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Eglise dite chapelle Saint Gilles ou chapelle des Forges
France > Nouvelle-Aquitaine > Creuse > Fresselines
Historique
Le village des Forges se situe près d'un axe ancien très emprunté depuis les premiers siècles du Moyen Age. Vers 1080, Gaucher, qui devint plus tard ermite puis fut consacré Père abbé de l'abbaye Saint Gilles d'Aureil, décida d'édifier le long de cet itinéraire plusieurs lieux placés sous le vocable de son saint patron, saint Gilles. Vers 1140, un nommé Géraud La Suriz fit une donation aux chanoines réguliers d´Aureil, à l´occasion de l´entrée dans cette communauté de ses deux fils, Ga (peut-être Gaufridus, Geoffroy ?) Sarrasi et Umbert lo Tort. Une part de ce don se composait d´une terre appelée Les Forges (Las Forgas), afin que lesdits chanoines y aient en seigneuries (in dominio) l´église, les maisons et le jardin (ecclesian domos et ortum), ainsi que des parcelles de terre à cultiver ou à planter. L´objet de cette donation n´est pas précisément localisé et l´éditeur du cartulaire a proposé la commune de Fresselines où l´on trouve encore de nos jours un village des Forges. On peut pourtant observer que la même donation comportait un autre bien, appelé lo Froi de grant Sagna, que de Senneville identifie avec des landes et terrains incultes proches de la forêt de Grandsaigne. Ce lieu-dit subsiste sur la commune de Bonnat, entouré de lambeaux de forêt. En lisière de l'un de ces bois se trouve précisément un autre village des Forges, aujourd´hui sur la commune de Chéniers, à une quinzaine de kilomètres au sud-est de Fresselines, mais où la tradition n´a pas gardé trace d´une église. La localisation en Fresselines, admise également par dom Becquet lors de son réexamen du chartrier d´Aureil, ne semble donc pas devoir être remise en cause. Un autre acte des archives d´Aureil, daté de 1184, nous apprend, d´ailleurs, que la propriété d´un village appelé Les Forges était contestée aux chanoines par les moines cisterciens de l´abbaye d´Aubepierre, fondée en 1149 sur le territoire de l´actuelle commune de Méasnes à environ sept kilomètres à l´est de Fresselines. Selon Michel Aubrun, c´est le groupe de chanoines du prieuré de Chambon-Sainte-Croix, dépendance d´Aureil, qui exploitait les lieux. La contestation portait sur la terre, ou les terres, des Forges (de Forgis), la borderie de Fongaudo, et le pont de Puy-Landon (de Poilando). L´acte précise aussi que le territoire des Forges est séparé par un fossé de celui de la grange (cistercienne) de Lavaud-Vieille (Vallis veteris). Hormis celui de Fongaudo, qui semble disparu, tous ces noms de lieux nous conduisent bien dans le village des Forges de Fresselines, et dans ses alentours immédiats. Ce village comportait alors une chapelle, dotée d´un prieur. On ignore sur quels titres, sinon celui des années 1140 pour Aureil, les deux communautés pouvaient fonder leurs droits respectifs. Mais leur opposition fut extrêmement violente puisqu´elle aboutit à mort d´hommes (interfectione conversorum), et cela pour un simple plaix (plasium, terrain enclos de haies). L´initiative des voies de fait semble revenir aux chanoines : les moines ont subi une invasion (invasione monachoru), et ce sont des convers qui furent tués. Un partage intervint donc, sous l´autorité de l´archevêque de Bourges. Plus précisément que ce que dit l´abbé Nadaud, la chapelle resta d´abord la propriété du monastère d´Aureil, ainsi que les bâtiments et terrains correspondant à l´exploitation : la maison du chanoine avec sa cour, l´ouche et la clôture, et huit maisonnettes affectées, chacune, d´une éminée de terre à usage de jardin (Terra de Forgis (...) dividetur inter fratres Albe-petre et canonicos Aurelii, excepto quod capella et domus canonici cum curte, et olchia et agia et octo domuncule, (...) erunt proprie canonicorum). Apparemment, la