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Historique
La réalisation de l'important décor peint de la nouvelle église Saint-Jacques, étudié en détail par Simone Abbate (2008, p. 120-135), n'est pas explicitement documentée dans les archives de la commune de Tartas, ni, apparemment, dans celles de la fabrique. Cette anomalie s'explique probablement par le caractère privé, sinon de la commande, du moins du paiement des travaux exécutés. Selon l'hypothèse la plus probable, c'est la principale bienfaitrice de l'église, Marie Louise Catherine de Neurisse de Laluque (1781-1874), qui subvint aux dépenses, en tout ou partie, et qui régla au peintre montois Louis-Anselme Longa (1809-1869) le montant de sa facture (C. Lacrouts, p. 21). A noter toutefois que le maire Léonard Desbordes se préoccupait dès septembre 1854, bien avant l'achèvement du chantier de construction, des "sacrifices qui restent à faire soit pour l'ornementation soit pour les autels" de l'édifice et sollicitait dans ce sens l'aide pécuniaire du cardinal-archevêque de Besançon Césaire Mathieu, lié de longue date à la région de Tartas. Il est donc possible que les sources de financement aient été multiples. Quant au choix du peintre, peut-être fut-il favorisé par sa parenté avec l'architecte montois Chalet, qui assistait depuis 1851 Hippolyte Durand dans la conduite du chantier de Saint-Jacques (S. Abbate, p. 122) : le même cas s'était présenté presque au même moment avec la commande d'un Saint Roch pour l'église voisine de Carcen.
En l'absence de documentation précise, la chronologie du chantier de peinture est connue essentiellement par les dates apposées sur les différentes parties du décor. En avril 1856, date de la consécration de l'église, le décor peint est à peine commencé si l'on en croit la presse locale qui se fait l'écho de l'événement. L'Assomption et le Repos de la Sainte Famille dans la chapelle de la Vierge sont datés de cette même année 1856, la Dormition dans la même chapelle et le Saint Martin évêque dans la chapelle sud portent le millésime 1857. Le chemin de croix sur bois, sans doute offert par la famille Dupont, est terminé en 1858. Les scènes évangéliques du registre inférieur du chœur sont achevées en 1865 (Adoration des mages, Jésus parmi les docteurs, Entrée du Christ à Jérusalem) - la date "1864" relevée par S. Abbate au bas de cette dernière scène résulte d'une lecture erronée. Les dernières peintures, sur le mur occidental de la nef, portent la signature du peintre et la date 1867 (Vierge de pitié). Enfin, sous la grande rose de la tribune est peinte l'inscription : "L. A. Longa, Miqueu curé doyen, A. de Giraud maire, 1867", qui paraît clôturer la dernière campagne de travaux.
L'ampleur de la tâche, la plus importante que Longa ait dû mener à bien dans sa carrière de décorateur d'église, a nécessité l'intervention d'au moins un assistant, certainement responsable des éléments purement ornementaux comme le suggère sa signature, apposée sur le bandeau à rinceaux qui borde la scène de Jésus et les enfants, sur le mur sud du chœur. Il s'agit du "peintre-vitrier" local Victor Jean (ou Jean Victor) Laurency (Tartas 1836 - Tartas 1876), issu d'un père peintre d'origine piémontaise, et frère aîné de deux autres peintres, Vital (1840-1884) et Pierre (1842-1907), qui collaborèrent peut-être aussi au décor de Saint-Jacques, les trois hommes paraissant avoir travaillé conjointement dans leur atelier de la rue d'Orope.
Comme pour la plupart des décors religieux de Longa, les scènes historiées sont inspirées, voire strictement copiées, de compositions contemporaines d'origines diverses, connues du peintre par le biais de la gravure. Jean-Pierre Suau (1986) et Simone Abbate après lui (2008) ont souligné tout ce que le décor de Saint-Jacques doit aux peintures d'Hippolyte Flandrin (1809-1864), exact contemporain de Longa, exécutées de 1848 à 1853 à l'église Saint-Vincent-de-Paul à Paris et popularisées par un album in folio de gravures originales publié chez Haro en 1855, dont un exemplaire fut inventorié dans l'atelier du peintre montois en 1870. Les théories de saints du registre supérieur du chœur dérivent ainsi directement du décor parisien. En proviennent aussi les Saint Pierre et Saint Paul du mur occidental de la nef, également reproduits par Longa à Barbotan-les-Bains la même année 1867.
