Château d'Agassac

France > Nouvelle-Aquitaine > Gironde > Ludon-Médoc

Un premier château à motte a pu servir de lieu de défense en aval de Bordeaux dès les 11e ou 12e siècle. Lors de son passage sur le site en 1862, l'archéologue Léo Drouyn relève des traces d'un premier et d'un second fossé entourant une basse-cour. Cependant, le nom de la famille éponyme d'Agassac n'apparaît pas avant 1204. Le château, vraisemblablement en bois, est qualifié de "motta" dans un acte du 13e siècle. Sa plateforme circulaire et ses douves sont similaires à celles, voisines, de Cantemerle ou de Blanquefort.

Sous l'administration anglaise de l'Aquitaine, les seigneurs d'Agassac font partie de l'élite de confiance des Plantagenêts puis des Lancastre. Vers la fin du 13e siècle, Gaillard d'Agassac possède la haute charge de sénéchal de Saintonge et converse, à ce titre, avec Jean de Bretagne comte de Richemond, oncle du roi Édouard Ier d'Angleterre, au moment des succès français en Guyenne. Il est nommé par Édouard II, en mai 1309, châtelain de La Réole suite à l'échange du château de Blanquefort -dont Agassac dépend- ; il meurt en charge en 1312.

Vers 1340 apparaît dans les textes un P. d'Agassac, damoiseau, puis de nouveau un nommé Gaillard. En 1357 (a.s.), ce dernier vend Agassac à Arnaud d'Albret, seigneur de Cubzac pour 8 000 écus d'or (Marguerite de Gironde en fait son héritier universel en 1352 puis Pierre de Galard, seigneur de Limeuil en 1357). La maison d'Albret possède le château tout au long du 14e siècle. Cette période pourrait correspondre à la construction d'un nouveau château de pierre. De cette campagne est issu le plan quadrangulaire, cantonné aux angles de ses tours circulaires dont les archères cruciformes à étrier plaident en faveur d'une datation du milieu du 14e siècle. Devaient s'ajouter un chemin de ronde sur la courtine (porte extérieure dans l'angle de la tour nord-ouest) dont les vestiges son visibles au niveau des tours nord ainsi qu'un logis d'au moins deux niveaux : des accès en arc brisé sont ménagés dans chaque tour dès les premier et deuxième étages.

Avant 1377, un document mentionne les nombreuses terres des Albret sous domination anglaise dont le "chastel" d'Agassac fait partie.

Après cette date, la seigneurie passe par alliance dans la maison de Montferrand. En 1417, Bérard de Montferrand est dit seigneur d'Agassac puis de nouveau en 1433 où un procès concernant le domaine est intenté par Gaston de Foix. Bérard est confirmé dans ses prétentions puis élevé, en 1437, par lettre patente d'Henri VI, capitaine de Marmande avec un revenu pour entretenir 6 hommes d'armes. En 1438, il est dit conseiller du roi, ancien chambellan du duc de Bedford, "seigneur de Gassat et Acquigny", lors de la montre du château de La Roche-Guyon (95).

Après la guerre de Cent Ans, Charles d'Albret traite avec Bérard de Montferrand et lui cède "à perpétuel" les seigneuries d'Agassac (1455), ce qui impliquait un usufruit sur le domaine depuis plus de trois générations (?). En 1474, Gaston de Montferrand rend hommage pour Agassac.

Un changement de main est opéré puisque dans un acte en date de 1487, "noble homme Jehan de Sault" est dit seigneur d'Agassac et mari de Trenquina de Bedat. C'est sans doute quelques années plus tard que le second logis est construit, avec des pignons aigus à retour et des croisées à chanfrein droit. A cette campagne, appartiennent probablement la construction de la chapelle avec ouvertures trilobées et une porte à linteau à coussinets donnant sur une ancienne bretèche (?).

Si l'on peut associer le remploi des armoiries inséré dans le mur nord (représentant un écu soutenu par des anges, une salamandre et des fleurs de lys) à une campagne de construction sous François Ier, l'origine de cet élément sculpté n'est pas connue (peut-être au-dessus de la porte d'entrée comme l'affirme Léo Drouyn). Une reconstruction du premier logis à cette époque peut être envisagée, notamment au vu du décor de l'appui de la croisée de l'étage de la grande salle. D'autre part, les éléments décoratifs des encadrements, moulures à listels, bases buticulaires, se retrouvent sur les deux niveaux de ce premier logis. Les frères Jean et Martin Dussaud semblent être co-seigneurs d'Agassac comme le sous-entend un livre de compte. Ils occupent des hautes fonctions au sein de l'élite noble et bourgeoise bordelaise, l'un est dit "sous maire" de la ville en 1517, l'autre "contrerolle" en 1521.

