Voies ferrées en Vienne et Gartempe, une histoire de l’aménagement du territoire
À partir de la seconde moitié du 19e siècle, le territoire de Vienne et Gartempe se maille progressivement de voies ferrées, s’appuyant sur une première ligne structurante, la ligne Paris-Bordeaux, inaugurée par Louis-Napoléon Bonaparte le 1er juillet 1851. Deux lignes au départ de Poitiers irriguent le sud-est et l’est du département : la ligne Poitiers-Limoges, ouverte le 19 décembre 1867 et la ligne Poitiers-Châteauroux par Le Blanc qui ouvre par tronçons entre 1881 et 1887.
Venant se raccorder sur la ligne Paris-Bordeaux à Saint-Saviol, et sur la ligne Poitiers-Limoges à Lussac-les-Châteaux, la ligne Saint-Saviol-Le Blanc ouvre à son tour par tronçons entre 1885 et 1891. Enfin, la jonction avec la voie ferrée Roumazières-Exideuil-Confolens est effective en 1901 par l’ouverture de la section Confolens-Le Vigeant.
Carnet du patrimoine
Publié le 20 novembre 2024
# Vienne, Charente
# Opération d'inventaire : Vallée de la Gartempe, de Lathus à La Roche-Posay ; Vallée de la Vienne d'Availles-Limouzine à Valdivienne
# Voie ferrée, gare, maison de garde-barrière, pont, viaduc
# 2e moitié 19e siècle ; 1ère moitié 20e siècle
Les étapes de la construction
Le tracé des voies ferrées constitue un enjeu important pour les communes traversées car il est la promesse d’échanges économiques accrus et de liaison avec des centres économiques plus grands. C’est ce qui conduit la ville de Poitiers à se prononcer en 1854 et 1855, sur un projet de création d’un chemin de fer de Nantes à Limoges, par Cholet, Bressuire, Parthenay, Poitiers, Chauvigny et Montmorillon ; en réaction au projet présenté par le département de la Vendée qui évitait le passage par Poitiers. Dans son rapport au Conseil municipal, le baron Bourgnon de Layre insiste sur l’intérêt d’une voie traversant le Centre de la France, qui ferait la jonction entre Lyon et Nantes ou La Rochelle, passant par Limoges et Poitiers, afin de compléter le maillage jusqu’à présent orienté Nord-Sud, depuis Paris.
Reconnu d’intérêt général dès 1857, le tracé de la voie ferrée Poitiers-Limoges est long à se stabiliser dans le détail. Le procès-verbal de la commission d'enquête du chemin de fer du 8 avril 1861 valide le projet de tracé de l'ingénieur Moinot et l'estimation du coût à 23 millions de francs.
Le rapport de l'enquête d'utilité publique, remis le 20 août 1861, souligne l'intérêt de la voie ferrée pour le développement économique du département de la Vienne : exportation des produits agricoles dont les vins rouges abondants - nous sommes juste avant la crise du phylloxéra -, échanges de matériaux, modernisation agricole de la région de Montmorillon.
Ce rapport propose une modification de tracé au niveau de la Gartempe pour mieux prendre en compte les débouchés du canton agricole de l'Isle-Jourdain. La plus grande opposition au tracé est émise par Chauvigny, qui souhaite un passage par sa commune. Une abondante correspondance entre le préfet, les ingénieurs des Ponts-et-Chaussées, la Compagnie concessionnaire, les élus et les habitants concernés témoigne des intérêts économiques défendus, à la recherche d’un équilibre entre le coût des travaux et les retombées économiques espérées. La ville obtiendra finalement d’être desservie par une autre ligne, celle de Poitiers à Châteauroux par Le Blanc, déclarée d’utilité publique en 1879, et dont la section de Saint-Benoît à Mignaloux-Nouaillé est commune avec la voie Poitiers-Limoges.
Des enjeux identiques président quelques années plus tard à la validation de la construction de la voie ferrée de Saint-Saviol au Blanc qui se raccorde à la voie Poitiers-Limoges à Lussac-les-Châteaux : exportation des animaux vendus lors des foires de L’Isle-Jourdain vers La Villette, et acheminement du coke et du charbon vers l’usine thermique de Chardes. La liaison entre Roumazières et Le Vigeant par Confolens doit faciliter l’export des tuileries de Roumazières, qui, effectivement, se développent au tournant des 19e et 20e siècles.
La construction de la ligne Poitiers-Limoges est réalisée par des entrepreneurs de la Compagnie du Chemin de Fer de Paris à Orléans à partir de 1857. Les autres lignes sont construites par l’État et ses ingénieurs des Ponts-et-Chaussées qui réalisent les plans, les appels d’offres et les adjudications des différents lots de travaux. Les lignes sont ensuite concédées à la même Compagnie : les lignes de Poitiers à Châteauroux par Le Blanc, de Civray au Blanc, et de Roumazières à Confolens en 1883, et la voie reliant Confolens au Vigeant en 1893.
Vers une standardisation
La construction des voies ferrées est divisée en sections géographiques et en lots concernant les différents types de travaux : terrassements, réalisation des ouvrages d’art, ponts à tabliers métalliques, les gares, les maisons de garde-barrière. Sur les 18 adjudications conservées dans les fonds d’archives, seules sept le sont à des entrepreneurs locaux ou proches (Poitiers, Confolens, Tours, Les Ormes et Mazières-en-Gâtine).