Une autre source de modèles plus importante encore, non identifiée jusqu'à présent, est le célèbre recueil qui fit connaître en France l'œuvre du peintre nazaréen allemand Friedrich Overbeck (1789-1869) : L'Évangile illustré. Quarante compositions de Frédéric Overbeck gravées par les meilleurs artistes de l'Allemagne (A. W. Schulgen, 1851). Sept des scènes de la vie du Christ qui ceinturent le mur du chœur (1865) reproduisent ainsi des lithographies exécutées par les collaborateurs d'Overbeck, en l'occurrence Franz Paul Massau, Bartolomeo Bartoccini, Friedrich August Ludy, Heinrich Nüsser et S. Maier. Ce recueil avait déjà inspiré trois des stations du chemin de croix peint par Longa en 1858, principalement copié d'après un autre artiste allemand, Josef von Führich. Le même ouvrage et une autre publication collationnant des œuvres d'Overbeck, La Compassion de la Très-Sainte Vierge, éditée à Paris par Henri-Léon Curmer en 1844, inspirèrent aussi deux des scènes de la vie de la Vierge qui ornent la chapelle nord du transept. Ces sources furent complétées par des emprunts à une série d'Apôtres d'Overbeck et à diverses compositions de ses disciples nazaréens - Ernst Deger (1809-1885), Edward von Steinle (1810-1886), Franz Ittenbach (1813-1879) et Carl Müller (1818-1893) - connues de Longa via les estampes au burin éditées par la "Société pour la propagation des bonnes gravures religieuses" de Düsseldorf (Verein zur Verbreintung relig. Bilder in Düsseldorf).
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Dès les années 1880, certaines parties du décor de Longa (dans la nef et dans le chœur "près de saint Jacob" [Jacques]) présentaient des dégradations qui nécessitèrent quelques réparations. Un devis du 15 avril 1887, signé du "peintre en décor" tarusate Louis Ponse (1844-?), fut mis en œuvre peu après grâce à un legs de 3.000 francs de Mme Lartigue. L'analyse technique préalable effectuée par Ponse révèle que les peintures de Longa, à l'instar de celles de Flandrin à Saint-Vincent-de-Paul, avaient été exécutées à la cire sur un double enduit de mortier ciment. Au cours du XXe siècle, de nombreuses infiltrations ont mis à mal le décor, principalement dans le chœur et dans la chapelle de la Vierge. En très mauvais état, l'ensemble a été sauvé d'une probable destruction par un plaidoyer éloquent du Professeur François-Georges Pariset (1904-1980), dont un rapport rédigé en 1970 a attiré l'attention sur la qualité et l'exceptionnalité du décor tarusate. Un premier sauvetage partiel, effectué en 1991 par Frédérique Thomas (chapelle de la Vierge) et Jacqueline Caccamo (chapelle des fonts baptismaux), a été suivi, à partir de 1999 et du classement de l'édifice, par une vaste campagne de restauration menée par l'atelier bordelais Dufon sous la direction de l'architecte Stéphane Thouin, qui a rendu à l'œuvre de Longa son éclat originel.
Détail de l'historique
Périodes |
Principale : 3e quart 19e siècle |
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Dates |
1856, porte la date 1857, porte la date 1865, porte la date 1867, porte la date |
Stade de création | copie interprétée de peinture monumentale |
Auteurs |
Auteur :
Longa Louis-Anselme Peintre né à Mont-de-Marsan le 4 avril 1809 et mort dans la même ville le 13 décembre 1869 ; fils cadet de l'orfèvre Jacques Longa (1769-1822) et petit-fils par sa mère de l'orfèvre montois Joseph Lacère (1731-1810) ; frère puiné de l'orfèvre-bijoutier Jean-Baptiste Longa (1797-1861). Élève de Paul Delaroche à l'École des beaux-arts de Paris, puis réinstallé en 1848 à Mont-de-Marsan, où il exerça les fonctions de professeur de dessin au collège, puis au lycée impérial à partir de 1866. Sur les Longa, voir : ABBATE Simone, Louis-Anselme Longa, 2008. Afig : Overbeck Johann Friedrich Peintre né à Lübeck le 3 juillet 1789, mort à Rome le 12 novembre 1869 ; fils de Christian Adolph Overbeck, sénateur-maire de Lübeck, et d'Eleonora Maria Jauch. Élève à partir de 1806 de Heinrich Friedrich Füger à l'Académie des beaux-arts de Vienne, il fonde en 1809, en réaction à l'académisme néoclassique régnant, la Confrérie de saint Luc avec quelques condisciples, s'installe à Rome en 1810 et y réside jusqu'à sa mort. Converti au catholicisme en 1813, il œuvre au renouveau de l'art religieux auprès d'autres artistes romains d'origine allemande, tels Peter von Cornelius, Friedrich Wilhelm von Schadow, Philipp Veit, Julius Schnorr von Carolsfeld ou Joseph von Führich au sein du mouvement dit des Nazaréens, dont il est l'un des membres les plus connus grâce, notamment, à la diffusion de son œuvre par la gravure. Afig : Massau Franz Paul, graveur Afig : Heinemann Joseph, graveur Afig : Bartoccini Bartolomeo Bartolomeo (ou Bartolommeo) Bartoccini, graveur italien né à Pérouse en 1816 et mort dans la même