Chapelle du château d'Abbadia

France > Nouvelle-Aquitaine > Pyrénées-Atlantiques > Hendaye

Si la chapelle semble parfaitement intégrer le projet global d’Antoine d’Abbadie, priorité fut initialement donnée à l’édification d’un observatoire astrogéophysique et d’une habitation. Le chantier d’abord confié à l’architecte Clément Parent, dès 1861, puis à Auguste-Joseph Magne, fut finalement repris par le chef de file du mouvement néogothique, Eugène-Emmanuel Viollet-le-Duc, qui s’empara du projet avec efficacité et produisit en quelques semaines plusieurs esquisses correspondant plus précisément à la commande romantique d’Antoine d’Abbadie. Viollet-le-Duc missionna sur la côte basque son fidèle collaborateur, Edmond Duthoit. Un nouveau corps de bâtiment imaginé par Duthoit s’avéra plus en harmonie avec la chapelle et le reste de la demeure.

La phase du gros œuvre s’échelonna de 1864 à 1869, date à laquelle on commença les sculptures d’ornement des façades. La décoration fut, pour sa part, pensée et exécutée entre 1867 et 1874, date à laquelle le couple d’Abbadie aménagea enfin dans l’habitation. Certains détails décoratifs de la chapelle ne furent achevés que quelques années plus tard.

Périodes

Principale : 2e moitié 19e siècle (daté par source)

Auteurs Auteur : Viollet-le-Duc Eugène-Emmanuel

De Viollet-le-Duc, le filtre de la mémoire collective a coutume de se souvenir des emblématiques chantiers de restauration, Notre-Dame de Paris, Carcassonne, Vézelay, Saint-Sernin et autres cathédrales. Or, son œuvre, ne se limitant pas à l'architecture religieuse gothique, s'avère en réalité bien complexe. Parmi ses projets d'architecte et ses publications de théoricien, il s'intéressa particulièrement au thème de l'habitation humaine. Aussi sa vision de l'architecture domestique se manifesta-t-elle diversement du point de vue stylistique, mais avec toujours un fil conducteur fondamental. Celui-ci est incarné par la quête de modernité nationaliste, fondée sur le savoir-faire et l'expérience de ses prédécesseurs.

La théorie

Du point de vue théorique, Viollet-le-Duc considérait, à l'instar de ses confrères, que l'architecture devait s'adapter au besoin de la société, au mode de vie des hommes. Pour cette raison, estimant le principe du château comme obsolète, son idéal d'habitation fut représenté par un hôtel particulier dans ses Entretiens sur l'architecture, publiés entre 1864 et 1872, avant de s'exprimer par la problématique plus démocratisable de la "maison". A partir des années 1870, ce thème fit d'ailleurs l'objet d'un volume de sa série éditoriale destinée initialement aux adolescents, intitulé Histoire d'une maison, où il exposa avec grande pédagogie la vie d'un chantier depuis la conception du plan jusqu'à son exécution.

Traduisant les usages de toute une société, le plan revêt une dimension fondamentale dans sa conception architecturale qui se réclame du rationalisme. Viollet-le-Duc privilégie l'optimisation des espaces et de la circulation ainsi que l'économie du chantier et des déplacements humains. Ses théories érigent l'édifice et son ornementation en un ensemble homogène et un véritable organisme vivant où la présence de chaque élément s'explique par sa fonction, qu'il déduisait de ses observations de l'architecture gothique.

Les chantiers

Mais, s'il s'inspirait de l'esprit et du génie des constructions médiévales, cela n'impliquait pas nécessairement d'en reproduire absolument le style. Il n'est donc pas surprenant que son corpus d’œuvres domestiques se caractérise par sa diversité esthétique. En termes de restauration, Viollet-le-Duc fut missionné par Napoléon III à partir de 1858 sur le chantier colossal du château de Pierrefonds, qui devint un modèle d'architecture et de décoration néogothique, et ce malgré une frontière fluctuante souvent décriée entre restauration et création. Les milliers de dessins et de projets qu'il réalisa pour Pierrefonds inspirèrent ses autres chantiers néogothiques et ceux de ses disciples.

