Chapelle Sainte Macrine
France > Nouvelle-Aquitaine > Deux-Sèvres > Magné
Historique
Un lieu de culte important du Moyen Age au 19e siècle
La chapelle Sainte Macrine est, encore de nos jours, le lieu d'un culte et d'un pèlerinage (le 6 juillet) rendus à sainte Macrine, patronne des marais. Avec sa soeur, sainte Colombe et leur amie, sainte Pezenne, toutes trois nées en Espagne au 4e siècle, sainte Macrine se serait enfuie pour échapper aux persécutions, et aurait trouvé refuge dans les marais de Coulon et l'île de Magné. Soignant les malades et secourant la population des marais, elle aurait guéri le boeuf d'un paysan, lui rendant sa corne accidentée. Depuis lors, elle est considérée comme la protectrice du monde agricole. A sa mort (un 6 juillet, selon la tradition orale), la sainte aurait été inhumée près d'une petite chapelle où commença alors son culte, rendu notamment par les malades, à proximité d'une fontaine miraculeuse (le site, appelé le "champ des idoles", était peut-être précédemment occupé par un lieu de culte païen).
La chapelle est mentionnée en 936 lorsqu'une veuve, Sénégonde, donne à l'abbaye Saint-Cyprien de Poitiers plusieurs biens dans les environs, dont un lieu appelé Ulmus, soit l'Ormeau, "son alleu avec la chapelle, les habitations, les terres et tout ce qui lui appartenait". La chapelle aurait été réédifiée au 13e siècle par le seigneur de Magné. En 1508, la charte de fondation du chapitre de l'église de Magné indique que "depuis longtemps ont lieu des processions à Sainte Macrine et qu'anciennement des paroissiens venus de la ville s'en rendaient pieds nus". Le pèlerinage et les processions à la chapelle sont encore mentionnés au 17e siècle parmi les archives de la ville et des paroisses de Niort, et la chapelle apparaît au début du 20e siècle sur les cartes de la région par Claude Masse.
Au culte de la chapelle était lié celui voué à trois fontaines environnantes, dont celle de la Gravée des Ormeaux, ou encore la fontaine de Bec de Grue, indiquée sur le plan cadastral de 1833, à l'est de la chapelle, au milieu des champs (parcelle D 1714, actuelle AN 43). Une troisième fontaine, également relevée par la carte d'état-major, est localisée par le plan cadastral de 1833 le long de la route qui mène à Bel Air (parcelle D 1683, actuelles AN 24 et 26). A l'ouest de la chapelle, le plan cadastral de 1833 mentionne "le puits Sénifaut" où le maire de Magné, Julien Brée, dans une note au préfet en 1858, localise une ancienne fontaine comblée. Il relève par la même occasion, dans un champ appelé Sur la ville et un autre Sous la ville, des briques romaines et "de nombreuses fondations qui arrêtent souvent la charrue", ou encore des fragments de statues dans un terrain appelé "champ des Idoles".
Propriété du seigneur de Magné, la chapelle est saisie comme bien national à la Révolution et vendue aux enchères le 16 prairial an VII (4 juin 1799). Jacques Barré, marchand à Niort, s'en porte acquéreur pour 26000 francs. Au lendemain de la Révolution, et alors que le Concordat a rétabli l'exercice du culte, la chapelle Sainte Macrine est relevée par l'action de bienfaiteurs et des habitants. Par un acte du 1er mars 1806, devant Me Pougnet, notaire à Niort, approuvé en conseil municipal le 8 avril, puis le 12 novembre par un décret impérial, signé de Napoléon depuis son quartier général alors établi à Berlin, donation est faite à la commune de Magné de la chapelle Sainte Macrine par Radegonde Charraudau, veuve de Jacques Barré, demeurant au Grand Francgirouard, à Magné, et ses enfants. Ce don est assorti d'une condition : la chapelle sera "exclusivement consacrée au culte catholique". Le 12 juillet suivant, le Journal des Deux-Sèvres rapporte ceci : "Les habitants de Magné et ceux des communes voisines de ce bourg viennent de faire relever l’église dédiée à sainte Macrine. L’ouverture de ce temple s’est faite le 6 de ce mois. Un concours immense de citoyens de la ville et de la campagne s’est porté en foule à cette solennité."
