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Historique
A l´aube du 18e siècle, le réseau routier était dans un piteux état sur toute l´étendue du territoire national, et plus spécifiquement en Limousin, une province longtemps demeurée à l´écart des grands courants de circulation.
Aussi le 13 juin 1738, Orry, contrôleur général des finances de Louis XV, adressa aux ingénieurs en chef de chaque généralité une instruction prévoyant l´organisation d´un réseau routier « capable de supporter un trafic régulier de voitures au galop ». Cette mesure supposait l´établissement de relais de poste sur les routes, un cheval ne pouvant soutenir cette vive allure que sur une vingtaine de kilomètres.
A partir de 1731, Charles-Daniel Trudaine, en sa qualité d´intendant d'Auvergne (1730-1734) puis de directeur du service des Ponts et Chaussées (dès 1744), fit débuter la construction d'une route moderne reliant Clermont à Limoges. Son itinéraire abandonna la traversée de Felletin au profit de celle d'Aubusson. Cette voie large et commode, établie sur un lit de grosses pierres et jalonnée de bornes, permit de désenclaver la ville et lui conféra une importance inédite. Continuée par les successeurs de Trudaine tout au long du 18e siècle, la nouvelle route de Limoges fut achevée en 1809.
A l'ouest d'Aubusson, elle partait du pont des Récollets (plus tard reconstruit et rebaptisé Pont Neuf), avant de décrire une ample boucle dans la vallée de la Beauze, pour gravir le plateau de La Chassagne, reprendre sa direction initiale et se raccorder à l'ancien tracé près de Farges. En escaladant le coteau de Chabassière, elle formait un angle vif, au niveau duquel elle rencontrait un ancien chemin médiéval, la Grande Rue de la Terrade (actuelle rue Alfred Assolant), montant du quartier du même nom.
C'est à cet emplacement stratégique, à la croisée de deux réseaux viaires (l'ancien chemin médiéval et la nouvelle route de Limoges), que vint s'implanter le relais de poste d'Aubusson, dans le dernier quart du 18e siècle.
A partir de 1770, en effet, Rigoley d'Ogny, intendant général des postes, prescrivit, sur ordre du roi, de "transporter la plus grande partie des postes de l'ancienne route sur la nouvelle", et ceci en dépit de son inachèvement.
A partir de 1770, en effet, Rigoley d'Ogny, intendant général des postes, prescrivit, sur ordre du roi, de "transporter la plus grande partie des postes de l'ancienne route sur la nouvelle", et ceci en dépit de son inachèvement.
Le relais de poste d'Aubusson fut donc créé après cette date. Il accueillit bientôt les premières diligences, ces voitures légères, tirées par des chevaux et changeant d'attelage à chaque étape, instaurées sur arrêté de Turgot en 1775. Le 26 vendémiaire an X (18 octobre 1801), Jean Maingonnat, qui tenait une auberge à La Terrade, fut nommé maître de la poste aux chevaux d'Aubusson.
Selon la matrice du cadastre napoléonien, son relais se composait en 1812 d'une "maison à perron, en partie presque neuve, généralement très solide, construite en pierre et couverte en tuiles" (parcelle 63), d'une remise située sur la route de Limoges (parcelle 1) et d'une écurie (parcelle 4), bâtie de l'autre côté de la Grande Rue de la Terrade (actuelle rue Alfred Assolant). Tous ces édifices étaient entourés de vastes prés.
Le relais de poste aurait donc été constitué dans le dernier quart du 18e siècle, par accolement de deux corps de bâtiments visibles sur le cadastre napoléonien. Le premier, accessible par un escalier extérieur à deux volées convergentes (toujours en place), était sans doute la maison du maître de la poste aux chevaux, qui devait également servir à accueillir les voyageurs de passage. L´encadrement chanfreiné de sa porte suggère que cet édifice pourrait avoir été bâti au 17e siècle, mais que sa façade aurait été réordonnancée durant le dernier quart du 18e siècle.
Quant au second corps de bâtiment, de plan carré et plus profond, les vestiges, au niveau de son rez-de-chaussée, d´une porte cochère surmontée d´un linteau en plate-bande appareillée (aujourd’hui obturée) laisseraient penser qu´il était peut-être utilisé pour le passage des voitures et le stockage de marchandises.
