Maisons, fermes : l'habitat à Courcoury

France > Nouvelle-Aquitaine > Charente-Maritime > Courcoury

1- Un petit bourg et de nombreux hameaux

En 1881, pour 797 habitants, la commune comptait 242 maisons ; moins d'un tiers étaient situées dans le bourg, les autres étaient réparties dans 21 hameaux. Cette répartition a peu varié depuis lors. L'habitat de Courcoury est regroupé dans le bourg et une vingtaine de hameaux, qui sont tous sur le plateau, à l'abri des crues. Une seule ferme est aujourd'hui isolée. D'autres maisons ou fermes qui formaient autrefois un hameau, sont devenues une seule propriété, comme la Maisonnette qui était, au début du 19e siècle, un hameau composé de sept familles.

Dans le bourg, comme dans les hameaux, la plupart des maisons sont rassemblées autour d'un espace commun, appelé quéreux, qui prend la forme d'un passage ou d'une placette, et où se trouve généralement un puits, également commun. Ces espaces communs tendent à disparaître aujourd'hui, englobés dans telle ou telle propriété. Les maisons sont majoritairement attenantes les unes aux autres et alignées sur ces quéreux, et beaucoup sont perpendiculaires à la voie principale. Les façades sont le plus généralement orientées vers le sud, sud-est ou sud-ouest.

La densité du bâti est accentuée par les clôtures des cours et des jardins contigus aux habitations. Les murs sont de différents types, d'une hauteur variant d'un à deux mètres, en pierre de taille avec chaperons, ou bien en moellons liés de terre avec des chaînages en pierre de taille. Des piliers, à amortissements plus ou moins ornementés, supportent des portails en ferronnerie pour les entrées piétonnes ou cochères.

42 puits ont été repérés, dont la plupart sont situés sur des lieux de passage. Nombre d'entre eux ont une margelle monolithe, de forme carrée : un bloc de pierre a été évidé en cylindre et placé à l'aplomb du forage du puits. Toutefois, cette margelle est parfois constituée de deux blocs assemblés ou encore formée de plusieurs pierres maçonnées. Seuls quelques puits sont protégés par un édicule, petite construction ou auvent porté par des poteaux. La plupart sont dotés d'une penture métallique à deux ou trois pieds en fer forgé qui portent une simple poulie. D'autres s'adossent contre un mur dans lequel est fixé une penture soutenant la poulie. Ces puits sont souvent associés à des abreuvoirs, appelés timbres, creusés dans des pierres.

2 - Des traces d'architecture ancienne

Aucune habitation de l'Ancien régime n'a été conservée dans son intégralité, à l'exception de la maison des Vanderquand, dite des Hollandais, dans le hameau Chez-Deschamps, construite au 17e siècle et très modifiée au siècle suivant.

La métairie du Gua, qui était vraisemblablement une sorte de relais de chasse et de pêche pour le marquis de Monconseil au début du 18e siècle, a été partiellement reconstruite vers 1840. Une maison de la Guérinerie, dont l'origine remonte au 17e siècle, a subi d'importantes modifications au 19e siècle.

Par ailleurs, quelques éléments épars sont encore visibles dans certaines maisons, comme de petites ouvertures à encadrement chanfreiné ou des cheminées. Parmi les onze dates inscrites sur des bâtiments, cinq appartiennent au 18e siècle (1764 pour la plus ancienne), les six autres au 19e.

La plupart des maisons sont reconstruites, au moins partiellement, au cours du 19e siècle, en conservant certaines formes architecturales plus anciennes. Les rares maisons à façade en pignon attestent sans doute de ces anciennes formes : logement et dépendances sont abrités sous le même toit. Quelques exemples datant de la fin du 18e siècle ou du tout début du 19e siècle témoignent de la pérennité d'un modèle d'habitat très répandu au cours des siècles précédents : une petite maison en rez-de-chaussée, d'une superficie d'une quarantaine de mètres carrés, composée d'une seule pièce surmontée d'un grenier.

Des sept exemples repérés, quatre sont en moellon, les autres ont au moins leur façade principale en pierre de taille. À l'exception d'une maison à Chez-Berne qui possède deux fenêtres, le rez-de-chaussée est éclairé par une seule ouverture, dont le linteau n'est pas aligné avec celui de la porte d'entrée, très basse et fermée d'une menuiserie pleine. À l'origine, le grenier semble éclairé par une seule petite fenêtre. Les linteaux des portes sont délardés, tandis que ceux des fenêtres sont en arc segmentaire. Une autre maison, à Gâtebourse, se distingue par la belle facture de sa mise en œuvre, l'alignement de ses deux fenêtres en une travée, et par la présence d'une pierre d'évier qui tend à montrer que le grenier était habité. Toutes ces maisons sont dépourvues de corniche et deux d'entre elles présentent une sorte d'aisselier arqué, appelé localement "jambe de chien", qui soutient l'avant-toit.

