Port de Saint-Savinien

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Le commerce

Le port de Saint-Savinien est mentionné aux 13e et 14e siècles pour le transport de vin et de sel. En 1227, des marchands flamands y chargent des vins dans deux bâtiments à destination de Boston, et une voie terrestre saunière, partant vers le Limousin et le Massif central via Matha, est attestée. Le port semble à cette époque plus important que celui de Tonnay-Charente. Il y existe un chantier de construction dans lequel Philippe Le Bel fait réparer des galères en 1303. En 1340, deux vaisseaux de Saint-Savinien participent à la grande expédition navale contre la Flandre, aux côtés des ports normands. Dans les titres du comté de Taillebourg, un acte de 1441 situe une maison "tenant d'une part au chemin qui va du moulin de Charenton à la grüe du port, d'un bout au quay et rivage du port, d'autre part au long de la Charente..." Ce texte témoigne de l'importance du port déjà équipé d'un quai et d'une grue.

Des chantiers de construction sont rattachés au port de Saint-Savinien. Ainsi, au 16e siècle, des bateaux y sont armés pour la pêche à Terre-Neuve. En 1559, le seigneur de Taillebourg est réintégré dans sa haute justice en un lieu appelé le Bout de Chail, au port de Saint-Savinien. Chail désignant un caillou en patois saintongeais, il s'agit vraisemblablement de l'extrémité nord-ouest du port qui aurait déjà été dédié aux chargements de pierre -le quartier du Chail existe toujours. Dès cette époque, la navigation est difficile à cet endroit ; en 1604, un ordonnance de police est rendue pour le nettoiement de la rivière au port de Saint-Savinien et "portant défenses à toute personne d'y rien jeter qui pût le boucher et ou embarasser."

Au 17e siècle, le bâtiment d’un capitaine de Saint-Savinien, qui participe au commerce d’Abbeville, est pris par les Espagnols.

Au 18e siècle, le développement du commerce fluvial est tel que la paroisse prend le nom de Saint-Savinien-du-Port. Sur sa carte du 49e quaré de la généralle des costes du Bas-Poitou, Païs d'Aunis et Saintonge, Claude Masse note en 1717 : " Il y a toujours au port de Saint-Savinien nombre de barques et quelques bâtiments à 3 mâts, il se fait en cet endroit un grand commerce en pierre de taille." Au port "où il y a toujours un grand nombre de petits batiments qui viennent de la mer" indiqué au long de la traversée de l'agglomération et adjacent au "port ou on embarque des pierres de taille" en aval. Le trafic fluvial est important : de la pierre est exportée pour la construction de bâtiments à Louisbourg, en 1725 et 1726 ; 30 milliers de résine et 1350 planches de pin sont importés de Bayonne en 1767. Dans les années 1750, 27 barques (bateaux pontés équipés pour le mer), 5 gabares et 2 coureaux (bateaux pontés de 15 à 20 tonneaux d jauge) sont inscrits dans ce port.

Les rôles d'armement du quartier de Saintes de 1763 contiennent celui de la barque de 18 tonneaux, la Marie Marguerite, du port de Saint-Savinien, appartenant à Adrien la Mote et armée à Saintes pour aller à Concarneau. Passant par l'île d'Oléron, elle se charge de sel qui est débarqué à Concarneau où elle embarque des sardines pour Saint-Savinien. La chaloupe, le prophète Samuel, de 6 tonneaux ramène du blé et de l'orge de Marans, des fèves de Marennes. Elle emporte des bûches et des fagots à Fouras, de l'orge dans l'île d'Oléron d'où elle revient à Rochefort chargée de sel. En 1764, la chaloupe la Jeanne de 5 tonneaux assure le transport de bois de chauffage, de pierre et de vivres vers l'île d'Aix. Elle charge également du bois de chauffage et des pierres pour l'île d'Oléron d'où elle rapporte un chargement de peaux de boeufs à Saintes. Quant à la barque de 28 tonneaux, le Don de Dieu, elle part pour Brest, en mai 1765, chargée de vin d'où elle revient avec un mortier de fonte pour la marine et des futailles vides.

