Repaire noble de Belcayre, puis château

France > Nouvelle-Aquitaine > Dordogne > Thonac

La mention la plus ancienne de la seigneurie de Belcayre remonte à l'année 1331 et concerne une terre qui en dépend et qui est placée dans sa mouvance : "muo de Hibelna de Belcayre". Mais la première citation précise date de 1361 : "Johannes de Belcayre, eiusdem parochie [parochia de Tonaco]" rend hommage pour sa terre au comte de Périgord, seigneur-châtelain de Montignac, le 15 novembre de cette année-là. Si aucun vestige architectural ne semble pouvoir être daté de cette période, on peut du moins être assuré que l'occupation du lieu, éminemment stratégique, remonte bien au Moyen Âge : ainsi placé à l'intersection de trois anciennes paroisses, Thonac, Saint-Léon et Sergeac, et en surplomb sur la Vézère, le site, certainement fortifié, protégeait et contrôlait le trafic fluvial en même temps qu'il verrouillait l'accès aux paroisses précitées et, au-delà, à la remontée, à Montignac.

Le site n'est pas documenté pour la période de la guerre de Cent Ans. Mais il est fort probable qu'il subit d'importants dommages comme tant d'autres édifices du territoire - des destructions sont attestées aux châteaux voisins de La Salle, de Clérans et de Chaban, à Saint-Léon-sur-Vézère, ou encore des évêques de Périgueux, à Plazac. Cette hypothèse trouve un début de confirmation dans les nombreuses pierres rubéfiées remployées dans la maçonnerie actuelle, qui sont autant de vestiges d'un violent incendie - comme aux châteaux voisins de La Salle, de Clérans, de Chaban ou de Plazac, pour reprendre les exemples précités.

En 1502, un mémoire établi pour le seigneur d’Albret contre la dame de Montrésor, qui décrit le comté du Périgord, indique qu’à "Tonnac, [il] y a de gentishommes, monseigneur de Peyretaillade [Losse], Belcayre, Cazerac [Jean de Casnac ou Cazenac, Cazerac, originaire de Beynac], Jehan Bermon, Antoyne Berm[on] et Ramonet Berm[on] ; chacun a sa metayrie franche et beaux domaines, chacun cinquante livres de rente, monseigneur n'y prend rien." On ignore si "Belcayre" appartient encore à la famille éponyme ou s'il est déjà entre les mains de la famille de Reilhac (ou Reilac, Reillac, Rilhac, Rilac). C'est précisément au cours de cette période, au début du XVIe siècle, qu'est construit le bâtiment principal actuel si l'on en juge par ses critères internes. En septembre 1541, Helène de Reilhac se dit "damoiselle de Belcaire parroisse de Thonac et de la Peyronnies parroisse de St Lyons".

Marié à Françoise de Carbonnières, héritière de Pelvézy, Antoine de Reilhac est seigneur de Lascaux, de Pelvézy et de Belcayre en 1583, mais aussi chevalier de l'ordre du roi et gentilhomme ordinaire de sa chambre. Au printemps 1592, "le sieur de Baynac [Geoffroy de Beynac, baron de Beynac et de Commarque] fît de nuit pétarder la maison de Belcayre-sur-Vézère, où il prind le sieur de Las Caours [Lascaux], maistre de la maison [Antoine de Reilhac] et le mena prisonnier à Baynac." Le seigneur de Beynac laissa une petite garnison à Belcayre, qui ne fut délogée qu'à la fin de l'été par Foucaud d'Aubusson, seigneur de Beauregard. Ces événements suggèrent que le château a subi des destructions ou, du moins, des déprédations importantes. Le 31 décembre 1610, Madeleine de Reilhac, fille de Gaston, écuyer, seigneur de Pelvézy et Belcayre, apporte en dot ce dernier à son mari, Louis de Calvimont, chevalier, seigneur du Cheylard à Rouffignac et de La Fest.

Au milieu du XVIIIe siècle, la seigneurie entre par mariage dans la maison des Cézac (qui ne la revendra qu'à la fin du XIXe siècle) : en 1757, Antoine de Cézac, écuyer, se dit seigneur de Belcayre au droit de son épouse Marguerite de Calvimont. C'est peut-être à eux que l'on doit la construction (ou la reconstruction) d'un corps de logis secondaire, situé à l'ouest, en retour d'équerre du grand corps de logis et en partie adossé à lui, dont les portes et fenêtres, à linteau délardé en arc segmentaire, sont caractéristiques de ce siècle.

Au regard de son étendue et de ses dépendances, le domaine était encore important en 1792, au moment où fut dressé l'inventaire des biens meubles du château et de ses dépendances le 18 mai 1792. Outre le domaine proche, soit la réserve seigneuriale au centre de laquelle se trouve le bâtiment principal, l'ancienne seigneurie comprenait alors :

1° le domaine "de Vauze", semble-t-il lié à une maison du bourg de Thonac ;

2° le domaine du Bonhomme, à Saint-Léon-sur-Vézère ;

3° la métairie du château de Belcayre, également à Saint-Léon ;

4° le domaine de Cramirac, dans le bourg de Sergeac et ses alentours.

