Tissage (usine de tapisserie et de tapis) dit manufacture Emile Castel, puis Castel et Charles, puis Albert Castel, puis Bernaux, puis Lauer, puis Goubely-Gatien, puis atelier de tapissier de la Beauze, actuellement maison et hôtel de voyageurs

France > Nouvelle-Aquitaine > Creuse > Aubusson

Emile Castel, fabricant de tapis et de tapisseries, s´installe à Aubusson dans les années 1840. Il acquiert une parcelle de terrain en profondeur, traversée par le ruisseau de Beauze et s´étendant entre la route de Clermont-Ferrand à Saintes et la colline de Chabassière. Il y fait construire une manufacture de plan rectangulaire d'un seul tenant, abritant, selon plusieurs plans de l´époque, deux fonctions distinctes (sans doute des ateliers de tissage et une teinturerie). La production connaît un fort succès, encouragé par l´obtention d´une médaille d´or à l´Exposition Universelle de 1844. En 1853, au décès d´Emile, son fils Albert (1834-1908), auteur d´un ouvrage sur l´histoire des tapisseries d´Aubusson et de Felletin (1876), reprend la direction de l´entreprise. Il s´illustre par son engagement dans la vie publique aubussonnaise, comme conseiller municipal (1860) mais également comme membre de la société savante créée pour fonder un musée dans les ruines du Chapitre. Distinguée par Napoléon III, la manufacture Castel obtient le titre convoité de « manufacture impériale ».

En 1868, Albert Castel s´associe avec Georges Charles, un autre fabricant de tapis, pour exploiter la société sous la raison sociale de leurs doubles patronymes. Leur collaboration prend néanmoins fin en 1870, la totalité des actifs étant abandonnée à Albert Castel, qui poursuit l´activité seul. En 1881, il fait agrandir le bâtiment abritant les ateliers de tissage et le logement du directeur de quelques travées supplémentaires. Un logement de concierge est également édifié en alignement sur la route de Limoges à Clermont-Ferrand.

A Albert Castel succède Louis Edouard Bernaux, qui rachète la manufacture et en prend la direction de 1891 à 1904. En 1893, il fait bâtir contre le mur de soutènement nord de la propriété une nouvelle teinturerie en briques et pierre.

L´activité est ensuite reprise, en 1910, par Maurice Lauer, un fabricant de tissus, de tapis et de tapisseries, d´origine alsacienne. Après les inondations de 1911, il quitte le site de Puteaux (Hauts-de-Seine), où la maison familiale était implantée depuis l´annexion de l´Alsace par l´Allemagne (1870) et s´installe alors à Aubusson pour la tapisserie et à Lyon, où il fonde La Lyonnaise d´Ameublement, tandis que les imprimés sont traités par l´entreprise Steiner à Ribeauvillé (Haut-Rhin).

En 1927, Maurice Lauer confie la direction du site d´Aubusson à Alfred Gatien (1905-1994), issu d´une vieille famille de lissiers de la ville, formé à l´Ecole Nationale des Arts Décoratifs (ENAD). Dès lors, l´usine, de plus en plus autonome, travaille à façon pour la société Lauer, dont le siège social est basé à Paris, 5 avenue de l´Opéra et pour sa manufacture de tapis et de tissus de Cogolin (Var), créée en 1928 par le fils de Maurice, Jean Lauer.

La période de la Seconde Guerre Mondiale marque un temps d´arrêt dans la production, en raison de la mobilisation d´Alfred Gatien et de sa déportation à Nuremberg, pour fait de résistance.

En 1952, Jean Lauer s´associe avec Suzanne Goubely-Gatien (1907-1997), cousine d´Alfred, qui transfère son atelier de tapisseries de la place du Marché dans les locaux de la manufacture. Leur association cesse au début des années soixante, Suzanne reprenant à son compte la production, toujours assistée de son fidèle cousin.

Une période d´essor s´ouvre alors, grâce aux liens privilégiés noués par Suzanne Goubely avec des nombreux artistes contemporains, au premier rang desquels Jean Lurçat, qui, en 1958, lui confie le tissage de l´une des pièces de sa célèbre tenture du Chant du Monde (l´Eau et le Feu). La manufacture réalise, entre autres, les créations inédites de Prassinos, Tourlière, Picard Le Doux, Lagrange, Gromaire et Singier. Ce succès entraîne l´installation de métiers dans les deux niveaux supérieurs du bâtiment principal, tandis que le rez-de-chaussée accueille un espace de réception des clients, de présentation des œuvres et un secrétariat administratif.

Des bâtiments de construction légère, faisant office de magasin des laines, d'ateliers de peintre-cartonnier et d'espaces de stockage, situés le long de la Beauze, sont emportés lors de la crue de 1960.

Le logement du concierge, situé sur rue, est vendu en 1971. Il est reconverti en hôtel de voyageurs. Suzanne Goubely, qui n'était jusqu'alors que locataire de la manufacture, acquiert le reste du site en 1972.

Malgré la crise de la commande privée survenue dans les années 1980, Suzanne Goubely réussit à maintenir l´activité de la manufacture, grâce à la notoriété de Dom Robert, qui lui confie l´exécution de ses cartons. Une partie du bâtiment principal abritant les ateliers de tissage est toutefois réaménagée en appartement personnel pour Suzanne, qui fait remplacer la cheminée du pignon ouest par une grande baie vitrée ouvrant sur le jardin.

