Ensemble du maître-autel (autel, 2 gradins, tabernacle, baldaquin)

France > Nouvelle-Aquitaine > Landes > Larbey

Cet autel fut exécuté pour l'ancienne église Saint-Laurent de Mugron (chef-lieu du canton situé à 9 kilomètres de Larbey). Les archives de cette paroisse conservent la correspondance échangée entre le curé Jean-Pierre Liquet, le baron Pierre d'Antin, maire de la commune, et Arnaud Graciette fils, marbrier à Bagnères-de-Bigorre, pour la construction d'un maître-autel destiné à remplacer un meuble "ruiné depuis les déplorables événements de [17]93". Un contrat fut signé le 26 août 1834 entre l'abbé Liquet et Graciette pour un coût total de 5.700 francs, majoré ensuite de 545 francs en raison "d'améliorations au tombeau et au tabernacle". Divers ajouts successifs (dont deux crédences et un bénitier en marbre) portèrent finalement la dépense à 10.000 francs, dont les paiements s'échelonnèrent jusqu'en novembre 1837 et qui fut réglée en partie par une souscription publique et par des dons particuliers - les plus importants étant ceux du baron d'Antin et de son gendre Bernard-Roch Domenger (1785-1865), riche négociant qui devait par la suite faire reconstruire à ses frais l'église de Mugron (1865-1866). La somme importante touchée par Graciette, après quelques démêlés avec ses commanditaires, n'empêcha pas la faillite de l'entreprise familiale dès juin 1836.

L'autel, mis en valeur par un nouveau décor mural de boiseries et de stucs dû à Pierre Pera, stucateur italien installé à Mont-de-Marsan, et au doreur M(a)invielle, fut béni le 15 novembre 1835 par l'évêque d'Aire, Dominique-Marie Savy. En juin 1851, il fut complété par deux statues d'anges adorateurs en terre cuite dorée, livrées par le doreur bordelais Pierre Louis Daux (de la maison Daux et Doumeret). Ces œuvres correspondent probablement aux deux anges actuellement disposés de part et d'autre de l'autel, qui portent toutefois le cachet de la fabrique Cossin frères et Tellier (mais la maison Daux pratiquait aussi la revente).

La paternité de l'imposant baldaquin d'autel en marbre et bois qui couronne l'autel n'est pas clairement précisée dans les textes conservés, lacune aggravée par la disparition des dessins qui accompagnaient à l'origine le dossier de l'achat de l'autel. Le contrat de 1834 avec Graciette fils, assez imprécis, ne mentionne pas explicitement un baldaquin, mais seulement "deux colonnes [et non quatre] en arrière corps du tombeau de l'autel, les pieds d'estaux [sic] montés en maçonnerie ou en pierre du pays". Bien que sa cohérence avec l'autel ne fasse pas de doute et que certains marbres de couleur soient communs aux deux éléments, son attribution au marbrier bagnérais n'est donc pas assurée. Le stucateur Pera, qui travaillait en 1835 au décor du chœur de Mugron, est aussi l'auteur (en collaboration avec un autre Italien, Codini) du baldaquin d'autel de l'église Notre-Dame de Roquefort (1823), du même type que celui de Mugron/Larbey. Plus proches encore sont les baldaquins produits en grand nombre dans les années 1840 par la maison Doumeret et Daux (fournisseur en 1851 des anges adorateurs déjà cités) : plusieurs ciboriums conservés dans le département de la Charente-Maritime, tous dérivés du modèle du baldaquin de Saint-Pierre de Saintes (1822) - et, à travers lui, des créations de Charles Le Brun à Saint-Séverin et aux Grands-Augustins de Paris -. présentent de telles similitudes avec le baldaquin mugronnais qu'une attribution à la fabrique bordelaise semble plausible. La comparaison avec l'autel d'Arthenac (vers 1845) est particulièrement probante.

