Maison de la Cadène

France > Nouvelle-Aquitaine > Gironde > Saint-Émilion

A l'origine, cet édifice faisait partie du même îlot que la maison appelée "la Commanderie". Le percement de la rue Guadet, au début des années 1870, l'a isolé et l'a amputé de toute sa partie orientale. Conservant de rares restes romans (une baie géminée), cette maison présente également quelques éléments de la fin du 13e siècle ou du commencement du siècle suivant mais son enveloppe extérieure est aujourd'hui avant tout celle d'une riche demeure de la fin du 15e siècle. Période à laquelle sa façade nord s'est vue dotée d'un pan de bois richement sculpté, le seul conservé à Saint-Emilion. Cette maison est également associée à la porte de la Cadène qui la relie au nord à une autre maison médiévale. La tradition fait de cet arc la septième porte de Saint-Emilion qui séparait la ville haute de la ville basse par une chaîne qui lui donna son nom (Cadena en latin) ; la première mention sous ce nom date de 1291 mais il est probable qu'un mur d'enceinte, et peut-être déjà une porte, existait dès le 12e siècle en ce lieu comme semble l'attester l'épais mur percé d'une petite baie romane.

Périodes

Principale : 2e moitié 12e siècle

Principale : limite 13e siècle 14e siècle

Principale : limite 15e siècle 16e siècle

Cette maison présente un plan atypique, d'autant moins lisible que les deux tiers ouest de l'édifice ont été rasés lors du percement de la rue Guadet au début des années 1870 ; l'isolant par la même occasion de la commanderie. Le cadastre de 1810 montre que cette maison 320 s'étendait alors vers l'est jusqu'en limite de l'actuelle parcelle cad. 31. Dans leur état actuel, les parties conservées de l'édifice datent principalement de la fin du 15e siècle, mais la présence au sud d'une petite baie géminée, auparavant murée et aujourd'hui très restaurée, atteste d'une origine romane, peut-être même antérieure aux autres maisons de Saint-Emilion puisque ici, cette fenêtre présente un traitement bien plus sobre et massif que les autres baies géminées connues dans la ville, ce qui la rattacherait plutôt au début du 12e siècle voir à la fin du 11e siècle. Par ailleurs, ce mur sud a une épaisseur dépassant le mètre qui semble l'apparenter à un véritable mur d'enceinte à mettre en relation avec la porte voisine de la Cadène qui empâte aujourd'hui l'angle sud-ouest de la maison et qui marquait la limite entre ville haute et ville basse. Cependant, dans son état actuel, cette porte date de la seconde moitié du 13e siècle ou du commencement du siècle suivant. Très mutilée, il n'en subsiste qu'un haut arc brisé dont la partie supérieure a été restaurée en glacis, ce qui ne permet plus de comprendre la disposition d'origine puisque aucun accès ni circulation haute ne sont conservés. Cet arc semblait précédé au sud par un second, plus étroit, entre lequel prenait sûrement place un assommoir ; il n'en subsiste que les arrachements côté oriental dans ce qui forme aujourd'hui une tourelle rectangulaire en avant de l'angle sud-ouest de la maison. Le mur sud de la tourelle s'est écroulé en 1921 comme l'atteste une photo faite à cette occasion et montrant la façade éventrée.

En retrait de cette tourelle, mais dans le prolongement de la porte elle-même, est implanté l'épais mur sud de la maison. Ce dernier forme une façade très étroite se développant sur quatre niveaux. Au-dessus d'une cave voûtée moderne (peut-être contemporaine des travaux menés à la fin du 15e siècle), le rez-de-chaussée ne conserve aucun élément médiéval, le parement ayant été repris en sous-oeuvre sur l'ensemble de cette partie. Les dessins de Drouyn et Piganeau n'indiquent ici qu'une petite lucarne rectangulaire. Le premier étage est ajouré de deux baies barlongues à linteau bombé datant du début du 19e siècle, mais au-dessus de la fenêtre la plus à l'est, subsiste le linteau d'une grande fenêtre à croisée de la fin du 15e siècle avec moulures prismatiques. L'étage supérieur dispose également d'une grande baie de la même période, probablement à croisillon bien qu'il n'en subsiste aucune trace, mais avec un décor bien plus sobre puisque l'encadrement est ici simplement chanfreiné. La petite baie géminée romane mentionnée précédemment ouvre à un niveau intermédiaire entre les deux étages, signe d'un réaménagement profond de l'édifice lors des travaux de la fin du Moyen Age.