Les ouvrages spéciaux
Les viaducs sont des ouvrages d’art à plusieurs arches qui permettent de franchir des rivières ou ruisseaux. Ils font l’objet d’un marché de construction et de plans spécifiques et d’un suivi rapproché par le bureau de l’ingénieur en chef des travaux publics à Poitiers et ses services.
Quelques ponts, à une ou plusieurs arches, nécessitent également des plans et marchés particuliers.
Les modèles de ponts et ponceaux
Les autres aménagements sont réalisés à partir de modèles.
Les ponts sont des ouvrages à une arche ou à un tablier de plus de 3 m de largeur permettent de franchir des routes, avec un passage de la voie ferrée soit au-dessus, soit en-dessous de la route ou des ruisseaux. Les modèles différencient les ponts en maçonnerie et les ponts à tablier métallique, et plusieurs types de passage, perpendiculaire, à 30° ou à 45°.
Les ponts maçonnés peuvent atteindre de grandes portées (14 m) ou se limiter à 3 ou 4 m.
La portée des ponts à tablier métallique varie de 3 m à 22m.
Les buses et ponceaux, maçonnés ou préfabriqués en béton, sont standardisés. Quelques-uns nécessitent des aménagements particuliers pour raccourcir l’accès aux piétons et au bétail à des aménagements particuliers. Ainsi, la voie Poitiers-Limoges coupe le village de Lussac en deux et oblige les habitants à faire de longs détours jusqu’à ce qu’ils obtiennent la création d’un escalier et d’un ponceau pour accéder au lavoir de la Barbotterie.
Le franchissement de la vallée sèche des Grands Essarts à Saint-Germain nécessite le percement d’une longue zone en déblai et la construction d’une série de cinq ponceaux pour laisser passer les piétons et les animaux et, en cas d'orage, l'eau. Devant les difficultés rencontrées pour le percement du rocher et la construction de ces ponceaux, le budget est dépassé et la voie ferrée de Poitiers au Blanc, qui devait être inauguré en une fois est, dans un premier temps, ouverte uniquement jusqu'à la gare de Saint-Savin le 28 septembre 1885. La section de Saint-Savin au Blanc est inaugurée le 7 novembre 1887.
Les modèles des gares, haltes et maisons de garde
Les plus grandes gares présentent un corps central encadré par deux ailes.
Les autres gares sont classées par catégories (classes) en fonction de leur trafic et de leur dimensions.
À côté du bâtiment des voyageurs, les gares comprennent d’autres bâtiments. Pour l’accueil du public, il est nécessaire de construire une cour des voyageurs assez large pour permettre l’accueil des calèches, des quais, un abri de voyageur sur le côté opposé à la voie, des « lieux » ou « petits lieux isolés » (toilettes publiques et urinoirs).
Pour l’accueil des marchandises, une halle aux marchandises est construite aux abords de la plupart des gares, avec des raccordements à la voie ferrée et au réseau routier et des quais de chargement. Elle présente généralement un toit très débordant pour protéger les marchandises.
Pour décharger les marchandises, les gares les plus importantes sont équipées de grues et de ponts roulants ; aucun ne subsiste aujourd’hui.
Les machines à vapeur doivent être alimentées en eau, ce qui nécessite l’aménagement de pompages dans la rivière la plus porche. L’eau est acheminée sous pression dans une citerne ou un château d’eau alimentés par une « machine fixe » protégée par un bâtiment. Une fosse à piquer le feu, destinée à recevoir le résidu du foyer de la machine à vapeur, est également nécessaire. Le réservoir d’eau de la gare de Saint-Savin est visible sur une carte postale ancienne.
Les haltes sont des maisons de garde avec une salle d’attente pour les voyageurs, toutes classes confondues, en ossature bois, des « lieux » (toilettes) et parfois un abri de voyageurs sur le côté opposé de la voie. Les trains ne s’y arrêtent qu’à la demande des voyageurs. La halte de Fleix a disparu, mais était du même modèle que celle de Savigny-Levescaut, aujourd’hui dans la communauté urbaine de Grand-Poitiers.
Les maisons de garde-barrière sont de deux modèles : avec ou sans soubassement.
Quelques maisons de gardes font l’objet de plans spéciaux en raison de la configuration des abords, comme à Lussac-les-Châteaux.
Les maisons de garde-barrière étant généralement isolées, il est nécessaire de prévoir l’alimentation en eau du garde et de sa famille par la construction d’un puits et d’une citerne pour stocker l’eau. Des lieux d’aisance sont également installés à l’écart de la maison.
Les décors en ferronnerie
Un soin particulier est porté aux décors en ferronnerie.
Les boiseries
Le bâtiment des voyageurs comprend un hall pour l’attente des voyageurs de deuxième et troisième classe, une salle d’attente séparée pour les voyageurs de première classe, un guichet pour le retrait des billets et un autre pour le retrait des bagages, avec un mobilier spécifique.
Auteures : Véronique Dujardin et Myriam Favreau
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Période : 4e quart 19e siècle
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Période : limite 19e siècle 20e siècle
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Localisation : Charente , Confolens , $result.adressePrincipale
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Date d'enquête : 2017
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Auteur du dossier : Dujardin Véronique , Favreau Myriam
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Copyright : (c) Région Nouvelle-Aquitaine, Inventaire général du patrimoine culturel
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