront de l'ombrage aux malades.
Ce projet est approuvé par le conseil municipal le 6 mai 1852, les plans sont adoptés par arrêté du maire le 27 août, et un autre arrêté du 1er octobre ordonne l'acquisition des terrains, le tout pour une somme de 101.701 francs. Pour compléter les revenus de l'hôpital, la municipalité achète, avec l'argent du legs, la cabane de la Morue, le 17 novembre 1853. Outre la cabane du Gros Aubier donnée par le marquis d'Aligre, l'hôpital possèdera aussi les bâtiments de la gendarmerie, l'auberge de la Croix d'Or (un bâtiment qui se trouve encore le long de la rue d'Aligre, à droite de l'entrée de l'hôpital) et une maison, rue de l'Eglise (actuelle rue Guy-Seguinot).
L'affaire, pourtant bien engagée, connaît alors du retard. Des réserves sur le projet architectural sont émises par les autorités de l'Etat. Le projet est alors retiré à Brossard et confié à deux jeunes architectes de Luçon et Fontenay-le-Comte, deux frères, Julien et Léon Ballereau qui présentent leurs plans le 9 août 1854 puis leur devis le 14 octobre. Ils reprennent en grande partie le projet de Brossard, notamment le principe du bâtiment principal, construit en pierre de taille de Crazanne. Dans un rapport annexe, le 4 novembre, les frères Ballereau expliquent que le bâtiment principal devra être construit à distance suffisante des routes environnantes, pour assurer la tranquillité des malades, comme l'a préconisé la commission départementale des bâtiments civils. Parmi les modifications apportées au projet Brossard, les frères Ballereau proposent de créer au rez-de-chaussée un vestibule de plan en croix, carrelé en pierre de Crazanne. Le montant des travaux s'avère supérieur à celui du legs, et la municipalité doit emprunter 30.000 francs, en février 1855, pour compléter le budget nécessaire. Enfin, les travaux de construction de l'hôpital sont adjugés le 26 juillet 1855 à Joseph Simon, entrepreneur à La Rochelle.
En 1858, hommage est rendu au marquis d'Aligre, fondateur de l'hôpital, par l'érection d'une statue à son effigie, dans le parc de l'établissement. L'oeuvre est financée par sa fille, la marquise de Pomereu. Après presque quatre ans de travaux, l'hôpital est finalement inauguré le 5 juin 1859, en présence des autorités locales, des héritiers du marquis d'Aligre et de l'évêque de La Rochelle, Mgr Landriot. La gestion de l'établissement est confiée aux religieuses des Filles de la Charité de Saint-Vincent-de-Paul, congrégation avec laquelle une convention a été signée le 17 mars 1859 (cette congrégation tenait déjà l'ancien hospice de Marans depuis 1726, à l'emplacement de la future école maternelle).
Dès sa construction et tout au long de son histoire, l'établissement bénéficie de legs, donations et dons, en argent ou en nature. Les noms des principaux bienfaiteurs de l'hôpital sont inscrits sur deux plaques en marbre noir encore placées dans le hall de l'ancien bâtiment principal. Témoignage concret de cette générosité, un meuble-bureau est toujours visible dans l'actuel EPHAD. A son sommet, une plaque rappelle qu'il s'agit d'un "don fait par la société des fêtes de charité de Marans, fête du 4 décembre 1859". Parmi les donateurs, Marie Geneviève Bernyer, veuve Lenfant, décédée en 1903, est honorée par l'hôpital qui fait ériger son tombeau dans le cimetière de Marans (en 1904, la municipalité donne son nom à l'ancienne rue des Jardins).
Des aménagements et agrandissements sont effectués dans l'enceinte de l'hôpital pendant toute la fin du 19e siècle et la première moitié du 20e. Un bâtiment d'isolement est notamment construit au sud-est du bâtiment principal : les travaux en sont adjugés le 13 septembre 1885 à M. Balliau, entrepreneur de maçonnerie, suivant les plans de L. Crouail, agent-voyer cantonnal. Des aménagements ultérieurs de ce bâtiment seront financés grâce à une donation de Charles Charriau, négociant à Marans, dont le nom sera inscrit sur la façade, à côté de la date de construction. Quant au bâtiment des bains douches, le long de la rue d'Aligre, il est édifié dès 1905 pour le compte de l'hôpital d'Aligre, à l'usage de ses patients comme du public extérieur. Le bâtiment principal connaît aussi des réaménagements intérieurs, au fur et à mesure de l'évolution des pratiques et usages médicaux. En 1904, le dallage d'origine du vestibule d'entrée, en pierre de Crazanne, est recouvert d'une chape de ciment.
