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Historique
L'Institut régional des jeunes sourds est situé le long de l'ancienne route de Bordeaux, au coeur de l'ancien faubourg de la Tranchée, aux portes sud de la ville de Poitiers. Il se trouve sur un terrain qui n'était pas bâti en 1838, comme le montre le plan cadastral d'alors, et qui dépendait de la propriété voisine appelée "la Maison Neuve" (aujourd'hui 128 à 130 bis avenue de la Libération). Celle-ci appartenait à la famille La Guéronnière de Lusigny, propriétaire du domaine de Fief Clairet, à Saint-Benoît. Juste à côté aussi se trouve le bureau d'octroi. C'est ici que viennent s'installer en 1856 les Frères de Saint-Gabriel. Depuis 1825, ils tiennent des écoles pour sourds-muets à Loudun et à Rouillé mais devant le nombre croissant d'élèves et de demandes d'admission, il leur faut chercher un endroit plus grand et plus central. A Poitiers, au Pont-Achard, existe déjà depuis 1833 une institution pour sourdes-muettes, tenue par les Filles de la Sagesse et transférée à Larnay, commune de Biard, en 1847. En 1855, le frère Bernard, un des professeurs de l'école de Loudun, est missionné pour trouver des locaux à Poitiers, en invocant l'aide et la protection de Notre Dame, apparue à la Salette quelques années plus tôt. Le 19 septembre 1856, jour de la fête de Notre Dame de la Salette, les Frères de Saint-Gabriel prennent en location une maison appelée "le Pavillon", située faubourg de la Tranchée et appartenant à Mme Jeanne Gomez de la Torre, veuve de Joseph Valette, demeurant à Poitiers (il s'agit de l'actuel bâtiment d'accueil). La propriété comprend aussi des hangars, une cour et un jardin délimités par un clos de mur. Les seize premiers élèves y emménagent le 18 octobre suivant. A cette occasion, un groupe de statues représentant l'apparition de Notre Dame de la Salette est acheté. En mai 1857, on inscrit sur la façade : "Maison Notre Dame de la Salette. Institution des jeunes sourds-muets". Peu après, on édifie dans le jardin un monticule recevant un groupe de sculptures en fonte représentant également l'apparition (ce groupe est encore visible dans le jardin). Une société de patronnage est rapidement créée. Classes, dortoirs et chapelle sont aménagés dans le bâtiment loué. En 1862, la petite chapelle est enrichie d'un maître-autel orné d'un groupe scultpé de la Salette, réalisé par un élève, Etienne Charprenet, et de deux autels latéraux, dédiés l'un à saint François de Salles, l'autre à sainte Anne. A la même époque, le nombre d'élèves augmentant, l'institution loue l'ancienne vinaigrerie contigue à la maison (actuel bâtiment du refectoire et de bureaux) et le transforme en classes et réfectoire au rez-de-chaussée, avec un grand dortoir au-dessus. En 1871, on compte trente élèves. En 1874, les héritiers de la veuve Valette doivent vendre la propriété occupée par l'institution. Le 27 mars, les Frères de Saint-Gabriel parviennent à l'acheter grâce à l'aide financière d'un mécène, M. Gérasime Lecointre (1809-1888), avocat, spécialiste d'histoire et d'archéologie, un des fondateurs de la Société des antiquaires de l'Ouest, et marié à Marie-Louise Dupont. M. et Mme Lecointre-Dupont entendent par cette action rendre hommage à leur fils Marie-Hilaire-François, décédé à 21 ans, à Naples, le 5 juin 1873, et qui était atteint d'un commencement de surdité. Une autre donation d'importance est effectuée deux ans plus tard par Mlle Pauline Dauvilliers, par ailleurs fondatrice du couvent de Salvert à Migné-Auxances. En octobre 1875, sur les conseils de M. Lecointre-Dupont, l'institut fait appel à l'architecte Boyer pour dresser les plans d'un vaste bâtiment parallèle à l'avenue, avec rez-de-chaussée, trois étages et une chapelle en retour d'équerre. La première pierre est posée le 15 juin 1876. Les travaux ne concernent toutefois que la construction d'une première moitié du bâtiment, celle de droite, qui jouxte la maison d'origine. Le nouvel édifice est achevé en 1878 et béni par le vicaire général de l´évêché de Poitiers le 24 novembre. L´institution accueille alors 94 élèves. A l´intérieur sont aménagés une salle d´études, sept salles de classe, deux dortoirs, des ateliers de mensuierie, de cordonnerie, de tour, de typographie, un théâtre, etc.. Entre 1894 et 1899, l´atelier de typographie se transforme en véritable imprimerie qui diffuse sa production à l´extérieur. La grande fête organisée pour les cinquante ans de l´institution en 1888, démontre l´exiguité et l´insuffisance de la chapelle, installée depuis 1856 dans une grange. Le 27 mars 1895 sont alors présentés les plans d´une nouvelle chapelle, établis par l´architecte Alcide Boutaud (1844-1929). Celui-ci a conçu plusieurs dizaines d'édifices en Poitou et en Vendée, par exemple la basilique Notre-Dame de Pitié, celle de Saint-Benoît Labre, l'église Saint-Etienne de Niort ou encore la chapelle du collège Saint-Stanislas à Poitiers (actuelle Maison