Depuis le Moyen Age, le passage des bateaux et gabares est soumis au paiement de droits perçus par le seigneur local. Le décret de 1804 établit à Saint-Savinien l’un des bureaux de l’octroi de navigation sur la Charente, droits calculés sur le tonnage de marchandises transportées, dans un sens et dans l’autre, depuis Taillebourg.

Un rapport de l’ingénieur Dor de 1834 décrit l’état de la rive droite à Saint-Savinien. Pour lutter contre les attaques des courants qui se portent contre la rive droite formant l’angle rentrant d’un coude, les habitants ont élevé des murs. Au début du 19e siècle, ces derniers forment des quais qui facilitent les opérations du commerce. En amont du bac (sa cale se trouve au milieu du bourg), ils occupent une longueur d’environ 280 mètres en cinq parties principales et, en aval, une longueur d’environ 100 mètres en trois parties principales. Une grande partie des bords de la rivière est occupée par des maisons et des jardins. En amont du bac, ces maisons forment un front d’environ 200 mètres, dont 166 mètres en une seule ligne continue et les jardins une longueur d’environ 75 mètres. En aval, il ne se trouve pas de maison, mais seulement des jardins sur environ 200 mètres. Les petites portions de murs de soutènement, édifiés par les propriétaires riverains, sont dans un état complet de dégradation et gênent la navigation. Le halage, en raison de la rapidité et de la direction des courants, ne se fait que sur la rive gauche. Le commerce de Saint-Savinien se compose alors essentiellement de pierre et de bois de chauffage, dont les dépôts et les chargements se font dans une prairie et le chargement sur la berge naturelle, à l’aval du bourg.

A partir de 1822, le bateau l'Hirondelle, qui assure le transport de passagers entre Saintes et Rochefort, fait halte dans le port de Saint-Savinien deux fois par semaine. Un ponton est établi à cet effet en amont du port, 30 mètres en amont d'une cale de carénage.

A la suite des projets d’amélioration proposés par l’ingénieur Dor, des travaux sont effectués dans le port. Le projet comprend à la fois des murs de quais et deux cales d’abordage « indispensables pour le chargement et le déchargement des navires », ainsi que l’agrandissement d’une cale de carénage. Il est envisagé de rendre le quai public par l’acquisition des jardins clos de petits murs et de haies situés entre la rue et la rivière. Ce quai s’étendra sur toute la partie en aval de la cale du bac. Ce projet est réalisé par François-Alexandre Gilbert, adjudicataire du marché le 12 août 1840 , mais la cale de carénage n’est toujours pas terminée en 1846. Dans son mémoire de 1857, l'ingénieur en chef des ponts et chaussées écrit qu'un quai magnifique de 455 mètres de long a été construit par l'Administration. A la demande des habitants, la rampe aval de l’ancienne cale du bac (reconstruite plus en amont vers 1844, à l’emplacement de la cale des moules) est conservée pour servir d’abreuvoir et pour l’accostage des chaloupes. Outre les chargements de pierre, la navigation à Saint-Savinien semble consister alors en de petits bâtiments « qui viennent apporter aux habitants quelques coquillages.»

L'ouverture, en 1875, de la dérivation éclusée créée sur la commune du Mung facilite le passage des bateaux de plus grand gabarit qui n'ont plus à franchir le seuil de Saint-Savinien, et la circulation fluviale devient presque nulle au port. Les travaux qui y sont réalisés ensuite par le service de la navigation ont seulement trait à l'écoulement des eaux pour éviter les trop nombreuses inondations. Les autres travaux sont de la responsabilité du service vicinal en raison de la présence du chemin de grande communication n° 14 qui longe le port. Au moment de la construction du pont fixe, ouvert à la circulation en 1879, de nouveaux murs de quai sont édifiés à ses abords.