Une autre forme ancienne résiduelle se caractérise par la présence d'un balet, large débord de toiture généralement au-dessus d'un mur pignon. Chez-Fruger, une maison présente ainsi un toit débordant au-dessus d'une porte d'accès au grenier, accessible par une échelle. Cette forme de toit permet aussi d'abriter les deux escaliers extérieurs en pierre encore visibles aujourd'hui, l'un du 18e siècle au bourg, et l'autre des années 1820-1840 à Gâtebourse.

Des façades ont conservé la pierre qui servait à l'évacuation des eaux usées et qui signale, à l'extérieur, l'emplacement de l'évier. Contrairement à ce qui existe ailleurs dans la région, ces pierres ne sont pas surmontées d'un jour (petite ouverture) pour éclairer l'évier. En revanche, cette partie de la paroi est en pierre de taille et se distingue ainsi du reste du mur en moellon.

Des cheminées du 18e, siècle, mais surtout du 19e siècles, sont visibles, placées contre les murs pignons, de préférence celui de l'ouest pour les maisons à pièce unique. Quelques exemples de potager (petit fourneau maçonné) aménagé auprès de la cheminée subsistent.

De rares demeures ont aussi conservé les "bujours", cuviers à lessive en terre cuite qui semblent avoir été utilisés jusqu'au début du 20e siècle. Ils étaient alimentés par l'eau chauffant dans le chaudron au-dessus du foyer. Un seul four à pain a été relevé.

3 - Des constructions du 19e siècle d'une grande qualité

La grande période de reconstruction de l'habitat de la commune se situe dans les années 1850-1870, comme dans la plupart des communes des Charentes. Sur le plan économique, cette période correspond à l'essor considérable du commerce de l'eau-de-vie de cognac.

On constate l'amorce de cet essor à partir des années 1830, avec la construction de quatorze maisons, comme la demeure de notable édifiée pour l'un des meuniers du moulin de Gâtebourse, Étienne Barbereau, en 1848. Ces nouvelles habitations rompent avec celles évoquées précédemment, par l'ordonnance de leur façade et par leur plus grandes dimensions. À l'exception de l'une d'elles qui possède un étage, à Gâtebourse, elles sont dotées d'un rez-de-chaussée surmonté d'un grenier. Près de la moitié d'entre elles sont bâties en moellon de calcaire, les autres ayant au moins leur façade principale en pierre de taille. Les façades, couronnées par une corniche moulurée, sont animées par un bandeau de niveau pour deux d'entre elles. Leurs ouvertures sont alignées et forment des travées régulières, les fenêtres du grenier étant souvent assez petites. Leurs appuis de fenêtres sont généralement moulurés.

Près de la moitié (70) des habitations étudiées sont construites ou transformées durant les années 1850-1870. La plupart d'entre elles sont reconstruites, en partie seulement ou complètement. Les propriétaires bâtisseurs sont souvent mentionnés comme cultivateurs, quelques-uns seulement sont qualifiés de négociants d'eau-de-vie de cognac. Les exploitations agricoles de Courcoury, fondées sur la polyculture, bénéficient de la fertilité des terres et de la valeur croissante du produit des vignes. Les propriétaires, distillateurs ou non, profitent de la manne que représente le cognac. Les maisons très cossues qui sont alors édifiées matérialisent cette aisance.

Ces habitations sont constituées d'un rez-de-chaussée et d'un étage ou d'un comble, habité ou occupé en grenier. Les plus grandes maisons se distinguent par leurs toits à croupes couverts de tuile creuse et ornés pour quelques-uns d'épis de faîtage. Ces logements, de belle apparence, sont de taille moyenne ; dans leur grande majorité, ils ne possèdent qu'une pièce en profondeur et sont prolongés sur l'arrière par un chai servant de dépendance. Un certain nombre de maisons, souvent reconstruites, n'ont que deux travées (alignements d'ouvertures en façade), mais le plus grand nombre en possède soit trois, soit cinq. Cette disposition correspond généralement à l'organisation intérieure du logement : depuis la porte d'entrée, un corridor distribue une pièce de part et d'autre.