Ce relais de poste a été reconverti en deux maisons distinctes, portant les numéros 92 et 94 de la rue Alfred Assolant. Il est difficile de déterminer à quelle date eut lieu cette reconversion, vraisemblablement dans le troisième quart du 19e siècle, avec l'arrivée du chemin de fer à Aubusson (1871), qui condamna l'activité de la poste aux chevaux.
La maison du numéro 94, bien qu´elle ait conservé quelques éléments de facture 18e siècle (les baies du premier niveau, à appuis saillants moulurés et linteaux en arcs segmentaires), a été largement modifiée durant la seconde moitié du 19e siècle (percement de nouvelles ouvertures) et dans les années 1950 (construction d´une extension à l´étage de comble, pose d´un crépi).
La maison du numéro 92 a également subi quelques transformations au cours du 20e siècle (ajout d´une marquise au-dessus de la porte d´entrée, construction d´une extension au nord, réfection de la toiture en tuiles mécaniques et modification de quelques ouvertures).
Quant à la remise et à l'écurie dépendant du relais de poste et construits, d'après la matrice, au tout début du 19e siècle, ils ont aujourd´hui disparu.
Les prés attenants au relais de poste ont été bâtis dans les années 1950, au moment de l´urbanisation du quartier de Chabassière.
Sur la façade du numéro 94, une plaque signale la naissance dans la demeure de l'écrivain Alfred Assolant (1827-1886), qui a donné son nom à la rue. D'abord auteur de nouvelles pittoresques (les Scènes de la vie des Etats-Unis, publiées en 1858), il se distingua sous le Second Empire par ses convictions politiques, farouchement opposées au régime de Napoléon III, et par ses romans pour la jeunesse (les Aventures du capitaine Corcoran, éditées en 1867).
Assolant n'est pourtant pas venu au monde dans le quartier de la Terrade, où il ne faisait que passer ses vacances d'été, mais bien rue du Champ de Foire (actuelle rue du capitaine Taillant), au domicile de ses parents, ainsi que l'atteste son acte de naissance.
Cette méprise fut commise par le conseil municipal d'Aubusson en 1936, lorsqu'il décida d'apposer la plaque pour célébrer le cinquantenaire de la mort de l'artiste. L'erreur fut néanmoins reconnue dès l'année suivante, grâce aux travaux historiques des Amis d'Aubusson. La plaque n'a toutefois jamais été déplacée depuis cette date.
Détail de l'historique
Périodes |
Principale : 17e siècle (incertitude) Secondaire : 4e quart 18e siècle Secondaire : 1er quart 19e siècle Secondaire : 2e moitié 20e siècle |
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Description
Cet ancien relais de poste a été reconverti en deux maisons contigües, bâties entre cour (fermée par un portail) et jardin. Celle du numéro 94, de plan carré régulier, se développe sur un étage carré et un étage de comble, sous un toit à longs pans couvert de tuiles mécaniques. Bien que très largement remaniée et recouverte d'un crépi gris de facture récente, elle a conservé quelques éléments anciens : au rez-de-chaussée, les vestiges d'une porte cochère (aujourd'hui obturée et remplacée par deux portes-fenêtres) surmontée d'un linteau surbaissé traité en plate-bande appareillée et à l'étage, deux baies à appuis saillants moulurés, couvertes en arcs segmentaires. La maison du numéro 92, de plan rectangulaire régulier, se développe sur un étage de soubassement (accessible, depuis l'extérieur, par une porte située sous l'escalier), un rez-de-chaussée surélevé et un étage de comble, sous un toit à longs pans couvert de tuiles mécaniques. Son élévation antérieure, orientée au sud, sur cour, est précédée d'un perron composé d'un escalier extérieur en pierre à deux volées droites et convergentes. Sa porte d'entrée, à encadrement chanfreiné, est surmontée d'une marquise. Le décor de sa façade, totalement enduite, se résume aux linteaux en arcs segmentaires de ses baies, à leurs appuis saillants moulurés et aux chaînages d'angle en pierre de taille.
Localisation
Adresse: Nouvelle-Aquitaine , Creuse , Aubusson , 92, 94 rue Alfred-Assolant
Milieu d'implantation: en ville
Cadastre: 1812 F 63, 1 à 4, 2007 AH 13, 14