Aussi, les restaurations des châteaux de Roquetaillade, en Gironde, et de Pupetières, en Isère, tout comme celles de la Flachère, dans le Rhône, ou de Montdardier, dans le Gard, s'inscrivent-elles dans les pas du chantier de Pierrefonds. L'architecte réhabilita ces édifices en associant la démarche archéologiste, fondée sur la recherche de vérité historique, et le parti pris créatif, appuyé sur l'hypothèse architecturale. En revanche, dans ces chantiers, comme dans de nombreuses restaurations privées, il confia la décoration à ses collaborateurs, en l'occurrence à Edmond Duthoit pour Roquetaillade et à Denis Darcy pour Pupetières.

Mais "Viollet" sut s'affranchir des édifices gothiques, ce qui le conduisit, après la chute de Napoléon III, à prendre en charge la restauration du château d'Eu, demeure ancestrale de la famille d'Orléans. S'adaptant à la volonté de ses commanditaires, c'est un mélange de styles académiques, essentiellement Louis XV et Louis XVI, qu'il imagina pour cette demeure. D'ailleurs, le domaine de la création ex-nihilo fut plus facilement propice aux libertés esthétiques. Si le château d'Abbadia relève du style néogothique de Pierrefonds et de ses avatars, la maison Sabatier, dite "Le Prieuré", est un exemple manifeste du style néo-Louis XIII. Cette demeure située à quelques encablures de Pierrefonds fut construite selon un plan académique, voire palladien, vraisemblablement dû à l'influence de son commanditaire. La maison Jacquesson, hôtel particulier édifié à Châlons-sur-Marne, témoigne également de cette capacité à bâtir dans un style plus conventionnel.

Quant à la maison individuelle, l'architecte en concrétisa ses idéaux avec la construction de sa résidence personnelle, le chalet La Vedette, bâti à Lausanne, où il s'installa pour se consacrer à la montagne durant les dernières années de sa vie. La Vedette montre bien cette volonté de s'adapter à l'environnement naturel et culturel du chantier, c'est-à-dire aux ressources matérielles, au paysage et à l'architecture traditionnelle.

Enfin, Viollet-le-Duc s'intéressa également à la problématique de l'habitat collectif, impliquant immeubles de rapport ou à loyer. Exposés dans ses Entretiens sur l'architecture, ses principes sur la question furent appliqués dans ses édifications d'immeubles parisiens, dont les plus connus se situent rue de Douai, rue de Liège, rue Chauchat et rue Condorcet. Toujours fondés sur le principe constructif gothique, avec notamment une forte attention portée à la modénature, ces édifices s'éloignent manifestement de l'esthétique médiévale pour épouser davantage celle de leur environnement urbain haussmanien, rendue nécessaire par les codes d'urbanisme. Comme La Vedette, l'immeuble de la rue Condorcet était un projet personnel. Au dernier étage, il y aménagea son cabinet, ce qui explique la présence d'une sculpture de hibou grand duc, ornementant l'un des meneaux et se référant à l'identité de son propriétaire par un jeu d'homonymie bien connu.

Le corpus civil de Viollet-le-Duc n'est pas encore connu en intégralité mais il ne fait aucun doute que son ampleur est considérable. Il ne se limite d'ailleurs pas aux constructions domestiques mais investit également, au moins en théorie, le domaine de l'architecture publique. Quant au style néogothique, viollet-le-ducien et autre, il ne fit pas de vieux os en France à partir du dernier quart du XIXe siècle, hormis quelques citations pittoresques dans les stations de villégiature. Toutefois, l'esprit rationaliste restauré et prôné par l'architecte perdura et fut érigé comme le fondement de la doctrine architecturale moderne voire révolutionnaire de l'Art nouveau.