Après la reconstruction à neuf de l'église de Mugron par les époux Domenger, le mobilier néoclassique de l'ancien lieu de culte, désormais inadapté au style néogothique du nouveau Saint-Laurent, fut cédé à la veuve de Bernard Domenger, Blanche d'Antin (1805-1899), fille du baron d'Antin qui avait commandé l'autel en 1834. Celle-ci offrit en 1868 à la paroisse de Larbey, où les Domenger possédaient les propriétés de Poyloault et Lestage - son beau-père avait parrainé en 1824 la grosse cloche de l'église -, l'autel ainsi que le bénitier en marbre commandé à Graciette en décembre 1835. L'installation du baldaquin, dont la hauteur excédait celle de la voûte du chœur, nécessita quelques ajustements, dont la suppression du dôme ou cul-de-four crucifère sommital, remplacé par la gloire en bois et stuc qui ornait primitivement le centre de l'entablement. A une date indéterminée, les peintures faux marbre du baldaquin furent recouvertes d'une couleur brune uniforme - une carte postale du début des années 1900 l'atteste - qui a été éliminée à son tour dans le dernier quart du XXe siècle. L'ensemble a fait l'objet d'une restauration complète par l'atelier bordelais Dufon en 2010.

Périodes

Principale : 2e quart 19e siècle

Dates

1835

Auteurs Auteur : Graciette Arnaud

Fils d'Arnaud Graciette aîné (Bagnères-de-Bigorre, Hautes-Pyrénées, 1766 - après 1829) et de Jeanne Pinac, et neveu par alliance de l'orfèvre tarbais Bernard Adour (époux de Marie Graciette). Il échangea à Bagnères, le 5 avril 1829, une promesse de mariage avec Thérèse Marguerite Fernal, fille du marchand toulousain Jacques Fernal et de Marie Lapène (AD Hautes-Pyrénées, 2 E 2/30), mais le mariage ne fut pas célébré (ni à Bagnères, ni à Tarbes ou Toulouse). Marbrier à Bagnères dans la première moitié du XIXe siècle, assistant puis successeur de son père dans la marbrerie familiale, l'une des plus importantes de la ville avec celle des Géruzet (Graciette père y reçut la duchesse de Berry lors de son passage à Bagnères en septembre 1828, mais fit faillite en juin 1836 [Journal politique et littéraire de la Haute-Garonne, n° 87, 21 juin 1836]).

, marbrier (attribution par source)
Auteur : Daux Pierre Louis

PIerre Louis Daux, doreur sur bois et marchand d'ornements religieux bordelais d'origine parisienne, né à Paris le 25 août 1800 et mort à Bordeaux après 1855 ; fils de Remy Daux, boucher à Paris, et de Victoire Séré. Il épousa à Bordeaux, le 14 février 1824, Jeanne Françoise, dite Fanny Doumeret (Bordeaux, 21 novembre 1806 - Bordeaux, 23 septembre 1844), fille de Jean Joseph Doumeret (Bordeaux, 12 janvier 1778 - après 1853), doreur sur bois, et de Marie Jeanne Alexandrine Roché (époux séparés de biens par jugement du tribunal de Bordeaux le 6 juin 1853). Le couple eut deux enfants : Jeanne Amélie Alexandrine (née à Bordeaux le 13 juin 1826), mariée à Bordeaux, le 24 novembre 1849, à Louis Treignac, chasublier et marchand d'ornements religieux (né à Périgueux le 16 octobre 1825), fils de Guillaume et de Jeanne Chambareau ; et Jean Alfred Daux (Bordeaux, 1828 - Dax, 1878). Parmi les témoins du mariage de Pierre Louis Daux et Françoise Doumeret figurèrent le doreur Charles Marie Laporte (1760-?) et les ébénistes Justin Léonard (1789-?) et Guillaume Ladrée (1801-?) ; les déclarants du décès de Françoise Doumeret furent le peintre André Mousselard (27, rue des Remparts) et le doreur sur bois François Toulouse (8, rue Berquin) - tous, peut-être, collaborateurs de Daux et Doumeret.

Par ce mariage fut créée la maison Doumeret et Daux, chasublerie et dorure, puis fabrique de mobilier religieux à Bordeaux, spécialisée dans la production d'autels, active de la Restauration au Second Empire. L'atelier était situé au 58, cours de Tourny, le magasin au 2, rue de l'Archevêché, le domicile personnel de Pierre Louis Daux et de sa belle-famille au 14, cours de Tourny, puis 8, rue d'Albret. La fabrique produisit de nombreuses œuvres repérées en Gironde, en Charente-Maritime et dans les Landes. Ces dernières furent certainement fournies par la succursale de Dax (rue des Carmes), dirigée dans les années 1850 par "Daux fils" (Jean Alfred). En 1855, "M. Daux, fabricant d'autels à Bordeaux" (Pierre Louis), était membre, sous la direction de Léo Drouyn, de la section girondine de la Société française pour la conservation des Monuments historiques et participa au Congrès archéologique de France à Moulins en 1854, aux côtés de son gendre Louis Treignac, "chasublier et fabricant d'autels", de l’architecte Gustave Alaux et du marbrier-sculpteur bordelais Bernard Jabouin.