compétence des moines dans l´exploitation du secteur fut la plus efficace, puisque vingt-cinq ans après, en 1210, les chanoines finirent par leur céder tous ces biens, y compris la chapelle, ainsi que les droits afférents, contre un cens annuel de 50 sous. Les diverses chapelles réparties sur le domaine de l´abbaye, dont celle des Forges, permettaient aux convers de réciter leur office et d´assister à la messe. La chapelle n´apparaît nulle part dans les archives sous sa dédicace à saint Gilles, indiquée par Nadaud. Christian Roth, qui a étudié le culte de ce saint dans les diocèse de Bourges et de Limoges, signale que Gaucher, futur ermite qui fut à l´origine de la communauté d´Aureil, accomplit, dans sa jeunesse, le pèlerinage fameux à Saint-Gilles [du-Gard], et qu´on peut avec vraisemblance lui attribuer cette invocation, sous laquelle était placé un autre prieuré dépendant d´Aureil, celui du Breuil à Eyjeaux (Haute-Vienne). Dans ce cas, Gaucher, qui est mort en 1140, pourrait avoir procédé à une nouvelle dédicace de l´église des Forges lors de la donation. En 1790, des reliques de saint Gilles étaient conservées dans l´église de l´abbaye d´Aubepierre. En 1702, l´état du diocèse dressé par Gilles Le Duc mentionne une chapelle domestique au village des Forges, sans autre commentaire. C´est sous la qualification de chapelle rurale qu´elle apparaît dans la fiche d´enquête de 1780, où elle est considérée comme decente. Si le bâtiment a bien été interdit en 1630 faute d'entretien, il faut conclure qu´il a rapidement été réparé, puisque le décor peint du lambris de couvrement porte la date de 1631. Louis Lacrocq a daté la chapelle du 15e siècle. Cette dernière a été largement reconstruite en 1631 et renforcée postérieurement par des contreforts dont la maçonnerie n´est pas liée à celle des murs. En 1787, la cloche de la chapelle a été bénie par le curé de Fresselines, Jean Binet, sous le parrainage de Michel de la Roche, seigneur de l´Age-Champroy, dit sieur des Forges, et son épouse Rose Camard. Cet indice rend plausible l´hypothèse de la réaffectation de l´édifice en chapelle seigneuriale, ce qui expliquerait aussi que la chapelle ne soit pas mentionnée parmi les biens ecclésiastiques situés dans la paroisse, lors des inventaires de 1790. C´est peut-être à l´occasion des séquestres révolutionnaires que l´édifice est devenu bien de section, propriété des habitants du village des Forges. Les documents consultés n´en gardent pas la trace. Les deux petits vitraux des fenêtres sud sont datés de 1904 et témoignent de travaux de restauration à cette époque. Ils portent la signature des verriers Jean-Prosper Florence et Louis Heinrich, installés à Tours et qui furent associés entre 1897 et 1904. Certaines lattes du lambris, déplacées ou remplacées, montrent que celui-ci a été repris à une époque non précisée. En 1980, le mauvais état de la couverture et de la maçonnerie avait attiré l´attention de l´Architecte des Bâtiments de France. La première a été refaite alors, tandis que le mur sud était déposé et reconstruit. Ces travaux ont été réalisés à la demande des habitants propriétaires et de l´association culturelle Roche Colombe, dirigée par la communauté des soeurs de Rillé d´Ajain, qui assure la desserte religieuse de la chapelle. Dans son article de 1978, Christian Roth signalait l´existence d´un tableau très détérioré, seule représentation peinte de saint Gilles dans le diocèse de Limoges. Ce tableau n´est plus conservé dans la chapelle. Suite à l´inscription de l´édifice par arrêté du 13 février 2004, des travaux d´urgence (maçonnerie) ont été effectués et le clocher a été restauré. Une importante dégradation avait en effet été constatée au niveau du mur gouttereau nord de l'édifice. Le transfert de la propriété à la commune a été enregistré aux hypothèques le 25 février de la même année.