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Auteur : Duthoit Edmond,
Auteur : Maréchal Charles-Laurent, maître verrier (attribution par source)
Auteur : Chertier Jean-Alexandre

Orfèvre et bronzier d'art à Paris, né à Paris (183, rue Saint-Martin) le 3 décembre 1825 et mort dans la même ville le 27 septembre 1890 ; fils de Charles Gabriel Chertier, marchand épicier, et Marie Madeleine Sophie Wallet ; marié en premières noces, le 30 juin 1855, avec Louise Anaïs Duflos (1836-1886), et en secondes noces, à Boulogne-Billancourt le 17 septembre 1888, avec Noémie Victoire Duval (1838-?), veuve de Gustave Eugène Gresle. D'abord contremaître de la maison Louis Bachelet avant de fonder en 1857 sa propre entreprise au 7, rue Férou (puis rue Mazarine) à Paris. Son poinçon fut insculpé le 14 avril 1857 et biffé le 16 juin 1890 (son successeur Edmond Lesage insculpe le sien le même jour). Il collabora régulièrement avec des architectes célèbres comme Jean-Charles Danjoy, Eugène Viollet-le-Duc, Verdier, Pierre Prosper Chabrol ou Edmond Duthoit. Parmi ses œuvres les plus connues figurent la statue de Notre-Dame d'Aquitaine au sommet de la tour Pey-Berland à Bordeaux (1862), le ciborium du tombeau de saint Martin à Tours (1864) et les portes en cuivre de la cathédrale de Strasbourg (1879). Source : B. Berthod, G. Favier, É. Hardouin-Fugier, Dictionnaire des arts liturgiques du Moyen Âge à nos jours, Lyon, 2015, p. 191-192.

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Auteur : Landaburu Juan, peintre (attribution par travaux historiques)

Pilier fondamental de l’architecture de Viollet-le-Duc, le plan irrégulier d’Abbadia permet de répondre aux besoins liés au mode de vie et aux demandes du commanditaire. Élément d’un plan asymétrique, l’aile Est reçoit le vaisseau rectangulaire et le chevet polygonal de la chapelle. Abandonnant l’espace circulaire et néo-renaissant proposé initialement par Auguste-Joseph Magne, la chapelle présente un plan rectangulaire typiquement gothique. Sur le modèle des chapelles seigneuriales du XIIIe au XVe siècle (inspirées de la Sainte-Chapelle de Paris), Viollet-le-Duc conçoit un vaisseau unique terminé par un chevet à cinq pans. Véritable signature artistique et symbole d’Abbadia, un bestiaire sculpté vient décorer le chœur de la chapelle. À l’intérieur de l’abside, les culots sont ornés d’une faune fantastique constituée d’un basilic, d’un démon, d’un coq, d’un faucon et au milieu de tous ces volatiles, Viollet-le-Duc, lui-même, en tenue médiévale. La charpente de la nef reste partiellement apparente et participe au programme décoratif tout en évitant l’usage supplémentaire de maçonnerie. Du point de vue de la charpenterie, cette chapelle résulte d’un modèle gothique peu fréquent dans les édifices religieux français et susceptible de trouver son inspiration dans le gothique anglais. Hormis les vitraux à entrelacs géométriques de la nef, la chapelle est ornée de trois verrières typiquement néogothiques, représentant saint Thomas d’Aquin, le Christ aux Outrages et saint Augustin d’Hippone. Il semble d’après ses carnets qu'Edmond Duthoit délégua la conception des vitraux de la chapelle au maître-verrier Charles-Laurent Maréchal. Quant au décor de la chapelle, destinée à accueillir tous les dimanches les métayers de d’Abbadie, il mêle les inspirations gothiques et byzantines, avec des références à la cathédrale de Monreale en Sicile ou à Notre-Dame de Paris.

Murs
  1. Matériau du gros oeuvre : pierre

    Mise en oeuvre : pierre de taille

    Revêtement : parement

Toits
Plans

plan allongé

Couvertures
Décors/Technique
  1. sculpture
  2. vitrail
  3. peinture
Décors/Représentation
  1. Representations : faucon

  2. Representations : coq

  3. Representations : animal fantastique

  4. Representations : portrait d'artiste


Précision sur la représentation :

Véritable signature artistique et symbole d’Abbadia, un bestiaire sculpté vient décorer le chœur de la chapelle. À l’intérieur de l’abside, les culots sont ornés d’une faune fantastique constituée d’un basilic, d’un démon, d’un coq, d’un faucon et au milieu de tous ces volatiles, Viollet-le-Duc, lui-même, en tenue médiévale.

Localisation

Adresse: Nouvelle-Aquitaine , Pyrénées-Atlantiques , Hendaye

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