, fabricant de mobilier religieux (attribution par analyse stylistique (incertitude))
Personnalite : Antin Pierre Jean-de-Dieu d'

Pierre Jean-de-Dieu d'Antin, baron de Sauveterre (Mugron, 8 mars 1770 - Mugron, 22 novembre 1840), maire de Mugron (1806-1814 et 1821-1830), préfet des Basses-Pyrénées (1814-1815). Fils de Pierre Jean d'Antin, baron de Sauveterre, d'Ars et de Montfaucon (1736-1808) et de Marguerite Dupérier Bernadon (1735-1805). Marié à Mugron, le 20 avril 1790, avec Marie Victoire de Castelnau de Laloubère (Mugron, 30 octobre 1768 - Mugron, 4 mars 1847), dont il eut neuf enfants : Marie Nicole Agathe (1791-1864), en 1811 Mme François Remy Moulas, Victorine (vers 1793-?), Bertrand Nicolas (794-1811), Jeanne (1798-1815), Louis Thomas, baron d'Antin (1798-1861), procureur à Tarbes, Bertrand Justin (1801-1869), officier, Félix Alexandre (1802-1865), directeur des postes à Smyrne (Empire ottoman), Marie Hypolite Blanche (1805-1899), en 1832 Mme Bernard Roch Domenger, et Louis André (1807-1821).

, commanditaire (attribution par source)
Personnalite : Liquet Jean-Pierre

Né en 1791, curé de Mugron de 1828 au 28 janvier 1863, chanoine d'Aire et de Dax, mort au collège de Dax le 2 octobre 1865, inhumé à la chapelle du cimetière de Mugron.

, commanditaire (attribution par source)
Personnalite : Domenger d'Antin Marie Hypolite dite Blanche

Marie Hypolite, dite Blanche d'Antin (Mugron, 25 fructidor an XIII / 12 septembre 1805 - Mugron, 7 décembre 1899), fille aînée de Pierre Jean-de-Dieu d'Antin (Mugron, 8 mars 1770 - Mugron 22 novembre 1844), baron de Sauveterre (Hautes-Pyrénées), maire de Mugron, préfet des Basses-Pyrénées, et de Marie-Victoire de Castelnau (Mugron, 30 octobre 1768 - Mugron, 4 mars 1847) ; épouse à Mugron, le 12 novembre 1832, Bernard-Roch Domenger, conseiller général des Landes (1785-1865), dont elle n'eut pas d'enfant (elle adopta sa nièce Blanche d'Antin, épouse Moulas [1845-1932]). Bienfaitrice de l'église de Mugron et de nombreuses paroisses de la Chalosse et du Tursan.

, donateur (attribution par source)
Origine

lieu de provenance

Édifice d'origine : ancienne église paroissiale Saint-Laurent de Mugron

Localisation : Landes , Aquitaine , Mugron

Lieux d'exécution

lieu d'exécution

Ensemble de style néoclassique. L'autel, en marbre polychrome plaqué sur âme de pierre, est porté par un degré en bois parqueté. Le tombeau, d'élévation galbée en quart-de-rond, est construit en brèche grise et jaune de Médous (près de Bagnères-de-Bigorre) pour le corps, en griotte rouge de Campan pour la plinthe en doucine renversée et la traverse supérieure, en marbre blanc uni de Carrare pour les pilastres, le relief central et les bandeaux, et en marbre noir coquillier des Pyrénées pour la table d'autel. Il s'adosse à un massif postérieur rectangulaire supportant deux gradins superposés en brèche jaune de Médous-Beaudéan, avec panneau en griotte de Campan au milieu du gradin inférieur. Le tabernacle, simple armoire parallélépipédique encastrée dans le gradin supérieur, est entièrement en Carrare blanc, à l'exception de la traverse inférieure, en jaune de Médous comme les gradins, de la porte en plein cintre en marbre jaune (brèche du Bénou ?), des pilastres ioniques et de la frise de l'entablement, en marbre vert (sans doute de Campan ou de Montoussé).

