Peintures du chœur : Baptême du Christ, Agneau de Dieu et Tétramorphe, symboles christiques

France > Nouvelle-Aquitaine > Landes > Laluque

Ces peintures sont, grâce au registre paroissial tenu par le curé Pierre Lartigau (1853-1882), les mieux documentées parmi les campagnes de décoration que connut successivement l'église dans le dernier tiers du XIXe siècle. Un devis de l'architecte Alexandre Ozanne (14 janvier 1863) prévoyait l'exécution d'un décor à l'huile sur "les murs et la coupole du sanctuaire" consistant en une "imitation de refends de pierre avec fleurette sur chaque compartiment et étoiles à la voûte", décor dont on ignore s'il fut bien réalisé. Après la découverte en 1873 d'un cycle de peintures du XVe siècle sur le thème de la Passion, la décision fut prise de ne pas restaurer ces fragments, jugés dans un état trop dégradé, et de les recouvrir par un nouveau décor destiné à parachever les importants travaux d'agrandissement et d'embellissement de l'église menés depuis 1864 sous la conduite d'Ozanne et de Lartigau. Il en fut de même pour le cul-de-four de l'abside, qui portait probablement une figuration du Jugement dernier ou de la Déisis (le "Dôme de Sainte-Sophie de Constantinople" qu'on crut alors y discerner est certainement une interprétation fantaisiste de la Jérusalem céleste).

C'est apparemment le curé Lartigau qui engagea les artistes chargés de l'exécution des nouvelles peintures en 1873. La partie purement ornementale fut confiée au décorateur bayonnais d'origine parisienne Jules Courtignon (1829-1919). La scène du Baptême du Christ, quant à elle, fut peinte par Gustave-Pierre Dagrand (1839-1915), alors installé à Bayonne et plus connu pour son activité de peintre-verrier - le cul-de-four de Laluque est à ce jour la seule décoration murale attestée de sa main. Dagrand réutilisa pour l'occasion un modèle déjà employé, le Baptême du Christ de Julius Schnorr von Carolsfeld (1794-1872), gravure extraite de Die Bibel in Bildern (Leipzig, 1860, planche 175), qui avait déjà inspiré une de ses verrières à l'église de Peyre en 1870 (réf. IM40003588), et dont les maisons Gesta de Toulouse et Mauméjean de Pau firent aussi grand usage (Barsac, Bonnegarde, Castelnau-Chalosse, Saint-Geours-de-Maremne, Bégaar, etc.).

Si l'abbé Lartigau détaille précisément le décor du cul-de-four et les ornements végétaux qui l'entourent, sa description des motifs figurés sur le mur de l'hémicycle lors de la campagne de 1873 (un "velours cramoisi avec les monogrammes de St Jean et des fleurs d’or") ne correspond pas aux médaillons symboliques qu'on y voyait encore avant 2007. Il en est de même pour l'Agneau et le Tétramorphe qui orne aujourd'hui la voûte en berceau de la travée droite de chœur, non mentionné par l'abbé mais qu'on retrouve en revanche, en tout point identique, à l'église de Saint-Aubin, décor peint en 1932 par le Bordelais Ernest Leduc. A moins qu'il ne s'agisse simplement de l'exploitation d'un modèle commun, il est donc probable que le décor originel de Dagrand et Courtignon a été modifié à une époque ultérieure. Aucune trace documentaire de cette reprise éventuelle n'a toutefois été retrouvée.

Lors de la dernière restauration du décor par l'agence Architecture Patrimoine du Bouscat en 2007, le parti a été pris de dégager l'essentiel des peintures gothiques retrouvées sur le mur de l'hémicycle, en supprimant de ce fait la plus grande partie du décor mural de 1873 qui les recouvrait. Ce choix, évident eu égard à l'importance de la découverte, a toutefois entraîné une discordance visuelle marquée et la rupture de l'unité décorative recherchée au XIXe siècle, dont la restauration a par ailleurs révélé le grand intérêt. La peinture du cul-de-four a elle aussi été en grande partie refaite a novo.

Périodes

Principale : 3e quart 19e siècle

Dates

1873, daté par source

Stade de création copie interprétée d'estampe
Auteurs Auteur : Dagrant ou Dagrand Gustave-Pierre

Peintre-verrier né à Bordeaux (51, chemin du Sablonnat) le 15 septembre 1839 et mort dans la même ville le 21 septembre 1915 ; fils de Jean Dagrant, plâtrier, et de Jeanne Sallette ; marié à Bordeaux, le 3 octobre 1863, à Jeanne-Eugénie Chartier, sœur de Jean-Georges Chartier, peintre-verrier. Il en eut sept enfants, dont trois peintres-verriers qui lui succédèrent, Maurice (1870-1951), Charles (1876-1938) et Victor (1879-1925), et une fille qui épousa Albert Borel, son principal collaborateur. Né Pierre-Gustave Dagrant, le verrier changea son nom en Gustave-Pierre Dagrand entre 1864 et 1889, avant de reprendre, par jugement du tribunal de première instance de Bordeaux du 19 juillet 1889, son nom d'origine avec la graphie Dagrant. D'abord actif à Bayonne (où ses parents possédaient une propriété), il y fonde un premier atelier en 1864, puis crée en 1873-1874 un second atelier à Bordeaux (7, cours Saint-Jean, actuel cours de la Marne), ville où il s'installe définitivement par la suite.