Détail de l'historique
Description
La chapelle est située à l´écart du village des Forges, sur sa bordure extérieure nord-ouest, dans le coude que fait la route appelée Ceinture des Forges et qui dessert cet important hameau. Son environnement est constitué de prairies, certaines encloses de haies d´épineux, plantées de chênes. Deux groupes d´anciennes habitations à dépendances agricoles l´encadrent à l´est et au nord-est. Edifice orienté, la chapelle Saint Gilles est de plan approximativement rectangulaire, de dimensions moyennes hors tout de 12,50 m de long par 6,50 m de large, avec 4,70 m à l´intérieur, d´où 72 à 90 cm d´épaisseur pour les murs latéraux. La dallage intérieur, partiellement revêtu de tomettes, est légèrement plus bas que le terrain extérieur dans l´angle nord-ouest, et supérieur à la première pierre de taille de l´angle sud-est, qui se trouve elle-même actuellement surélevée de l´environnement par un blocage très sommaire de pierres longues, contre les fondations. Ce décaissement de l´environnement sud et est doit être contemporain de la mise en place de deux paires de contreforts destinés à arrêter la progression des dévers des murs est et sud. Cette consolidation a été fondée sur un sous-sol jugé plus compact et l´évacuation des terres correspondrait certainement à un souci d´assainir. Le gros-oeuvre est en maçonnerie de moellon de gneiss et micaschistes, ces derniers sous forme de petits blocs allongés de structure feuilletée. Les façades ont été recouvertes d´un crépi dont il subsiste des fragments surtout à l´est et au nord. Les chaînes d´angle et les encadrements de baies sont en pierre de taille de granite gris ou beige. Des témoins sont visibles sur diverses fissures. Un bardage en ardoise couvre le fût de plan carré du clocher. La construction a été faite sur un terrain légèrement dénivelé du nord au sud, ce qui a nécessité la réalisation, au sud, d´un escalier, dont l´axe est parallèle au gouttereau, et qui donne accès à la porte d´entrée, percée au tiers ouest de la façade. Les marches de cet escalier, en dalles de micaschiste, reposent sur un soubassement maçonné. La base des murs sud et est présente un léger talus, correspondant à une dizaine d´assises. La façade sud est rythmée par deux contreforts en blocs de micaschistes, montant jusqu´à l´égout du toit, avec un ressaut au niveau du seuil de la porte d´accès et un talus de couronnement prononcé. Ils délimitent trois pans de murs d´inégale longueur. L´escalier est appuyé au contrefort ouest. En haut de cet escalier, la porte d´entrée est couverte d´un linteau droit qui paraît moderne. L´arête inférieure de celui-ci est adoucie d´un cavet orné d´une encoche triangulaire centrale qui forme pointe d´accolade. Le cavet se prolonge sur deux corbeaux et les piédroits. La saillie des pierres d´encadrement par rapport au nu du mur témoigne d´une reprise récente de la maçonnerie à cet endroit. A droite de cette porte, se voit une petite fenêtre dont l´arc monolithe en plein cintre est orné de trois cabochons triangulaires, et dont l´encadrement montre aussi des traces de remontage. Dans le tiers oriental de la façade, une autre petite fenêtre de mêmes proportions, à simple arc monolithe en plein cintre. Sous l´égout du toit apparaît une sorte de sablière en béton. Le chevet plat est encadré par deux contreforts obliques très saillants, aussi en blocs de micaschiste, dont le talus terminal est souligné par un larmier. L´étroite fenêtre centrale présente un encadrement assez largement ébrasé. Elle est couverte d´un arc monolithe en tiers-point, dont l´intrados est découpé d´un ovale central évoquant sommairement un réseau trilobé. Le mur gouttereau nord est aveugle. La sablière est neuve. La façade ouest forme un pignon couronné d´un clocheton en charpente, couvert d´ardoise, dont le massif, de plan carré, est terminé par des jours jumelés sur chaque face et surmonté d´une courte flèche à huit pans. Les versants du pignon sont formés d´une ruellée. Cette façade est percée d´un petit oculus ovale central, formé de deux pierres échancrées. Son côté nord est occupé par un