En 1540, Agassac change à nouveau de main mais semble toujours divisé : François de Fronsac rend hommage au roi pour "la moitié de la terre et seigneurie de Gassac au pays de Médoc". Fronsac hériterait grâce à sa femme Marie de la Chassaigne, veuve de Martin Du Sault, seigneur d'Agassac, après un contrat de 1551. Dans les années 1580, Louis de Genouilhac est dit seigneur d'Agassac et cumule les seigneuries médocaines : Bessan, Lafite, Uch et la maison noble de Vailhac à Berson. En 1611, il est qualifié de conseiller d'État et capitaine de 50 hommes d'armes, chevalier de l'ordre du Saint-Esprit.

Au début du 17e siècle, le domaine passe à la famille de Pomiès ou Pomiers. En 1627, Joseph de Pomiès, conseiller au Parlement, est seigneur et baron d'Agassac. L'érection en baronnie n'est pas connue mais s'avère une pratique courante sous Louis XIII en remerciement de la fidélité de ses gentilshommes.

Une nouvelle campagne intervient sous l'ère de Pomiès au 18e siècle : aménagements des pièces de l'étage (cheminées), nouvelle tour ou cage d'escalier quadrangulaire -maladroitement construite avec le remploi des marches d'une ancienne vis. C'est à cette époque que sont probablement aménagés les abords (parc, viviers) comme le montre un plan de la seconde moitié du 18e siècle.

Après la Révolution, Agassac passe par alliance à la famille Castérat puis Richier (1841). La gravure de Gustave de Galard (1835) renseigne sur l'état avant travaux ; travaux opérés par Marcel Richier avant 1865 et conformes goût néo-médiéval prisé à cette époque : arasement des deux tours nord ; rehaussement puis construction de mâchicoulis ; remaniement de plusieurs baies ; aménagements intérieurs des pièces du rez-de-chaussée.

En 1888, la famille de Floris acquiert le domaine et y réalise quelques constructions : écuries, logements, remaniement du grand chai.

Dans les années 1970, la famille Gasqueton opère des destructions : le bâtiment bas de la façade est (qualifié de cuisine par Drouyn) est abattu ainsi que la plupart des dépendances devant le château : grange, écurie, dont une accolée au pigeonnier (visible sur le cadastre de 1843).

En 1996, la société d'assurances Groupama rachète Agassac, restaure le cuvier (1997), le grand chai à barriques (1999) puis entreprend la construction des bâtiments administratifs et de stockage (2002). En 2000, les intérieurs du château sont rénovés, peu après le pigeonnier est transformé en salle de dégustation.

Le château est protégé en totalité au titre des Monuments Historiques depuis le 19 septembre 2013.

Périodes

Principale : 14e siècle

Principale : 2e moitié 15e siècle

Principale : 1ère moitié 16e siècle

Principale : 18e siècle

Principale : 4e quart 19e siècle

Le château d'Agassac est situé au sud de la commune, isolé entre des zones d'habitation à l'ouest, des vignes au nord, des zones de marécages à l'est qui s'étendent jusqu'à la Garonne et un grand parc au sud parcouru d'allées. Le domaine est composé de l'ancien château, de son pigeonnier, de son chai-cuvier ainsi que de nouvelles constructions techniques et administratives à l'ouest. Un vivier en L, alimenté par un fossé à l'ouest et une succession de bassins, inonde les douves recouvertes de parement et interrompues par un pont dormant à deux arches donnant accès à la plateforme de la bâtisse. Dans le parc un pan de mur en arc de cercle à parement de galets, percé de trois jours semi-circulaires, constituait peut-être un élément d'agrément.

Le château est une construction quadrangulaire avec tour circulaire à chaque angle ; les corps de logis sont élevés sur un rez-de-chaussée et un étage, le troisième niveau étant réservé à l'étage de comble.

LES TOURS

- Les deux tours nord sont construites en moyen puis grand appareil régulier du bas vers le haut ; elles sont percées d'archères cruciformes à étrier et surmontées d'un mâchicoulis, le tout coiffé d'un toit en poivrière ardoisé.

- La tour sud-est est construite sur un niveau de fondation visible ; sur les deux faces, des consoles à ressaut offrent l'assise nécessaire pour supporter la chapelle de plan pentagonal du premier étage. S'élevant sur deux niveaux, cette dernière est percée de deux baies trilobées (dont l'une surmontée de deux corbeaux, probables vestiges d'un ancien hourd), d'un oculus et de plusieurs fenêtres verticales, le tout couvert d'ardoise.

- La tour sud-ouest est édifiée sur un lit de fondation découvert, similaire à la tour de la chapelle. Elle est percée d'archères cruciformes à étrier et couverte d'un toit polygonal en ardoise.

LES CORPS DE LOGIS

Le château est composé de plusieurs parties, dont deux corps de logis principaux.