En 1882, le quai est élargi dans la partie aval du port en remblayant la cale de carénage aménagée en 1841 (qui est dite n'avoir jamais servi à la réparation des navire) et en édifiant un mur de soutènement, sur une longueur de 56 mètres, dans l'alignement des murs adjacents. Ces murs sont fondés sur une plate-forme en bois reposant sur des pieux flottants de 10 mètres de longueur. Couronnés par des pierres de Crazannes, ils possèdent un parement en pierre de Saint-Savinien et présentent un léger fruit. M. Rateau jeune est l'adjudicataire de ces travaux. Dans les mêmes années, un projet de prolongement des quais en aval, au lieu-dit port aux pierres, n'est pas réalisé. Cet endroit, à l'aval des hauts-fonds, est réservé au chargement des blocs de pierre extraits des carrières toutes proches. Des madriers servent de passerelle entre la berge et les gabares. En 1918, c'est ici que se concentre le seul trafic du port de Saint-Savinien et pourtant, le début de la Première Guerre mondiale a sonné le glas de l'extraction de la pierre locale.

Une nouvelle portion de quai, longue de 42 mètres et qui menaçait ruines, situé en en aval de la partie bâtie en 1882, est reconstruite en 1893. D'autres parties, en mauvais état, font aussi l'objet de réfections, comme le mur en amont de la cale d'abordage reconstruit en 1922 par Léon Courty de Rochefort. .

De nos jours, quelques petits bateaux sont amarrés le long du mur de quai de la rive droite, mais les aménagements pour la plaisance ont été réalisés sur la rive gauche dotée d'un long ponton. Une base de loisirs existe sur l'île de la Grenouillette sur la commune de Le Mung depuis 1987.

La pêche

Les eaux de la Charente, très poissonneuses, ont permis le développement d'une activité de pêche tout à fait essentielle dans l'histoire de Saint-Savinien. Au 19e siècle, la ville était même considérée comme la capitale de la pêche fluviale en Charente.

Saint-Savinien était réputé pour la pêche des "patagaux", moules perlières d'eau douce. Ces gros mollusques, mesurant jusqu'à 20 centimètres de longueur, contiennent parfois une perle" ne cédant rien aux plus belles pièces du Levant". Au 18e siècle, les pêcheurs traînaient une drague au fond de l'eau et récupéraient ainsi le fameux coquillage. Par la suite, cette pêche a évolué et a été faite par des "plongeurs" qui fouillaient le fond et remontaient les "patagaux". Une tradition de pêche s'est développée. De nombreux Savinois, amateurs ou professionnels, pratiquaient cette activité. Les plans des quais au 19e siècle mentionnent l'existence d'une "cale aux moules".

La Charente offrait également quantité de civelles appelées dans la région, pibales... Ces jeunes anguilles de 7 à 9 mois viennent de la mer des Sargasses et traversent l'océan Atlantique pour rejoindre nos côtes. La pêche aux pibales se déroulait de décembre à mai. Albert Brient, un ancien pêcheur savinois, se souvient en avoir pêchées 250 kg en une matinée. Ce petit poisson translucide était pêché avec une "trouille", instrument ayant la forme d'une épuisette.

La pêche aux anguilles était aussi très pratiquée. Au début du 20e siècle, 25 tonnes de ce poisson effilé étaient sorties du fleuve tous les ans. Pour les pêcher, on utilisait "une drague", un filet attaché entre deux embarcations dérivant sur plusieurs kilomètres. Au début du 20e siècle, Saint-Savinien était classé premier port de France pour la pêche à l'anguille. Aujourd'hui encore, cette tradition perdure.

