Patrimoine et inventaire de Nouvelle-Aquitaine

Un projet de longue haleine

Les projets successifs d'amélioration de la navigation et de la gestion de l'eau dans le bassin de la Sèvre Niortaise au 19e siècle prévoient l'établissement de plusieurs écluses aux extrémités des différents biefs. Dès 1818, l'ingénieur en chef des Ponts et chaussées François-Philippe Mesnager, chargé d'élaborer le premier de ces projets, propose de créer une écluse près du moulin de Comporté et en dresse les plans.

L'idée, alors restée sans suite, est pourtant promise à un bel avenir. Elle est en effet reprise quarante ans plus tard dans le programme d'amélioration de la navigation sur la Sèvre entre le port de Niort et les lieux-dits le Jaune et Saint-Martin, présenté le 5 novembre 1854 par l'ingénieur en chef des Ponts et chaussées Joseph Maire. Concernant l'écluse de Comporté, son objectif est de mieux gérer les niveaux d'eau et ainsi de faciliter l'accès au port de Niort (encore situé à cette époque au pied du moulin du Roc, actuel boulevard Main). Le site choisi pour établir l'écluse s'appuie sur un des nombreux îlots ou presqu'îles qui formaient l'extrémité nord de Belle-Ile et sur lesquels s'appuyait le déversoir du moulin de Comporté. Maire prévoit, en plus de l'écluse elle-même, un barrage de décharge, établi sur la rive gauche de l'écluse et rejoignant le déversoir du moulin de Comporté.

Modifié en 1855, le programme concernant le port de Niort et l'écluse de Comporté est intégré au vaste projet d'amélioration de la navigation dans le bassin de la Sèvre Niortaise conçu en 1856 par Maire. Dans ce projet, le plan de l'écluse est modifié, le barrage et l'écluse étant alignés sur le même bras de la Sèvre. Après la mort de Joseph Maire en 1857, cette idée ne sera finalement pas retenue, et l'on en reviendra au projet initial d'une écluse et d'un barrage séparés par un îlot. Les travaux, désormais supervisés par l'ingénieur Sallebert, en sont adjugés le 28 août 1857 à l'entrepreneur de maçonnerie Baptiste Arsicot, de Niort.

La construction de l'écluse

Les travaux commencent le 15 juillet 1858. Leur avancement est connu par les feuilles mensuelles de décompte des journées des ouvriers. La première étape consiste à construire le barrage de décharge, en procédant d'abord à la pose de batardeaux et au pompage de l'eau entre les deux, à l'aide d'une machine à vapeur. Cette opération est toutefois ralentie par des difficultés à mettre le site à sec, difficultés qui empêchent de descendre les fouilles de fondations aussi bas que prévu. L'opération s'éternise en 1859 et 1860, le projet est revu à la baisse, et un contentieux s'élève avec l'entrepreneur.

L'écluse elle-même commence à être construite en 1861, et elle est enfin achevée en 1862, sous la direction de l'ingénieur en chef Deglaude : la construction de la tête amont de l'écluse (extrémité sur laquelle est fixée la porte) et la pose des portes sont réalisées entre les 8 et 16 juillet, la tête aval est terminée entre les 18 et 24 juillet, les derniers terrassements sont achevés le 18 septembre. Après un mois de séchage du béton, l'ouvrage est livré à la navigation en octobre. Le 10, Auguste Morin, garde-rivière, est le premier éclusier nommé à Comporté. La construction d'une maison éclusière suivra en 1863.

Un site entretenu et amélioré

Au cours des décennies qui suivent sa construction, l'écluse et le barrage sont l'objet d'un entretien constant. Les portes notamment, encore en bois à cette époque, doivent être régulièrement remplacées. Les portes d'origine posées en 1862 sont changées à l'été 1896. Présenté le 5 décembre 1895 par l'ingénieur G. Poisson, le projet comprend la pose de portes en chêne "du pays" et le remploi d'une grande partie de la ferronnerie d'origine. Une partie des pierres, victimes du gel, sera aussi remplacée. Les travaux sont menés entre juillet et octobre 1896 par Pierre David, entrepreneur à Niort.

L'écluse et ses abords sont par ailleurs très prisés par les promeneurs et les adeptes de détente et de loisirs. Dès 1864, la fréquentation du site est telle que le franchissement de la passerelle établie sur l'écluse être interdit. L'objectif est aussi de lutter contre la fraude fiscale, certains passant d'une rive à l'autre de la Sèvre via l'écluse et sa passerelle pour entrer dans Niort sans passer par la barrière d'octroi. Le déplacement de cette barrière en aval de l'écluse, en 1881, et les réclamations des riverains aboutiront à la réouverture de la passerelle en 1881. Par ailleurs, en 1890, une association, l'Aviron Niortais, établit une base à Comporté, avec un hangar pour abriter le matériel. La base est installée sur le terrain appartenant à l'Etat sur la rive gauche de l'écluse, et qui lui est accordé en concession. Celle-ci est par exemple renouvelée en 1909. Des cabines de bains semblent être établies à la même époque et au même endroit.