- Le premier corps de logis occupe la partie nord du château et englobe également la tour d'escalier. Il est ouvert au rez-de-chaussée par la porte d'entrée, cintrée, donnant accès au vestibule, puis d'une croisée (sans meneau ni traverse) éclairant la grande salle. À l'intérieur, le vestibule mène à la tour d'escalier rejetée dans l'angle sud-est, et dessert la grande salle. Cette dernière est ouverte par une porte retaillée en partie dans une ancienne ouverture à moulures à listels (se recoupant par le haut) et d'une base prismatique précédant une porte à linteau en accolade donnant sur l'escalier. La pièce est agrémentée d'une cheminée à claveaux à crossettes et piédroits à base prismatique. Une trappe proche du mur sud laisse un accès à la cave. Les angles nord-ouest et nord-est donnent dans la partie basse des tours.

L'étage est composé d'une salle haute dont la porte d'accès est à moulures à listel (se recoupant par le haut) et base prismatique. La pièce est éclairée par une demi-croisée et une croisée à appui sculpté ; une porte à moulures à listel ouvre sur un couloir (petit bureau) percé de deux demi-croisées donnant accès au premier étage de la tour nord-est.

L'étage de comble couvre la partie "salles" et se compose d'une salle sous charpente à chevrons formant-ferme -dont plusieurs sont numérotés au réglet-, quelques marches descendent vers la partie haute de la tour nord-ouest ouverte par un arc brisé. La cage d'escalier est surmontée d'une salle couverte en charpente à chevrons formant-ferme et sous-faîtage, l'ensemble des pièces sont chevillées ou à tenon et mortaise.

Le dernier étage de la tour nord-est, ouverte également par un double arc brisé, donne sur le toit d'un local technique.

La tour d'escalier est quadrangulaire, les marches provenant d'une ancienne vis (?), sont insérées maladroitement dans un mur-noyau allongé qui s'appuie lui-même sur la première marche.

- Le second corps de logis, orienté est-ouest, occupe la partie sud du château. Il possède deux pignons aigus à retour. Dans la façade nord, la porte d'entrée est surmontée de larges pierres horizontales et une verticale évoquant une fente de flèche.

En sous-sol se trouve la cave, dont les maçonneries correspondent à l'emprise supérieure ainsi que les pierres de départ d'une ancienne voûte.

Au rez-de-chaussée, deux salles occupent l'espace ; chacune est percée de deux croisées (dont deux transformées en portes-fenêtres). La première salle, lambrissée, porte un décor néogothique ; la cheminée est composée de cariatides ainsi que deux panneaux aux motifs Renaissance insérés dans les trumeaux de la hotte. La seconde salle est entièrement lambrissée et décorée de plusieurs tapisseries aux thèmes champêtres.

À l'étage, une salle unique occupe l'espace, composée de deux cheminées de style Louis XV dans le mur sud. Une porte murée est masquée en partie par l'escalier. On accède à la tour sud-ouest ainsi qu'au premier étage de la chapelle ouverte par une porte murée à coussinets.

L'étage de comble est éclairé d'une petite baie et d'une croisée, l'ensemble est couvert d'une charpente à chevrons formant-ferme. On accède aux derniers étages de la tour sud-ouest et de la chapelle ; cette dernière est couvert par une charpente à demi-croupe, le tout posé sur une maçonnerie haute.

Les souches de cheminée sont, pour certaines, accompagnées de tirants métalliques ; l'un de ces tirants prend la forme de la lettre F, sur la façade ouest.

Murs
  1. Matériau du gros oeuvre : calcaire

    Mise en oeuvre : pierre de taille

  2. Mise en oeuvre : moellon

    Revêtement : enduit

Toits
  1. ardoise
Étages

sous-sol, 1 étage carré, étage de comble

Couvrements
  1. charpente en bois apparente
Couvertures
  1. Forme de la couverture : toit à longs pans

    Partie de toit : pignon découvert

  2. Forme de la couverture : toit en pavillon

  3. Forme de la couverture : toit conique

Escaliers
  1. Emplacement : escalier dans-oeuvre

    Forme : escalier tournant à retours sans jour

    Structure : en maçonnerie

Décors/Technique
  1. sculpture
Décors/Représentation
  1. Representations : armoiries


Précision sur la représentation :

Les motifs de rinceaux de vigne ainsi qu'une salamandre ornent l'appui de fenêtre à l'étage de la grande salle du premier logis.

Un cartouche composé de deux anges tenant un écu, avec salamandre et fleur de lys, a été inséré dans la maçonnerie de la façade nord, à droite de la porte d'entrée.

Localisation

Adresse: Nouvelle-Aquitaine , Gironde , Ludon-Médoc

Milieu d'implantation: isolé

Lieu-dit/quartier: Agassac

Cadastre: 1843 D2 719, 2013 AR 19

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