La chapelle apparaît sur le plan cadastral de 1833, à l'emplacement du bâtiment actuel. La chapelle appartient alors à la commune, tandis que le pré l'entourant est détenu par la veuve de François Proust. La chapelle est toutefois plus courte vers l'ouest qu'aujourd'hui, de plan rectangulaire, avec un décrochement dans l'angle nord-ouest. Une ferme se trouve déjà en face, à l'est, comme aujourd'hui.
La reconstruction de la chapelle en 1869 et 1896, et la relance des pèlerinages
Dès les années 1860, le mauvais état et l'insuffisance de la chapelle poussent à envisager sa reconstruction. Le 30 juin 1867, le conseil de fabrique ouvre une souscription et accepte un projet de donation envisagé par Pierre Michaud, cultivateur, et son épouse Françoise Bourolleau, demeurant près de la chapelle, au profit de la reconstruction de celle-ci. Cette acceptation est confirmée en conseil municipal le 26 août. Sans attendre la signature de la vente, le 29 avril 1868, l'évêque de Poitiers vient poser et bénir la première pierre de la nouvelle chapelle. Le 17 février 1869 enfin, les époux Michaud font finalement don à la commune d'un terrain de 4 ares attenant à la chapelle, pour permettre sa reconstruction. En échange, ils obtiennent le droit de disposer de douze places dans la chapelle, pour eux et leurs descendants. Cette donation est approuvée par l'évêque de Poitiers le 19 mai, puis par arrêté préfectoral le 27 mai, considérant que la chapelle tombe en ruine et que, lieu d'un pèlerinage très fréquenté, elle doit être reconstruite et agrandie. La même année 1869, le 19 février, un devis des travaux à exécuter à la chapelle est présenté par le père L. ou Pierre Briant, architecte (il intervient à la même époque dans des églises de la région, par exemple à Boismé et à Terves, près de Bressuire). Le devis concerne la construction du transept, de l'abside, de contreforts, de "clochetons", avec pilastres, baies ou encore roses, sans oublier la charpente et la couverture de l'abside et du transept. Briant prévoit de voûter l'ensemble, et d'élever un clocher-porche au-dessus de l'entrée de la chapelle.
Les travaux commencent, comme en fait foi un état d'avancement en octobre 1870. Celui-ci mentionne le transept, le choeur et la sacristie, et des démolitions dans la nef. Les opérations avancent ensuite difficilement, sans doute par manque de ressources financières suffisantes. Une collecte de fonds est pourtant effectuée chaque année, à l'occasion du pèlerinage qui rassemble des milliers de fidèles venus de toute la région. Un récapitulatif des travaux exécutés en 1877-1878, fait état d'opérations de maçonnerie et de taille de pierre, avec notamment la fourniture de "clochetons" (sans doute les pinacles). En décembre 1878, un entrepreneur alerte le père Briand sur les graves difficultés financières rencontrées. Les travaux sont encore en cours en 1884, mais s'étirent dans le temps et la chapelle reste inachevée.
En 1895, décision est prise de la terminer en reconstruisant la nef. Les 19 février et 17 novembre, le conseil municipal, accédant à la demande du conseil de fabrique, accepte de contracter un emprunt et de voter une imposition extraordinaire pour financer la fin des travaux dont l'essentiel a déjà été payé par le curé lui-même, l'abbé Barin. La commune accepte de prendre en charge la toiture, la zinguerie, la vitrerie et la serrurerie. Le 1er novembre, l'architecte L. Briant présente un devis pour la démolition de l'ancienne nef et la reconstruction d'une nouvelle, pour 11093 francs. Il précise que "la tribune restera inachevée, faute de ressources", et que "le pavage sera également ajourné". Prévu en 1869, le clocher-porche ne sera lui non plus jamais élevé. Le projet est approuvé par la préfecture le 14 décembre, et les travaux ont sans doute lieu en 1896, année même de la mort du père Briant, le 17 juillet, à Poitiers.
Le pèlerinage de juillet, tombé en désuétude pendant la guerre 1914-1918, est ravivé à partir de 1925, attirant une foule à nouveau nombreuse, à laquelle des restaurants ambulants et autres vendeurs d'objets et souvenirs, proposent leurs services et leurs étals. Après 1945, le pèlerinage connaît une période de déclin, et l'on envisage même en 1959 de démolir la chapelle. Le pèlerinage est relancé dans les années 1970, et un Comité de sauvegarde de la chapelle est constitué en 1977. La toiture est refaite en 1978. Fermée pour des raisons de sécurité en 2002, la chapelle fait l'objet de travaux de restauration et de nettoyage, et rouvre au culte et aux visites le 4 juillet 2004. Depuis lors, la chapelle accueille non seulement les cérémonies du pèlerinage, mais aussi des expositions et ouvre à l'occasion des Journées du patrimoine.