, peintre (attribution par source)
Auteur : Courtignon Jules Louis

Prénom usuel : Jules. Peintre-décorateur né à Paris 5e le 26 juillet 1829 et mort à Bayonne le 5 décembre 1919 ; fils d'Edme Courtignon, charpentier, et de Marie Jeanne Clémence Louvet. Impliqué dans l'insurrection parisienne de juin 1848 (mis en liberté le 3 septembre suivant), installé à Bayonne à l'occasion de ses travaux dans la cathédrale de cette ville (en association avec ses fils Louis Alfred et Jules Louis), il travailla également pour les cathédrales de Reims, de Rouen, de Boulogne, d'Albi et de Fréjus, ainsi qu'à la chapelle impériale de la Villa Eugénie de Biarritz, au château d'Abbadia (1884) et à l'église Saint-Martin de Pau (1883-1884). Marié à Bonsecours (Seine-Maritime) le 9 mai 1853 avec Fleuriste (sic) Fanny (ou Florine Stéphanie) Claro (née à Montmartre le 12 juin 1828), blanchisseuse, fille de Louis Joseph Claro et de Florentine Aimable Sergeant, il en eut quatre enfants : Louis Alfred (né avant mariage à Paris 3e le 1er décembre 1851) ; Clémence-Marie (née à Blosseville-Bonsecours le 25 mai 1853), mariée à Bayonne le 30 décembre 1872 avec le peintre-décorateur Adolphe Auguste Martial Jousseaume (né à Champagné en Vendée le 16 février 1844) ; Jules Louis (né à Paris 10e le 13 novembre 1857), peintre-décorateur avec son père et son frère, marié à Bayonne, le 13 août 1881, avec Étiennette Lucie Sordes (née à Bayonne le 29 juillet 1859), fille de Jean Sordes et de Saubade Dupuy ; et Albert (né à Paris le 28 août 1863), horloger-bijoutier, marié à Ciboure le 26 septembre 1891 avec Jeanne Marie Marguerite Semper (Bayonne, 18 juillet 1878-?).

Jules Courtignon fut domicilié successivement à Paris (164, rue du Faubourg-Saint-Denis) en 1848, à Bonsecours en Normandie en 1853, à nouveau à Paris (10e) en 1857, enfin à Bayonne (rue de Belfort, puis place de la Course dans le quartier Saint-Esprit) en 1872 et jusqu'à sa mort. Son fils et associé Louis Alfred épousa Marie Louise Souliagou, dont il eut trois fils, Henri Marie Jean (Bayonne, 12 juin 1888), Pierre Gabriel (Bayonne, 27 juillet 1889) et Georges-Louis-Clément Courtignon (Bayonne, 23 janvier 1893).

, peintre, décorateur (attribution par source)
Afig : Schnorr von Carolsfeld Julius

Julius (prénom usuel) Veit Hans Schnorr von Carolsfeld, né à le 26 mars 1794 à Leipzig et mort à Munich le 24 mai 1872, peintre et graveur du mouvement nazaréen. Fils et élève du peintre Veit Hanns Schnorr von Carolsfeld (1764-1841) et frère cadet des peintres Ludwig Ferdinand (1788-1853) et Eduard Schnorr von Carolsfeld (1790-1819). Élève à l'Académie des beaux-arts de Vienne en 1811, puis travaille à Rome et à Munich pour Louis Ier de Bavière, qui le nomme professeur à l'Académie des beaux-arts de Munich en 1827. Professeur à l'École supérieure des beaux-arts de Dresde en 1846, il y dirige également la Gemäldegalerie Alte Meister. De son mariage (en 1827) avec Marie Heller, belle-fille du peintre Ferdinand Olivier, il eut trois filles et six fils, dont le ténor Ludwig Schnorr, futur créateur du rôle-titre dans le Tristan de Wagner.

, graveur

Le décor, réalisé essentiellement à la détrempe et partiellement à l'huile (Baptême du Christ), couvrait (avant la restauration de 2007) la totalité du mur en hémicycle, les ébrasements des cinq fenêtres, le cul-de-four de l'abside, la voûte en berceau de la travée droite et l'arc-triomphal. Les motifs décoratifs répétitifs sont exécutés au pochoir.