ville en 1882. Il travailla à Rome dans le cercle des artistes de l'école nazaréenne et grava d'après Friedrich Overbeck ainsi que d'après des maîtres anciens (cycle de la Passion du Christ de Duccio di Buoninsegna à la cathédrale de Sienne, dessiné par Franz von Rhoden, 1847). Afig : Ludy Friedrich August, graveur Afig : Maier S., graveur Afig : Flandrin Hippolyte, peintre Afig : Steinle Edward Jakob von Prénom usuel : Edward ou Eduard. Peintre austro-allemand né à Vienne le 2 juillet 1810 et mort à Francfort-sur-le-Main le 19 septembre 1886. Élève de l'École des beaux-arts de Vienne, puis émule à Rome de Friedrich Overbeck, Philipp Veit et Peter von Cornelius ; membre du mouvement nazaréen, auteur de peintures religieuses et de portraits. Afig : Keller Joseph von, graveur Afig : Nüsser Heinrich Graveur né à Düsseldorf en 1821 et mort dans la même ville le 19 juin 1883 ; élève entre 1837 et 1850 de Josef Wintergerst, Rudolf Wiegmann et Joseph von Keller à la Kunstakademie de Düsseldorf. Il travailla pour le Kunstverein für die Rheinlande und Westfalen, association d'artistes et de professeurs basée à Düsseldorf, et grava notamment d'après Friedrich Overbeck et Rudolf Jordan. Afig : Deger Ernst Peintre de l'école nazaréenne, né le 15 avril 1809 à Bockenem (Basse-Saxe) et mort le 27 janvier 1885 à Düsseldorf. Étudiant à l'université des arts de Berlin en 1828, puis l'année suivante à l'académie des beaux-arts de Düsseldorf auprès de Wilhelm von Schadow, il réside de 1837 à 1842 en Italie, avant de rentrer en Allemagne et d'être nommé en 1869 professeur de peinture historique et religieuse à l'académie des beaux-arts de Düsseldorf. Afig : Müller Karl ou Carl Peintre nazaréen, membre de l’École de Düsseldorf, né à Darmstadt le 29 octobre 1818, mort à Bad Neuenahr le 15 août 1893. Fils du peintre de cour Franz Hubert Müller et frère des peintres Andreas et Constantin Müller, avec qui il étudia à l'Académie d'art de Düsseldorf, auprès, notamment, de Friedrich Wilhelm von Schadow. Séjournant à Rome de 1840 à 1842, il y rencontra Peter von Cornelius et Friedrich Overbeck, puis voyagea en Toscane et en Ombrie. De 1844 à 1850, il travailla aux côtés d'Ernst Deger et Franz Ittenbach à l'église Saint-Apollinaire de Remagen, chef-d'oeuvre de l'école de Düsseldorf. Auteur : Laurency Jean Victor Jean Victor Laurency (acte de mariage) ou Lorency (actes de naissance et de décès), "peintre-vitrier" puis "peintre" à Tartas (Landes), né à Tartas le 5 août 1836 et mort dans la même ville le 22 décembre 1876. Fils de Michele Lorenzi, dit Michel Laurency (1798/99-1872), peintre d'origine piémontaise (originaire de Carpignano Sesia, dans la province de Novare), et de Marie Sça ; frère de Vital (Tartas, 11 avril 1840 - Tartas, 28 décembre 1884) et de Pierre Laurency (Tartas, 5 novembre 1842 - Tartas, 8 mai 1907), également peintres-vitriers ; épouse à Tartas, le 21 janvier 1867, Maria Labat (Tartas, 29 décembre 1843 - Tartas, 21 juillet 1906), dont il eut quatre enfants, parmi lesquels le menuisier Michel Alphonse Laurency. Auteur : Ponse Louis, restaurateur (attribution par source) Personnalite : Neurisse de Laluque Marie Louise Catherine de Marie-Louise Catherine de Neurisse de Laluque (Tartas, 22 avril 1781 - Tartas, 26 janvier 1874), dite Mlle de Laluque, dernière des treize enfants de Pierre François Salvat, baron de Laluque, lieutenant-général au sénéchal d'Albret (1730-1798), et de Catherine-Ursule de Chambre d'Urgons (1740-1804), elle-même sœur de l'évêque d'Orope. |
Lieux d'exécution |
lieu d'exécution |
Informations complémentaires
Type de dossier |
Dossier d'oeuvre objet mobilier |
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Référence du dossier |
IM40007983 |
Dossier réalisé par |
Maisonnave Jean-Philippe
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Cadre d'étude |
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Aire d'étude |
Tartas est |
Phase |
étudié |
Date d'enquête |
2019 |
Copyrights |
(c) Région Nouvelle-Aquitaine, Inventaire général du patrimoine culturel |
Citer ce contenu |
Ensemble des peintures murales de l'église, Dossier réalisé par Maisonnave Jean-Philippe, (c) Région Nouvelle-Aquitaine, Inventaire général du patrimoine culturel, https://www.patrimoine-nouvelle-aquitaine.fr/Default/doc/Dossier/684714d5-d67b-45b1-95e4-01c76457fe9c |
Titre courant |
Ensemble des peintures murales de l'église |
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Dénomination |
peinture monumentale |
Statut |
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Protection |
Précision sur la protection : Peintures classées avec l'église. |
Intérêt |
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Localisation
Adresse: Nouvelle-Aquitaine , Landes , Tartas , place Saint-Martin
Milieu d'implantation: en ville