Une mise en œuvre architecturale particulièrement soignée caractérise les façades principales d'une grande partie des maisons bâties à cette époque. Toutes sont en pierre de taille, couronnées d'une corniche moulurée et animées par un bandeau à hauteur d'appui des fenêtres de l'étage. Au rez-de-chaussée, la pierre de taille est soigneusement appareillée (en bossages continus en table). À l'étage, au-dessus d'un bandeau d'appui délimitant les deux niveaux, le mur est lisse et les fenêtres son dotées d'un encadrement mouluré. La corniche et le bandeau d'appui sont moulurés, denticulés ou dotés de modillons. La porte d'entrée est parfois surmontée d'une corniche. Ce beau travail de taille et d'assemblage de pierre se voit à la maison de notable dite la Lézardière, bâtie dans le bourg, en 1860, pour Joseph Barbereau, meunier. Cette demeure possède en outre un avant-corps coiffé d'un fronton et décoré de fines sculptures. Cette mise en œuvre se retrouve sur des maisons beaucoup plus modestes, comme celle du n°38A, route de Corcosse, Chez-Berne.

Deux logis adoptent un plan et un traitement architectural digne de petits châteaux, avec leurs pavillons et leur toit en ardoise. L'un est construit en 1856 pour le négociant Chéri Nadeau Rétaud au Grand-Village, l'autre en 1883 pour Henri Nadeau, propriétaire cultivateur, au hameau Chez-Guérin.

La crise du phylloxéra met un frein à l'essor de la construction, et seulement 17 maisons datent de la fin du 19e siècle. Elles conservent les caractéristiques de l'époque précédente, mais leur volume change avec un étage plus élevé qui semble dévolu à l'habitation dès la construction, même dans le cas de très modestes logements. Le caractère moderne de la tuile mécanique séduit alors. C'est ainsi qu'une maison de notable, au hameau Chez-Berne, bâtie en 1886 pour Jean Deschamps propriétaire cultivateur, en est couverte, comme la maison, plus tardive toutefois, édifiée en 1904 au Grand-Village pour Hippolyte Jousseaume, marchand de porcs.

Le nombre des maisons bâties durant la première moitié du 20e siècle est très faible, et il faut attendre les années 1970-1980 pour que, la population augmentant, de nouvelles constructions voient le jour.

4 - Fermes et dépendances agricoles

L'étude a concerné 68 fermes ou anciennes fermes, ainsi que de nombreuses maisons, y compris dans le bourg, qui possédaient aussi des dépendances agricoles pour l'élevage des cochons, des volailles ou des moutons. Presque toutes les maisons sont dotées d'un chai. Toutes les familles faisaient et conservaient leur vin et leur eau-de-vin, les vendaient ou se chargeaient elles-mêmes de la distillation. Le grand nombre de ces bâtiments met en évidence le caractère agricole de la commune.

Les fermes ont souvent été constituées par l'adjonction de bâtiments au fur et à mesure des besoins. L'évolution de l'agriculture au cours du 19e siècle se reflète dans la construction de bâtiments d'exploitation plus grands et plus spécialisés. La présence d'un quéreux impose quelque peu la disposition des différents bâtiments. Le plus souvent alors, les granges-étables font face, de l'autre côté de l'espace commun, aux logements juxtaposés par deux ou trois et orientés au sud.

Parfois, les bâtiments de ferme sont disposés en ligne, sous un seul toit : le logement est contigu à une grange-remise ; d'autres dépendances, dont un chai, sont abritées par un appentis à l'arrière. Dans ce cas, la grange possède sa porte charretière dans le mur de façade. Ce modèle s'impose peu à peu et de très beaux ensembles sont construits dans les années 1850-1870 ; les deux exemples les plus représentatifs se situent à Bel-Air. Dans le premier, le logis du 18e siècle est complété dans le même alignement, par une grange vers 1830, puis par une deuxième, et enfin par un logement en 1855.

Une exploitation de 1857, aux Grandes-Maisons, est particulièrement intéressante par sa taille et sa qualité architecturale. Ce domaine comprend une grande demeure abritant deux logements, des bâtiments d'exploitation et un pigeonnier. Deux portails monumentaux donnent accès à la cour, fermée par des bâtiments sur deux côtés et par un mur. C'est le seul exemple de ferme à cour fermée sur la commune.

Dans les granges-étables, neuf portes charretières situées sur le mur pignon ont été repérées, qui témoignent de l'ancienneté des bâtiments – la plupart apparaissent sur le plan relevé en 1808 - et de l'importance de l'exploitation agricole et de son activité – polyculture et élevage.

Des hangars, appelés aussi balets, complètent généralement les fermes. Certains, ouverts en façade, font office de granges et sont parfois intégrés dans un alignement de bâtiments. Pour les plus grands, la charpente peut être soutenue par des piles carrées maçonnées. D'autres encore sont formés par un avant-toit, fortement débordant sur le mur pignon d'une dépendance, pour former un abri.

Hormis celui des Grandes-Maisons, qui se présente comme un petit bâtiment indépendant couvert d'un toit en pavillon, les pigeonniers se limitent à quelques trous de boulins pratiqués dans un mur ; dans le bourg, aux Ytropes, toute la partie haute d'un mur gouttereau accueille un grand nombre de ces trous.

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