On pêchait également la "fausse alose", c'est-à-dire la gatte. La fausse alose était envoyée à Nantes où ses oeufs servaient à la fabrication d'une variété de caviar. Elle était notamment pêchée à l'aide d'un carrelet à main, une armature en bois dotée d'un filet.

La série de carrelets le long du fleuve est aujourd'hui le témoin de cette tradition de pêche. Ces petites cabanes sur pilotis sont investies par les pêcheurs qui remontent, notamment, des anguilles des eaux de la Charente. La tradition de pêche fluviale persiste encore aujourd'hui, mais à une échelle plus réduite.

Périodes

Principale : Moyen Age, Temps modernes, Epoque contemporaine

Auteurs Auteur : Gilbert François Alexandre

Entrepreneur adjudicataire des travaux du port de Saint-Savinien en 1840.

, entrepreneur (attribution par source)
Auteur : Rateau jeune

Entrepreneur ; quai à Saint-Savinien en 1882

, entrepreneur (attribution par source)
Auteur : Courty Léon

Entrepreneur à Rochefort ; mur de quai à Saint-Savinien en 1922

, entrepreneur (attribution par source)

Sur la rive droite de la Charente, le port forme un grand arc sur une longueur d’environ 1100 mètres en suivant le bord externe d'une courbe du fleuve. Dans la partie aval, il est formé de quais longés par la route départementale 114, tandis que, dans la partie amont, sur 750 mètres, des maisons sont bâties jusqu’au bord du fleuve. Plusieurs types de maisons, parmi les plus anciennes du bourg - du 17e siècle, voire du 16e -, s'observent sur le port, beaucoup sont d'anciens commerces ou des demeures de pêcheurs. L'autre rive, restée en herbe, est dotée d'un ponton flottant de 80 mètres de long à l'aval du pont de la départementale 18.

Dans la partie aval, les murs de quai ont été établis selon une série de lignes brisées successives de manière à suivre la courbe du fleuve. Ils sont construits en pierre de taille et présentent un fruit plus ou moins important. Ce quai est planté d'arbres et doté d'un garde-corps métallique sur toute sa longueur. En partant de l'aval, une première cale pavée est établie dans l'alignement du quai. Parallèle au lit du fleuve et orientée vers l'amont, elle sert d'appui à une passerelle flottante qui donne accès à la rive opposée. Une deuxième cale semblable existe 150 mètres à l'amont. Plus loin, le quai, doté d'un garde-corps en pierre de taille sur 20 mètres de long, se termine à sa jonction avec le pont de la départementale 18.

Dans la partie amont du port, le fleuve est bordé par une succession de murs de différentes hauteurs et non alignés. Certaines maisons, construites légèrement en recul du fleuve, sont dotées d'un jardin en terrasse et d'une cale de débarquement pour le déchargement des marchandises. D'autres, construites juste au bord du fleuve, sont dotées de fenêtres aux appuis saillants qui permettaient de charger et décharger les marchandises directement des bateaux stationnés en contrebas. D'autres maisons sont plus éloignées du fleuve, séparées de leur jardin par la rue, le jardin ayant pris la place des anciennes cales de débarquement.

Certaines façades de maisons présentent des graffiti de bateaux, ce qui démontre l'importance du fleuve dans la vie de la cité. Toujours gravés dans la pierre de taille, ils sont plus ou moins lisibles. Ceux retrouvés jusqu'à présent représentent des bateaux à voile. Il n'y a aucun navire à vapeur tels que les remorqueurs utilisés pour tirer les gabares à partir de la fin du 19e siècle. L'interprétation de ces dessins est délicate et plusieurs hypothèse sont possibles : croquis de construction de navires, transmission d'un savoir ou encore signalétique d'une maison de marin.

Murs
  1. Matériau du gros oeuvre : calcaire

    Mise en oeuvre : pierre de taille

Toits

Localisation

Adresse: Nouvelle-Aquitaine , Charente-Maritime , Saint-Savinien

Milieu d'implantation: en village

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