Cette façade est prolongée à l'est par une tour d'escalier polygonale érigée elle aussi à la fin du 15e siècle et qui, jusqu'au siècle dernier, était coiffée d'une toiture en poivrière octogonale. La porte d'entrée qui ouvre au sud a depuis été remplacée par une ouverture sans caractère, il ne reste rien du décor d'origine. Juste au-dessus, la baie barlongue conserve par contre ses moulures prismatiques ; moulures qui ont été buchées sur l'autre baie percée à la révolution suivante. Enfin, la partie haute de l'escalier est éclairée par deux petites lucarnes carrées chanfreinées. Côté est, deux autres lucarnes du même type, aujourd'hui murées, venait compléter le dispositif. A partir de là, une façade en retour reliait vers le nord l'angle nord-ouest de la commanderie (maison 32), en lieu et place de l'actuelle rue Guadet.

C'est au nord que ce trouve la façade la plus intéressante puisqu'il s'agit du seul pan de bois conservé à Saint-Emilion. Son rez-de-chaussée est aujourd'hui constitué d'un bouchage de pierres de taille au milieu desquelles subsistent trois poteaux en bois qui supportent un poitrail sur lequel s'appuient les solives de l'étage formant encorbellement. Les deux poteaux orientaux, très rapprochés, forment le chambranle de la porte d'entrée couverte d'un linteau à accolade. A l'autre extrémité de la façade, une troisième poteau présente un traitement identique aux deux précédents. Le pan de bois du premier étage est constitué d'un assemblage losangé, ajouré à l'origine d'une fenêtre à croisée, aujourd'hui partiellement murée. Après un nouvel encorbellement, le deuxième étage présente un assemblage plus simple, principalement constitué d'éléments verticaux entre lesquels s'ouvraient une fenêtre à croisée (à moitié murée) ainsi qu'une demi-croisée. Au-dessus, cette façade s'achève par un demi-niveau supplémentaire, sans encorbellement, dont le pan de bois reprend l'agencement de l'étage inférieur.

L'intérieur de la bâtisse ne conserve que bien peu d'éléments médiévaux. Les trois petites pièces superposées, logées dans la tourelle qui formait à l'origine le côté sud de la porte de la Cadène, sont toutes voûtées en berceau. Celle du deuxième étage est en outre dotée d'une armoire murale. Il faut signaler à ce même étage la présence d'une porte en arc brisé percée dans le mur sud et dont l'arrière-voussure en arc segmentaire, tournée vers le sud, indique que la maison se prolongeait alors en cette direction. Cette partie fut rasée dès la fin du 15e siècle pour y implanter la tour d'escaliers. Au rez-de-chaussée, le noyau de cet escalier en vis repose sur une base polygonale. Les marches sont partiellement délardées et le sommet de la cage d'escalier est couvert d'une voûte sur croisée d'ogive octopartite dont les nervures chanfreinées retombent sur des cul-de-lampes simplement épannelés qui semblent inachevés et qui ont d'ailleurs été restaurés.

Murs
  1. Matériau du gros oeuvre : calcaire

    Mise en oeuvre : moellon

  2. Mise en oeuvre : moyen appareil

  3. Matériau du gros oeuvre : bois

    Mise en oeuvre : pan de bois

Toits
  1. tuile plate
Étages

2 étages carrés

Couvrements
  1. voûte d'ogives
Couvertures
  1. Forme de la couverture : toit en pavillon

Escaliers
  1. Emplacement : escalier hors-oeuvre

    Forme : escalier en vis

    Structure : en maçonnerie

Décors/Technique
  1. sculpture
Décors/Représentation
  1. Representations : fleur de lys


Précision sur la représentation :

L'élévation à pan de bois porte un décor sculpté : la porte d'entrée est couverte d'un linteau à accolade dont la pointe est ornée d'une discrète fleur de lys surmontée d'une croix pattée. Ce linteau est encadré par deux écus (effacés) surmontés d'un dais portant un ange. La sculpture est aujourd'hui très détériorée et illisible mais au 19e siècle, son état permettait encore d'identifier le sujet et L. Drouyn en a laissé une description. Enfin, une troisième écu, également effacé, sommait la pointe de l'accolade. A l'autre extrémité de la façade, une troisième poteau présente le même traitement que les deux précédents avec un blason surmonté d'une sculpture qui ici est un peu mieux conservée : il semble qu'il s'agisse de deux petits anges (très dégradés), portant un personnage vêtu d'un long manteau. Ce poteau est relié au précédent par une fine moulure torique ornée en son centre de deux petits dauphins entrelacés. Juste au-dessus, une corniche formée d'une colonne torse souligne l'encorbellement du premier étage. Cette colonne, achevée par deux engoulants, est décorée d'une liane, probablement de la vigne, autour de laquelle s'enroule une frise ornée de disques.

Localisation

Adresse: Nouvelle-Aquitaine , Gironde , Saint-Émilion , 29 rue Guadet

Milieu d'implantation: en ville

Lieu-dit/quartier: Ville haute

Cadastre: 1845 C 334, 2010 AP 320

Localiser ce document

Chargement des enrichissements...