Lors de son décès, en 1997, Suzanne Goubely lègue par testament tous ses biens à l´abbaye bénédictine d´En-Calcat (Tarn), au sein de laquelle Dom Robert, disparu la même année, était moine. La manufacture et son terrain deviennent alors la propriété de la communauté religieuse.

Dès cette date, un atelier de tapissier, baptisé Atelier de la Beauze, continue de travailler sur le site, sous l´égide de frère David et de Michèle Van Der Bossche, l'ancienne secrétaire de Suzanne. Huit salariés de la manufacture Goubely sont réembauchés, et deux ouvriers recrutés, avec l´objectif exclusif de tisser l´intégralité de l´œuvre de Dom Robert, pour constituer la collection du futur musée consacré à sa mémoire, dans le Tarn.

Cette mission s´achève en 2005 ; l'Atelier de la Beauze ferme alors ses portes. Il est reconverti en maison. Cette nouvelle disposition n´a pas entraîné de modification dans ses aménagements intérieurs, qui ont été conservés en l´état. La teinturerie sert aujourd'hui de remise de jardin.

En 1952, la manufacture Goubely faisait travailler douze ouvriers. En 1966, elle comptait 20 salariés.

Périodes

Principale : 2e quart 19e siècle

Secondaire : 4e quart 19e siècle

Secondaire : 2e moitié 20e siècle

Dates

1881, daté par source

1893, daté par source

Auteurs Personnalite : Castel Emile, commanditaire (attribution par source)
Personnalite : Castel Albert, commanditaire (attribution par source)
Personnalite : Bernaux Louis, commanditaire (attribution par source)
Personnalite : Lauer Maurice, commanditaire (attribution par source)
Personnalite : Goubely-Gatien Suzanne, commanditaire (attribution par source)

Les bâtiments de la manufacture sont implantés dans un cadre verdoyant, parcouru par le ruisseau de la Beauze. Ils occupent une parcelle d´îlot traversante, sise entre l´avenue de la République, au nord, et la ruelle de Beauze, au sud, qui court sur le flanc de la colline de Chabassière. A front de rue est bâti l´ancien logement du concierge de la manufacture, qui a été reconverti en hôtel de voyageurs. Edifié en pierre de taille, il se développe sur cinq travées, sous un toit à longs pans brisés couvert de tuile plate. Corniche moulurée, plates-bandes appareillées et chaînages d'angle harpés constituent les seuls éléments décoratifs de son élévation sur rue. De l´autre côté de la Beauze, franchie par un pont et un étroit chemin de terre, en retrait de l´avenue de la République, se trouve le bâtiment principal, qui abritait les ateliers de tissage, le bureau et le logement du directeur. De plan rectangulaire régulier, orienté est et ouest, sous un toit à longs pans recouvert de tuiles plates, il comporte un étage carré et un étage de comble et se développe sur douze travées percées de baies à linteau droit. L´élévation, en moellons de granite enduits, avec présence d´appuis saillants moulurés pour les baies du premier étage et chaînes d´angle harpées en pierre de taille, est couronnée d´une corniche moulurée. Les deux campagnes d´édification du bâtiment sont lisibles, en façade, à travers l´interruption de la ligne faîtière et la pente plus prononcée adoptée par le toit, à l´ouest. La manufacture a conservé ses volumes intérieurs et ses équipements d´éclairage, caractéristiques de l´activité de la tapisserie. Quatre lucarnes à fronton-pignon (plein ou ajouré d´un dessin tréflé), avec des jouées bardées d´ardoise, surmontent les travées latérales de l´édifice, tandis que la quatrième travée est marquée par une lucarne à fermette débordante, portant la trace probable de l´accroche d´une poulie. Le pignon ouest a été modifié par le percement d´une porte vitrée et d´une large baie rectangulaire. A l´est de la manufacture se trouve accolé un petit édifice bas, de plan carré, recouvert d´un appentis, avec une souche de cheminée en brique : il s'agit de la première teinturerie de la fabrique, dont subsiste, pour toute installation d´origine, le conduit d'évacuation du poêle. Contre le mur de soutènement nord de la propriété s´élève la teinturerie, bâtie en moellons de pierre grossièrement équarris et en brique, sous un toit à longs pans couvert de petites tuiles plates. Elle a conservé sa cheminée circulaire en brique, partiellement masquée par la végétation et ses ouvertures de cuisson, mises en valeur par une frise d'arcatures en brique, surmontée par des impostes cintrées à petits bois rayonnants.

Murs
  1. Matériau du gros oeuvre : granite

  2. Matériau du gros oeuvre : pierre

  3. Matériau du gros oeuvre : brique

  4. Revêtement : enduit

  5. Mise en oeuvre : moellon

  6. Mise en oeuvre : pierre de taille

Toits
  1. tuile plate
Plans

plan rectangulaire régulier

Étages

1 étage carré, étage de comble

Élévations extérieures

élévation à travées

Couvertures
  1. Forme de la couverture : toit à longs pans

  2. Forme de la couverture : toit à longs pans brisés

  3. Partie de toit : pignon découvert

État de conservation
  1. établissement industriel désaffecté
Décors/Technique
  1. maçonnerie

Localisation

Adresse: Nouvelle-Aquitaine , Creuse , Aubusson , 12 A avenue de la République

Milieu d'implantation: en ville

Cadastre: 2007 (AH 138, 139, 162, 164, 160, 161, 159)

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