Île Cazeau

France > Nouvelle-Aquitaine > Gironde > Bayon-sur-Gironde

La recension par l'archiviste J. A. Brutails des mentions concernant l'île paraissent remonter, pour les plus anciennes, au 14e siècle. Il est cependant difficile d'identifier à cette époque l'île avec certitude, dans l'ensemble des bancs de sable mouvants du secteur de l'île de Macau et du Bec d'Ambès. Elle est, semble-t-il, formée par la réunion de deux petites îles au 16e siècle. Ces espaces émergents relèvent de l'abbaye de Sainte-Croix de Bordeaux qui les cède à des particuliers selon un bail à rente. Ainsi en 1545, deux bancs de sable appelés Pissebernard et Bayardeau sont baillés à Pierre de Cazau, greffier de Guyenne. Il est alors nécessaire d'y élever des digues et des plantations pour fixer ces amas. Ce sont ces deux îles qui forment à la fin du 16e siècle l'île, désormais connue sous le nom d'île Cazau ou Cazeau. En 1605, un procès verbal de visite fournit les dimensions de l'île soit 2 745 mètres sur 470. Elle s'est progressivement allongée pour mesurer au début du 20e siècle 5 300 mètres.

L'île est officiellement rattachée à la paroisse de Bayon au début du 17e siècle par le cardinal de Sourdis (décision réaffirmée en 1658). Lors de la reprise des guerres de Religion en 1621, un fort est établi sur l'île à l'instigation du Parlement de Bordeaux, placé sous les ordres du capitaine La Salle. Pendant l'épisode de la Fronde, ce fort est rétabli vers 1650 afin de contrôler le passage du Bec d'Ambès. Il est signalé sur la carte dressée par P. Du Val en 1659.

La carte de 1692 indique l'île et des bâtiments qui y sont construits. Elle était séparée de l'île du Nord par la passe de Garguil empruntée par les bateaux pour remonter jusqu'à Bordeaux. Plusieurs peyrats ou épis ont été aménagés sur ses berges : au milieu du 18e siècle, ils sont dénoncés comme gênant la navigation et entraînant des accumulations de limons qui progressivement empêchent la circulation des bateaux.

L'île est possédée en 1773 par M. Pascal, premier président à la cour des Aides de Bordeaux, dont elle prend temporairement le nom. Elle passe à la fin de l'Ancien Régime dans les biens de M. de Saige, et enfin à son petit-fils, Joseph Cazaux ou Cazaud. Suite à une expropriation, elle est acquise le 25 novembre 1815 par Louis Pierlot, régent de la banque de France et intendant général de la Maison de l'Impératrice. Il est adjudicataire par la même occasion de l'Île aux Vaches et de l'Île d'Issan. A sa mort en 1826, son fils Auguste Pierlot (1795-1864), sous-lieutenant dans les Grenadiers à cheval de la Garde impériale, recueille les îles estuarienne dans l'héritage paternel.

L'île est représentée sur le plan cadastral de 1819. Elle est comprise en entier dans la commune de Bayon-sur-Gironde, ce qui n'est plus le cas aujourd'hui : la pointe sud qui s'est allongée dépend désormais de la commune de Macau (rive gauche). Elle est quadrillée de fossés permettant l'assèchement et l'exploitation agricole des terres. Y est construit un ensemble de bâtiments accessibles depuis un petit chenal par une longue allée. Des fossés en eau entourent deux parcelles au sud de ce hameau. Un moulin à vent est signalé au niveau de ce chenal. Ce dernier semble protégé des courants par un épi ou peyrat. D'autres sont indiqués sur les rives de l'île. Un alignement de logis se trouve au cœur de l'île, accessible par un peyrat aménagé sur la rive ouest. Les augmentations et diminutions des matrices cadastrales indiquent la construction nouvelle d'une maison en 1849 (parcelle C47bis). D'après Edouard Guillon dans son ouvrage de 1866, "Il y a enfin dans l'île Cazeaux la propriété de M. Pierlot, au milieu de laquelle est une belle construction perdue dans la verdure luxuriante de ses grands arbres".

Au milieu du 19e siècle, des travaux d’endiguement condamnent la passe de Garguil qui permettait aux bateaux de passer entre l’île Cazeau et l’île du Nord et de rejoindre la Garonne par le bras de Macau. La digue établie entre les deux îles ainsi que celle de Macau dirigent les courants vers la passe du Bec d’Ambès et condamnent le bras de Macau. Tous les efforts se concentrent donc sur la passe du Bec dont il faut maintenir la largeur et la profondeur.

Finalement dans les années 1880, d’importants travaux sont engagés pour élargir la passe aux dépens de l’île Cazeau toute proche. A cette époque, une vaste exploitation viticole y est établie, autour du château Pierlot, qui produisait quelque 200 tonneaux de vin de palus. Le moulin à vent est indiqué en ruine dès 1870. Il s’agit de d’amputer l’île d’une bonne partie de sa rive est, ce que l’on a appelé "le rescindement de l’île Cazeau". L'île est rognée, plusieurs bassins sont "excavés" , à l’abri d’une digue temporaire puis l’eau gagne ces zones et affleure les nouvelles berges bien rectilignes. Une lithographie d’A. Dorlhiac permet de mesurer l’ampleur des travaux, qui bouleversent profondément cette île. L’entreprise Vernaudon frères engage ce chantier titanesque à partir de 1885 : si certains bâtiments sont dans un premier temps conservés pour loger les ouvriers, d’autres doivent être détruits pour creuser les bassins. Le château est finalement détruit en 1888. De nombreuses machines sont nécessaires pour le dragage et le déblaiement des terres : excavateurs, locomotives et wagons, remorqueurs mais aussi des dragues à refoulement spécialement conçues par les entrepreneurs Vernaudon. La mise en œuvre est laborieuse tandis que les résultats escomptés sont peu probants. Les travaux sont suspendus puis définitivement arrêtés par décision ministérielle du 19 avril 1894 : les entrepreneurs engagent alors une longue procédure, laissant les ingénieurs se déchirer à nouveau sur les solutions à apporter au problème d’envasement.

Au début du 20e siècle, alors que le calme revient sur l’île, les sables et vases extraits lors des travaux ont formé de petits monticules de terre argilo-silicieuse favorable à la culture de l’artichaut et de l’asperge. S’y pratique également l’élevage de vaches laitières et de veaux. Aujourd’hui, on trouve quelques vestiges d’installations laissées à l’abandon.

Périodes

Principale : 16e siècle

Principale : 19e siècle

L'île Cazeau constitue la partie sud des îles Verte et du Nord réunies. Quelques bâtiments en ruine y sont encore repérables. La pointe sud relève de la commune de Macau.

Localisation

Adresse: Nouvelle-Aquitaine , Gironde , Bayon-sur-Gironde

Milieu d'implantation: en écart

Lieu-dit/quartier: Île Cazeau

Cadastre: 1819 C1 et C2, 2014 C

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