Selon Alexis de Gourgues qui écrit en 1895, l'ancien fief est resté entre les mains des Cézac au XIXe siècle mais ceux-ci l'ont ensuite vendu "il y a peu d'années". En 1898, le château est la propriété de "Monsieur Mazel". C'est peut-être à lui que l'on doit les dernières plus importantes transformations du château, peu après 1905. Presque en ruine, le château est en effet relevé, notamment par la restauration des parties hautes : le chemin de ronde du bâtiment principal est partiellement rétabli par un parapet formant garde-corps, là où ne subsistaient que les vieilles consoles ; la tour d'escalier retrouve elle aussi son chemin de ronde ; les toits sont entièrement refaits, couverts d'ardoises et dotés de lucarnes et d'épis de faîtage. En outre, les fenêtres sont retouchées, certaines agrandies ou percées à ce moment ; une tourelle de plan rectangulaire portée par trois consoles est créée contre l'élévation nord du bâtiment principal, tandis que les anciennes logettes (cabinet et latrines) en encorbellement sur consoles ou corps de moulures de la même élévation sont détruites, remplacées par des fenêtres. Les travaux concernent aussi les abords : des balustrades sont recréées autour des différentes terrasses, la cour est régularisée et un grand pavillon d'entrée est érigé à l'ouest, flanqué par deux ailes de dépendances régulières. Enfin, de nouvelles dépendances (chais et cuvier) sont bâties un peu à l'écart, à l'ouest, en bordure du chemin d'accès au château.

Périodes

Principale : 13e siècle, 14e siècle (incertitude) (détruit)

Principale : 1er quart 16e siècle

Secondaire : 2e moitié 18e siècle

Principale : 1er quart 20e siècle

Belcayre est situé sur la rive droite de la Vézère, aux confins des communes de Thonac et de Saint-Léon. Isolé sur un éperon rocheux culminant à 80 m d'altitude, soit à près de 20 mètres au-dessus du niveau de la Vézère, le bâtiment principal, orienté est-ouest, de plan trapézoïdal (environ 20 m de long sur 8,5 m au plus large, à l'ouest, et 6,8 m au plus étroit, à l'est), se dresse de façon à barrer la pointe de l'éperon ; celle-ci, laissée libre, forme une terrasse semi-naturelle offrant un panorama sur le paysage alentour. Le grand corps de logis comprend un rez-de-chaussée, un étage carré et un niveau en surcroît et en retraite bordé par un parapet formant garde-corps porté par des consoles à triple corbeau. Un haut toit à forte pente couvert d'ardoises le surmonte. Un escalier en vis, logé dans une grosse tour circulaire hors-œuvre adossée au sud, dessert tous les niveaux. Une tourelle de plan rectangulaire, portée par trois consoles, est adossée contre l'élévation nord.

Un corps de logis secondaire, de plan rectangulaire (environ 10 x 5,8 m), orienté nord-sud, est situé à l'ouest, en retour d'équerre du grand corps de logis et en partie adossé à lui ; il présente des portes et fenêtres à linteau délardé en arc segmentaire.

La cour, régulière à l'ouest, est défendue de ce côté par un grand corps d'entrée rectangulaire haut de deux niveaux, flanqué par deux ailes de dépendances plus basses de chaque côté. Les trois corps sont eux-aussi couverts par des toits à longs pans à croupes protégés d'ardoises. Une bretèche en encorbellement est placée au-dessus du portail d'entrée en plein-cintre qui ouvre le pavillon au centre. La clef de celui-ci est surmontée d'un cartouche scutiforme portant des armoiries et couronné d'un phylactère portant une devise latine.

Enfin, d'autres dépendances complètent l'ensemble, à l'extérieur de la cour, au nord et à l'ouest : un pigeonnier de plan circulaire se dresse à la pointe d'un autre éperon rocheux, au nord du bâtiment principal ; un chai et un cuvier sont bâtis un peu à l'écart, à l'ouest, en bordure du chemin d'accès au château et près d'un petit puits circulaire.

Tous les bâtiments, dépendances comprises, sont construits en moellon pour les murs et en pierre de taille pour les parties vives (angles, cadre des portes et des fenêtres, corniche, etc.).

Murs
  1. Matériau du gros oeuvre : calcaire

    Mise en oeuvre : pierre de taille

  2. Mise en oeuvre : moellon

    Revêtement : enduit partiel

Toits
  1. ardoise
Étages

rez-de-chaussée, 1 étage carré

Couvertures
  1. Forme de la couverture : toit à longs pans

    Partie de toit : croupe

Décors/Technique
  1. sculpture
Décors/Représentation
  1. Representations : écu


Précision sur la représentation :

L'écu est meublé d'une ruche accompagnée de trois abeilles, deux en chef et une en pointe. Ces meubles héraldiques correspondent aux armes de la famille d'Abeille, originaire de Provence et éteinte en 1755 : D'azur à la ruche d'or accompagnée de trois abeilles du même, deux en chef, une en pointe (LA CHESNAYE DES BOIS François-Alexandre Aubert de. Dictionnaire de la noblesse, Tome I, 1863, col. 12-13). Il est surmonté par un phylactère portant une devise latine.

Localisation

Adresse: Nouvelle-Aquitaine , Dordogne , Thonac

Milieu d'implantation: isolé

Lieu-dit/quartier: Belcayre

Cadastre: 1813 C 384 et 385, 2011 OC 270 et 271

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