de la Région), édifiée quelques années avant celle de l'Institut des sourds-muets. Comme en 1874, M. Lecointre-Dupont apporte les finances nécessaires, en plus de nombreux dons en nature. Le 14 mai, la première pierre est bénite par le curé de l´église Saint-Hilaire de Poitiers. Elle renferme des reliques et médailles protectrice, ainsi qu´un parchemin commémoratif. Dès le 5 décembre, la nouvelle chapelle, dédiée à Notre Dame de l´Annonciation, est consacrée par l´évêque. En février 1898, un harmonium est installé sur la tribune. Le 22 mars 1898, l´institut ouvre une nouvelle section destinée à accueillir les élèves aveugles, en plus des sourds-muets. Le nombre d´élèves étant toujours croissant, et la première moitié du bâtiment principal attendant depuis 1876 la construction de la seconde, celle-ci est engagée en 1913. La nouvelle construction ajoute à la première ses 23 mètres de long et 13 de large, le tout formant un ensemble parfaitement homogène. A l´été 1914 se termine le troisième étage, la toiture est posée en octobre. Le 8 septembre 1915, la statue de Notre Dame de la Salette est érigée au sommet de la façade sur l´avenue. Entre temps, les bâtiments de l´institut ont été transformés en hôpital de la Croix-Rouge qui reste jusqu´en 1919. En 1925, une nouvelle section pour sourds-muets-aveugles est ouverte. Le pavillon d'entrée est transformé et surélevé en 1927. L'année suivante, les ateliers sont agrandis. Quelques années plus tard, l´ancienne vinaigrerie transformée en réfectoire, à côté du pavillon d´accueil, est surélevée d´un étage et des cuisines sont construites devant, dans l´ancienne cour, le long de l´avenue. En 1939-1940, l'institution sert à nouveau d'hôpital. Au printemps 1940, elle accueille des réfugiés. Dans les années 1970, de vieux toits situés à l´extrémité ouest de l´enclos, derrière la maison qui longe l´avenue et qui abrite le centre d´action médico-sociale précoce, sont démolis et remplacés par des hébergements. Dans la cour derrière le réfectoire, le préau fait place à des salles d´activités, et un gymnase prend place au fond. Aujourd´hui, L´Institut régional des jeunes sourds (IRJS) abrite deux entités : la Section d´enseignement et de formation professionnelle (SEFP, environ 60 élèves dont 25 internes) ; la Section d´enseignement et d´éducation spécialisée pour sourds avec handicap associés (SEESHA).
Détail de l'historique
Périodes |
Principale : 4e quart 19e siècle Principale : 1er quart 20e siècle |
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Dates |
1876, daté par travaux historiques 1895, daté par source 1913, daté par source |
Auteurs |
Auteur :
Boyer, architecte (attribution par travaux historiques) Auteur : Boutaud Alcide, architecte (attribution par travaux historiques) |
Description
L´Institut régional des jeunes sourds occupe un îlot délimité par l´avenue de la Libération et la rue de l´Abbé-de-l´Epée. L´essentiel des bâtiments se trouvent du côté de l´avenue. Délimité par un mur avec grille et deux portails à piliers maçonnés, un jardin est encadré à droite par un bâtiment d´accueil et de bureaux, au fond par un long et haut édifice abritant les salles de classes et les hébergements des élèves, et à gauche par la chapelle devenue centre de documentation. Le bâtiment d´accueil et de bureaux est, semble-t-il, le plus ancien de tous, celui occupé en premier par les Frères de Saint-Gabriel. Il s´agit d´un édifice de plan massé, couvert d´un toit en ardoise et à croupes, et ouvrant sur l´avenue par trois travées d´ouvertures, dont celles latérales comprenant deux lucarnes à croupes. La travée centrale comprenait à l´origine la porte principale, aujourd´hui transformée en fenêtre. Au-delà du bâtiment d´accueil, toujours le long de l´avenue, se trouve un autre bâtiment administratif dont le rez-de-chaussée est occupé par le réfectoire et les cuisines, au-dessus d´une cave. C´est ce bâtiment qui abritait la vinaigrerie mentionnée lors de l´arrivée des Frères de Saint-Gabriel, et qui a été surélévé et augmenté de cusines, alignées sur l´avenue, dans les années 1930. Couvert lui aussi d´un toit en ardoise et à croupes, sa particularité réside dans les encadrements des baies côté avenue, réparties en cinq travées et alternant la brique et la pierre. A l´arrière, la façade est plus sobre, avec juste une niche ayant sans doute abrité une statue. Derrière ce bâtiment se trouve une cour avec, au fond, un gymnase. L´imposant bâtiment de classes et d´hébergement domine non seulement l´ensemble mais aussi le quartier, du haut de ses trois étages et de sa haute toiture en ardoise, à longs pans et à pignons découverts. Les niveaux sont séparés par des bandeaux sur la façade côté avenue, et une corniche à modillons couronne la façade côté avenue et côté cour. La façade côté avenue est rythmée par les treize travées d´ouvertures. La verticalité ainsi formée se retrouve sur la façade côté cour. Là, la travée la plus à droite