escalier droit maçonné, perpendiculaire, d´une douzaine de marches bordées par deux murets, et qui accède à une porte percée sous le versant nord du toit. Celle-ci est couverte d´un arc à peu près en plein cintre, dont l´arête, comme celle des piédroits, est adoucie en chanfrein. A l´intérieur, le volume unique est couvert d´une charpente lambrissée. Elle se compose de deux fermes à entrait et poinçon de section octogonale, bagués d´un tore aux extrémités et aux bossages. L´entrait oriental a été renforcé par une semelle à son extrémité sud. Le lambris est en plein cintre. Les murs sont enduits d´un crépi, sans doute à base de chaux, laissant voir les pierres des encadrements de baies. Le sol est formé de dalles de schiste gris près de la porte d´entrée, de tommettes carrées dans la majeure partie du bâtiment, de terre battue le long du mur ouest. Le choeur est matérialisé par une sorte de petit podium en tommettes neuves, fermé par une clôture de communion à balustres tournés en colonnettes. Cette balustrade est ancrée dans les deux gouttereaux par un poteau sculpté. L´autel est un massif de maçonnerie crépi, couvert d´une dalle de granite. De part et d´autre, une petite niche carrée a été ménagée dans les murs gouttereaux. Contre le mur ouest se trouve une tribune que supportent deux poutres. Son garde-corps est une balustrade du même modèle que celle du choeur. Cette tribune n´est accessible que de l´extérieur, par la porte du pignon ouest. Pièces de charpente et balustrades ont été peintes en rouge-rosé. Les deux fenêtres du mur sud sont closes d´un vitrail à décor géométrique. Celle de l´est a conservé son couvrement d´arc en claveaux allongés. Le principal intérêt de cet édifice est le décor de son lambris de couvrement, dont le thème est celui des litanies de la Vierge Marie.
Détail de la description
Murs |
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Toits |
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Plans |
plan rectangulaire régulier |
Couvrements |
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Couvertures |
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Escaliers |
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État de conservation |
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Décors/Représentation |
Précision sur la représentation : Les inscriptions sur la cloche sont : L´an 1787. J´ai été bénite par M. Jean Binets, curé de Fresselines. Parrain, Monsieur Michel de Laroche de L´Age, Sgr des forges, Marraine, Rose Camard de l´Age, son épouse. |
Informations complémentaires
Type de dossier |
Dossier d'oeuvre architecture |
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Référence du dossier |
IA23001639 |
Dossier réalisé par |
Belzic Céline
Chargée de recherche, Conservation du Patrimoine, Conseil départemental de la Creuse, 2008-2010 Boucher Jean-Pierre Pacquot Eglantine Chargée de recherche, Conseil départemental de la Creuse, 2010-2020 |
Cadre d'étude |
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Aire d'étude |
Communauté de communes du Pays Dunois |
Phase |
étudié |
Date d'enquête |
2009 |
Copyrights |
(c) Région Limousin, service de l'Inventaire et du Patrimoine culturel, (c) Département de la Creuse, (c) Monuments historiques |
Citer ce contenu |
Eglise dite chapelle Saint Gilles ou chapelle des Forges, Dossier réalisé par Belzic Céline, (c) Région Limousin, service de l'Inventaire et du Patrimoine culturel, (c) Département de la Creuse, (c) Monuments historiques, https://www.patrimoine-nouvelle-aquitaine.fr/Default/doc/Dossier/11f773cf-238f-4541-8e32-ff0facde5032 |
Titre courant |
Eglise dite chapelle Saint Gilles ou chapelle des Forges |
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Dénomination |
église |
Vocable |
Saint Gilles |
Appellation |
Chapelle Saint Gilles chapelle des Forges |
Statut |
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Protection |
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Localisation
Adresse: Nouvelle-Aquitaine , Creuse , Fresselines
Milieu d'implantation: en écart
Lieu-dit/quartier: les Forges
Cadastre: 1826 C 551, 2008 BM 13