Occupé par les troupes allemandes, l'hôpital sort de la Seconde Guerre mondiale en mauvais état. En 1946, on décide de transformer l'ancien bâtiment d'isolement en maternité, projet confié à l'architecte M. Faradeche. La maternité ouvre ses portes le 14 avril 1949, mais son activité cesse dès 1960. Après le départ des religieuses en 1950, l'hôpital d'Aligre devient maison de retraite et maison médicale dans les années 1960. Il est classé hospice-maison de retraite en 1974. La construction d'une maison de retraite, le long de la rue Guy-Seguinot, est confiée en 1965 à l'atelier d'architecture rochelais de Pierre Regnier, Jean Salmas et Pierre Garric. Le bâtiment ouvre en 1967, date portée sur une plaque près de la porte, rue Guy-Seguinot. Dix ans plus tard, le même architecte rochelais Pierre Regnier est de nouveau sollicité, cette fois pour concevoir une maison médicale. Les plans en sont livrés en 1975 et la structure ouvre en 1978. Dans les années 1980, d'importants travaux d'aménagement (ou "humanisation") sont menés dans le grand bâtiment de l'ancien hôpital, dont le dernier niveau est surélevé. En 1991, l'établissement passe du statut d'hôpital rural à celui de maison de retraite, avec section de cure médicale.
Les locaux étant vétustes et inadaptés, un nouvel établissement (EPHAD) est construit au 20 rue des Moulins où il ouvre en mars 2015. Il est inauguré le 5 juin suivant, même jour que l'hôpital d'Aligre, en 1859. En rappel de son histoire, l'EPHAD garde le nom d'Aligre, et la statue du marquis d'Aligre, fondateur de l'hôpital, érigée en 1858, est transférée dans le jardin du nouvel établissement.
Détail de l'historique
Description
L'ancien hôpital d'Aligre, désaffecté, se trouve à l'entrée sud du centre-ville de Marans. Il occupe un vaste espace délimité à l'est par la rue d'Aligre, à l'ouest par la rue Guy Seguinot et au sud par la rue des Moulins. L'ensemble est fermé au sud par un mur de clôture, interrompu par un portail à piliers maçonnés, et à l'ouest, rue d'Aligre, par un muret avec grille, un grand et un petit portails à piliers maçonnés et un troisième avec couvrement en ferronnerie (sans compter le portail des bains-douches).
L'ensemble regroupe plusieurs bâtiments disséminés entre un parc, à l'ouest, des cours, à l'est, et un parking, au nord. Le long de la rue d'Aligre, au nord-est de l'ensemble, se trouve une ancien café-auberge. Des bains douches la suivent vers le sud, de l'autre côté du portail (voir le dossier documentaire correspondant). Au sud-est s'élève un ancien bâtiment d'isolement (construit en 1885), transformé en maternité jusque dans les années 1960 puis en antenne d'autodialyse, et enfin en centre d'accueil de jour. Des dépendances, une buanderie, un local ayant servi de chapelle et un logement de fonction occupent l'angle sud-ouest de la propriété.
Au centre de celle-ci s'élève le corps principal de bâtiment, le plus ancien. De plan rectangulaire, il est couvert d'un haut toit à croupes et en ardoise. Il comprend un étage de soubassement, à l'origine dédié aux pièces de service, un rez-de-chaussée surélevé, un étage (où se trouvait une chapelle au parquet ciré) et enfin un étage en surcroît, éclairé par des lucarnes tombantes. Ce surcroît et ces lucarnes résultent d'une surélévation du bâtiment d'un demi-niveau, ayant fait disparaître les lucarnes simples d'origine ainsi qu'un lanternon central.