s´inscrit dans une avancée surmontée d´une petite terrasse. Côté avenue, une travée sur deux comprend une lucarne à longs pans débordants. La travée centrale est constituée de baies jumelles et, au sommet, d´une haute lucarne en pierre à fronton triangulaire et à ailerons. Le rez-de-chaussée est occupé par une galerie qui ouvre sur le jardin, et par des hébergements pour les élèves. Le premier étage reçoit des salles de classes. Les second et troisième étages sont occupés par d´autres hébergements pour les élèves, répartis de part et d´autre d´un couloir central, comme les salles de classes du premier étage. Tous ces niveaux sont desservis par deux grands escaliers rampe-sur-rampe situés aux extrémités du bâtiment. Derrière ce grand bâtiment principal s´étend une cour bordée à l´est par des salles d´activités et à l´ouest par un espace arboré. Le tout est cerné par un mur de clôture. A l´ouest du bâtiment principal s´élève un immense cèdre. La chapelle qui ferme sur la gauche le jardin côté avenue, est perpendiculaire à celle-ci et au bâtiment principal. Une sacristie lui est accolée à l'ouest. La chapelle est couverte d´un toit en ardoise à longs pans et à pignons découverts. Son chevet est à trois pans percés chacun d´une baie en arc brisé. Côté avenue, au sud, la chapelle ouvre par une porte surmontée d´un tympan en arc brisé, et par une rose. Les murs latéraux sont percés de trois baies en arc brisés, plus une porte côté jardin. A l´intérieur, la nef est couverte d´une voûte d´ogives. Les ogives et les doubleaux transversaux retombent sur des colonnettes à chapiteaux qui descendent jusqu´au sommet des bas-côtés. Ces derniers sont surmontés de galeries latérales qui se rejoignent en une tribune au-dessus de la porte du fond. La tribune est supportée par trois arcs brisés reposant sur des colonnes à chapiteaux. Au-delà de la chapelle, vers l´ouest, se trouvent les ateliers et une ancienne maison qui abrite aujourd´hui les bureaux du Centre d´action médico-sociale précoce. Alignée sur l´avenue, cette maison présente en façade trois travées d´ouvertures dont la porte centrale. Elle possède un étage carré, un étage en surcroît et un sous-sol accessible par un escalier en pierre. Entre cette maison et la chapelle, un passage couvert donne accès à l´arrière des bâtiments.
Détail de la description
Murs |
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Toits |
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Étages |
sous-sol, 3 étages carrés, étage de comble |
Élévations extérieures |
élévation ordonnancée |
Couvertures |
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Décors/Technique |
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Décors/Représentation |
Précision sur la représentation : La lucarne centrale du bâtiment principal côté avenue, est surmontée d´une croix. Entre les deux baies jumelles a pris place une statue de Notre Dame de la Salette, sous la protection de laquelle les Frères de Saint-Gabriel avaient placé l´institution. Au-dessus figurent les initiales de la Vierge, MA, entrelacées et rayonnantes. Elles s´inscrivent au milieu d´une couronne de lys et de rubans, et sont surmontées d´une couronne d´étoiles. L'extérieur de la chapelle, très sobre, ne présente qu'un décor sculpté, au-dessus de la porte sud, sur l'avenue. Placé sur le tympan de l'arc brisé, un demi relief représente l'Annonciation. A l´intérieur de la chapelle, les chapiteaux qui supportent les retombées d´ogives et la tribune sont ornés de feuillages, de grappes de raisins, de gerbes de blé. Le garde-corps des tribunes est constitué d´une suite de trèfles ajourés. |
Informations complémentaires
Type de dossier |
Dossier d'oeuvre architecture |
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Référence du dossier |
IA86004940 |
Dossier réalisé par |
Suire Yannis
Conservateur en chef du patrimoine au Département de la Vendée et directeur du Centre vendéen de recherches historiques à partir de 2017. |
Cadre d'étude |
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Aire d'étude |
Poitiers |
Phase |
étudié |
Date d'enquête |
2009 |
Copyrights |
(c) Région Nouvelle-Aquitaine, Inventaire général du patrimoine culturel |
Citer ce contenu |
Institut Régional des Jeunes Sourds (IRJS), Dossier réalisé par Suire Yannis, (c) Région Nouvelle-Aquitaine, Inventaire général du patrimoine culturel, https://www.patrimoine-nouvelle-aquitaine.fr/Default/doc/Dossier/44b66aae-c922-4476-8e71-54be106abc19 |
Titre courant |
Institut Régional des Jeunes Sourds (IRJS) |
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Dénomination |
établissement de bienfaisance centre de formation |
Parties constituantes non étudiées |
jardin cour |
Statut |
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Localisation
Adresse: Nouvelle-Aquitaine , Vienne , Poitiers , 116 avenue de la Libération
Milieu d'implantation: en ville
Lieu-dit/quartier: Chilvert
Cadastre: 1838 G3 291, 2004 EY 145