Catégories

peinture murale

Matériaux
  1. Matériau principal : enduit

    Mise en oeuvre : support

    Techniques : détrempe à la colle, peint au pochoir

  2. Matériau principal : enduit

    Techniques : peinture à l'huile

Iconographie
  1. Thèmes : Baptême du Christ, mandorle, Saint-Esprit, colombe, ange, ciel

  2. Thèmes : Agneau mystique, Le Tétramorphe

  3. Caractère général : symbole

    Thèmes : lion, cerf, balance, fouet, ciboire, hostie, vigne, blé, ancre, Pélican mystique, croix, livre, Alpha et Oméga, Chrisme, colombe, oiseau, poisson

  4. Caractère général : ornementation

    Thèmes : faux appareil, frise, palmette, rinceau


Précision sur l'iconographie :

Mur de l'hémicycle (avant 2007). Au-dessus du lambris de demi-revêtement, un faux appareil gris-vert liseré de rouge, à motifs de tiges feuillues, interrompu à mi-hauteur par un bandeau à fond bleu, orné de rinceaux néo-romans entourant des médaillons quadrilobés à redents ; ceux-ci portent des figurations symboliques : lion, cerf, balance avec épis de blé, flagellum. Au registre supérieur, séparé de l'inférieur par une corniche feinte à palmettes, un faux appareil beige rosé à double joint, sur lequel se détachent quatre médaillons circulaires à fond jaune or : ciboire et hostie entourés de vigne et de gerbes de blé, ancre (Espérance), Pélican mystique (Charité) et croix avec livre portant l'alpha et l'oméga (Foi). Couronnant l'élévation, une frise de palmettes circonscrites vertes et jaunes sur fond bleu. Dans les ébrasements des fenêtres, des vases à anses d'où sortent de hautes tiges feuillues auxquelles sont accrochés des médaillons circulaires rouges, décorés alternativement de couples d'oiseaux et de poissons.

Cul-de-four de l'abside. Au centre, dans une mandorle en amande ourlée de rayons d'or, est figuré le baptême du Christ par saint Jean-Baptiste (dédicataire de l'église). La mandorle se détache sur un ciel d'azur ; au-dessus d'elle, la colombe du Saint-Esprit dans un nimbe crucifère rouge et or (pourtant déjà figurée dans la scène du baptême : ajout de 2007) ; de part et d'autre, s'élevant au-dessus de rochers entourés de nuées blanches, deux couples d'anges en adoration, vêtus de robes aux couleurs symboliques (respectivement rouge et vert, bleu et jaune or, rouge, vert et rose), la tête ceinte de nimbes dorés, les ailes déployées (repeints de 2007).

Voûte de la travée droite. Sur un fond beige rosé semé de croix rouges fleuronnées et nimbées et de fleurettes bleues, un motif central composé d'un carré posé sur la pointe, avec l'Agneau de Dieu vexillifère dans un cercle rouge ourlé de rayons d'or, entouré de quatre demi-lunes avec les symboles du Tétramorphe sur fond or (chacun tient un livre, sauf l'homme de saint Matthieu, qui tient un phylactère avec le nom de l'évangéliste).

Arc-triomphal. Sur l'intrados de l'arc, une frise de motifs végétaux (demi-palmettes perlées vertes) mêlés à des imbrications perlées rouges et bleues sur fond beige, bordée de frises de palmettes circonscrites et de dents de scie dorées. Sur l'extrados de l'arc, côté nef, le chrisme entre l'alpha et l'oméga sur fond rouge dans un médaillon circulaire entouré de rinceaux de vigne, dont deux colombes becquettent les grappes.

Inscriptions et marques
  • inscription concernant l'iconographie, latin, peint

Inscriptions (voûte de la travée droite, sur les livres ou phylactère du Tétramorphe) : VICI LET (sic pour VICIT LEO, repeint fautif en 2007) (lion de saint Marc) ; MAGNIFICAT (bœuf de saint Luc) ; IN PRINCI[PIO] (aigle de saint Jean) ; S. MATHAEUS (homme de saint Matthieu).

État de conservation
  • oeuvre restaurée

Peintures restaurées en 2007. Le décor mural de 1873 a été en grande partie supprimé à cette occasion pour dégager les peintures médiévales sous-jacentes, en laissant toutefois quelques témoins sur les côtés nord et sud. La peinture du cul-de-four a, quant à elle, été profondément transformée à la même occasion : les deux anges orants agenouillés sur des nuées de part et d'autre de la mandorle, la colombe du Saint-Esprit (redondante avec celle qui figure déjà à l'intérieur de la mandorle), les quatre chérubins surmontant celle-ci et le fond bleu étoilé d'or du décor originel (voir photographie de 1990) ont été remplacés par les quatre grands anges en vol, les rochers et les nuées actuellement visibles. La raison de ce remplacement ne semble pas avoir été dictée par une dégradation du premier décor, dans un état de conservation encore très satisfaisant en 1990.

Localisation

Adresse: Nouvelle-Aquitaine , Landes , Laluque

Milieu d'implantation: en village

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