Au total, la façade principale, au nord-est, présente neuf travées d'ouvertures, dont trois inscrites dans un avant-corps central. Celui-ci, bien que lui aussi surélevé, a conservé son large fronton mouluré, en pierre de taille, et sa porte centrale, également ornée d'un fronton mouluré et d'une croix, ouvrant sur un escalier à onze marches. Le reste du décor se limite à des pilastres d'angles, un solin en pierre de taille, des bandeaux, des encadrements saillants, des pleins-de-travées appareillés et une corniche. La même organisation et le même décor se retrouvent sur la façade sud-ouest, à l'exception du large fronton au-dessus de l'avant-corps central et du fronton de la porte, ici absents. Une autre différence réside dans l'escalier central, ici à deux volées droites.
L'intérieur de ce bâtiment principal a été profondément remanié depuis sa construction. Au rez-de-chaussée demeure le vestibule d'entrée central, de plan en croix, dans lequel se trouvent deux plaques en marbre noir qui rappellent les noms des bienfaiteurs et fondateurs de l'hôpital et sa date d'inauguration. De ce vestibule partent deux longs couloirs sur les côtés desquels se succèdent pièces et chambres. On retrouve la même organisation (hors vestibule central) dans les niveaux supérieurs. Un grand escalier qui desservait les étages depuis le vestibule du rez-de-chaussée a disparu.
Au nord de ce corps de bâtiment principal, l'ancienne maison médicale ouverte en 1978 est constituée de deux ailes parallèles réunies par un corps central de bâtiment qui leur est perpendiculaire, le tout en béton et sous des toits en terrasse. Un auvent d'entrée et une salle à manger sont accolés au corps central de bâtiment. Leurs formes arrondies brisent l'organisation rectiligne de l'ensemble. En élévation, la forte horizontalité des lignes est là aussi adoucie par les formes concaves et les interruptions en demi-cercle des panneaux de béton formant les garde-corps des balcons, et par les linteaux en arc déprimé des baies du rez-de-chaussée. A l'intérieur, le rez-de-chaussée du corps central de bâtiment était occupé par un vaste hall d'accueil, et les espaces administratifs et de service se répartissaient dans les deux autres ailes. Dans la salle à manger, grand espace éclairé par de nombreuses baies, se trouve encore une cheminée en brique dont les formes arrondies répondent à celles du lieu. Les chambres se répartissaient de part et d'autre de couloirs centraux dans les étages des deux ailes ; une salle à manger et des espaces de soins occupaient le premier étage du corps central de bâtiment.
Enfin, à l'ouest, l'ancienne maison de retraite ouvre sur la rue Guy Seguinot. Elle est constituée de trois corps de bâtiments perpendiculaires les uns aux autres, à un étage, le tout en béton. Les chambres se répartissaient de part et d'autre d'un couloir, principalement dans le corps central de bâtiment et dans le corps sud, tandis que les parties communes et les pièces de service se concentraient dans le corps de bâtiment nord.
Détail de la description
Murs |
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Toits |
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Étages |
étage de soubassement, rez-de-chaussée surélevé, 1 étage carré, étage en surcroît |
Couvertures |
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État de conservation |
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Informations complémentaires
Type de dossier |
Dossier d'oeuvre architecture |
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Référence du dossier |
IA17047151 |
Dossier réalisé par |
Suire Yannis
Conservateur en chef du patrimoine au Département de la Vendée et directeur du Centre vendéen de recherches historiques à partir de 2017. |
Cadre d'étude |
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Aire d'étude |
Vallée de la Sèvre Niortaise, Marais poitevin |
Phase |
étudié |
Date d'enquête |
2016 |
Copyrights |
(c) Région Nouvelle-Aquitaine, Inventaire général du patrimoine culturel |
Citer ce contenu |
Hôpital d'Aligre, maison de retraite, Dossier réalisé par Suire Yannis, (c) Région Nouvelle-Aquitaine, Inventaire général du patrimoine culturel, https://www.patrimoine-nouvelle-aquitaine.fr/Default/doc/Dossier/4e2cd510-398a-450c-97d6-d56cc3e292cd |
Titre courant |
Hôpital d'Aligre, maison de retraite |
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Dénomination |
hôpital hospice maison de retraite maternité |
Parties constituantes non étudiées |
logement buanderie portail |
Statut |
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Localisation
Adresse: Nouvelle-Aquitaine , Charente-Maritime , Marans , 83 et 85 rue d'Aligre
Milieu d'implantation: en ville
Cadastre: 1820 E 7, 2016 AH 78, 79 et 84