Le baldaquin, de plan semi-circulaire, est composé de quatre colonnes corinthiennes au fût monolithe en griotte rouge de Campan et au chapiteau de bois doré, reposant sur des piédestaux parallélépipédiques en marbre gris-vert (de Campan ?) reliés par un stylobate incurvé. Les colonnes supportent un entablement classique en bois peint faux marbre griotte, vert et bleu ; prenant appui sur lui, quatre consoles en S affrontées portent une gloire en bois et stuc polychrome, placée à l'origine au milieu de l'entablement et remplaçant un dôme (ou un cul-de-four) supprimé lors du remontage du baldaquin dans l'église.

Catégories

marbrerie, menuiserie, sculpture, gypserie

Structures
  1. plan, rectangulaire
  2. élévation, galbé, droit
  3. colonne, 4
  4. pilastre, 2
Matériaux
  1. Matériau principal : brèche

    Mise en oeuvre : jaune, noire

    Techniques : mouluré

  2. Matériau principal : marbre veiné

    Mise en oeuvre : rouge

    Techniques : mouluré

  3. Matériau principal : marbre uni

    Mise en oeuvre : blanc, structure, décor

    Techniques : mouluré, décor en relief

  4. Matériau principal : bois feuillu

    Techniques : tourné, décor en relief, décor rapporté, peint, polychrome, faux marbre, doré à la feuille d'or à l'huile

  5. Matériau principal : stuc

    Mise en oeuvre : décor

    Techniques : moulé, décor en relief, décor rapporté, peint, polychrome, peint faux or

Dimensions
  1. Type de mesure : h

    Valeur : 233

    Précision sur la mesure : hauteur totale de l'autel

  2. Type de mesure : la

    Valeur : 250.5

    Précision sur la mesure : largeur totale de l'autel


Précision sur les dimensions :

Autel : h = 98 ; la = 250,5 ; pr = 67. Gradins : h = 19,5 (chacun). Tabernacle : h = 89 (à la corniche) ; h = 117 (avec l'exposition) ; la = 69,5. Baldaquin : h = 750 environ ; la = 438 ; piédestaux : h = 114 ; colonnes (avec base et chapiteau) : h = 279.

Iconographie
  1. Thèmes : La Croix, les Tables de la Loi, gloire, livre, Triangle trinitaire, angelot

  2. Caractère général : ornementation

    Thèmes : pilastre, ordre ionique, ordre corinthien, console, guirlande, feston, palme, rosace, ove, dard


Précision sur l'iconographie :

Le tombeau de l'autel est orné sur sa face d'un relief rapporté en marbre de Carrare représentant les Tables de la Loi et la Croix (symbolisant respectivement l'Ancienne et la Nouvelle Loi) sur une nuée entourée d'une gloire rayonnante ; de part et d'autre, un pilastre cannelé, au "chapiteau" gravé de trois cercles, épousant le galbe du tombeau. La porte du tabernacle, flanquée de deux pilastres ioniques, ne porte aucun décor figuré ; en revanche, la plateforme de l'exposition en marbre blanc affecte la forme du livre aux sept sceaux de la vision de saint Jean.

Les chapiteaux corinthiens (parfaitement canoniques) du baldaquin supportent un entablement en faux marbre orné de rosaces d'acanthe sur la frise, d'un rang de denticules, d'une frise d'oves et dards et de consoles à feuille d'acanthe sur la corniche. Les quatre consoles en volute du couronnement, peintes en fausse griotte rouge, ont leurs rampants décorés de palmes et de chutes de laurier et sont reliées par des festons de fleurs (roses, lys, marguerites et tournesols). Elles supportent une gloire avec le triangle trinitaire entouré de cinq angelots, de nuées et de rayons (placée à l'origine au milieu de l'entablement).

État de conservation
  • remaniement
  • oeuvre restaurée

Le baldaquin a subi un remaniement lors de son installation dans le chœur de Larbey : sa trop grande hauteur a obligé à supprimer le dôme ou le cul-de-four qui le couronnait (et qui était sans doute sommé d'une croix) ; la gloire en stuc, qui était certainement fixée au milieu de l'entablement (comme dans la plupart des baldaquins classiques contemporains), a été alors déplacée au sommet de la composition. Peut-être au même moment (en tout cas avant le début des années 1900), les faux marbres du baldaquin ont été recouverts d'un enduit brun uniforme, qui a été enlevé lors de la restauration d'ensemble du meuble en 2010, par l'atelier Dufon de Bordeaux.

Localisation

Adresse: Nouvelle-Aquitaine , Landes , Larbey

Milieu d'implantation: en village

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