Détail de l'historique
Description
La chapelle s'élève au bord de la route qui conduit de Magné au Gué puis à Sansais. De plan en croix latine, et de style néo-gothique, elle est composée d'une nef unique, d'un transept et d'un chevet polygonal. Une sacristie prend place dans l'angle sud-ouest. L'ensemble est construit en moellons non enduits, avec un parement en pierre de taille pour la façade principale, à l'est. L'église est couverte en ardoise et le toit est souligné par une corniche à modillons. Un larmier enserre tout le bâtiment. Les murs pignons découverts de la nef et des bras du transept, sont encadrés par des contreforts terminés en pinacles. D'autres contreforts scandent les murs gouttereaux et marquent les arêtes du chevet, encadrant les baies en arc brisé qui éclairent l'édifice. Les murs pignons des bras du transept sont percés quant à eux de baies à réseau, sous un oeil-de-boeuf. Quant à la façade principale, à l'est, elle aussi encadrée de deux contreforts à pinacles, elle est divisée en deux niveaux par une corniche à modillons. Le niveau inférieur présente un portail en arc brisé, à larmier et à deux voussures, retombant sur des colonnettes engagées à chapiteaux nus. Il est accessible par un emmarchement. Le niveau supérieur est percé d'une rose. On relève la présence d'une cloche au sommet du mur gouttereau nord, dans l'angle nord-est de l'édifice.
On pénètre à l'intérieur après être passé sous une tribune en pierre, percée de trois baies en arc brisé, et munie d'un garde-corps en ferronnerie. La nef est couverte d'une charpente apparente, sans voûte ni tillis. Un voûtement était sans doute projeté, comme le laissent penser les triples colonnes qui s'élèvent sur les murs gouttereaux. Ceux-ci sont couverts d'un enduit qui imite la pierre de taille, avec des joints peints en rouge. Un arc doubleau brisé sépare la nef de la croisée du transept, laquelle est voûtée d'ogives comme les bras du transept et le choeur. Ces voûtes sont recouvertes du même enduit que la nef, imitant la pierre de taille.
Détail de la description
Murs |
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Toits |
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Plans |
plan en croix latine |
Couvrements |
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Couvertures |
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Décors/Représentation |
Précision sur la représentation : La chapelle est dénuée de décor sculpté. Les chapiteaux ou encore le tympan du portail auraient pu en recevoir. Peut-être ne l'ont-ils pas été par manque de moyens financiers. |
Informations complémentaires
Type de dossier |
Dossier d'oeuvre architecture |
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Référence du dossier |
IA79006166 |
Dossier réalisé par |
Suire Yannis
Conservateur en chef du patrimoine au Département de la Vendée et directeur du Centre vendéen de recherches historiques à partir de 2017. |
Cadre d'étude |
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Aire d'étude |
Vallée de la Sèvre Niortaise, Marais poitevin |
Phase |
étudié |
Date d'enquête |
2024 |
Copyrights |
(c) Région Nouvelle-Aquitaine, Inventaire général du patrimoine culturel, (c) Centre vendéen de recherches historiques |
Citer ce contenu |
Chapelle Sainte Macrine, Dossier réalisé par Suire Yannis, (c) Région Nouvelle-Aquitaine, Inventaire général du patrimoine culturel, (c) Centre vendéen de recherches historiques, https://www.patrimoine-nouvelle-aquitaine.fr/Default/doc/Dossier/32db09ec-1fe1-4295-af32-d29ff42be396 |
Titre courant |
Chapelle Sainte Macrine |
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Dénomination |
chapelle |
Parties constituantes non étudiées |
sacristie |
Statut |
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Intérêt |
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Localisation
Adresse: Nouvelle-Aquitaine , Deux-Sèvres , Magné , route de la Chapelle
Milieu d'implantation: en écart
Lieu-dit/quartier: la Chapelle
Cadastre: 1833 C 1138, 2024 AP 116