Barrage mobile, barrage éclusé et maison éclusière des Enfreneaux

France > Nouvelle-Aquitaine > Charente-Maritime > Marans

Un premier barrage dans les années 1840

Situé au sud de la ferme ou cabane des Enfreneaux, le site reste vierge de construction jusque dans les années 1840. Dès 1809, lors de la réunion organisée par les autorités locales pour la mise en application du décret impérial du 29 mai 1808 sur l'amélioration du cours de la Sèvre Niortaise, l'un des sujets abordés est la rivière du Moulin du Marais qui, jusqu'alors, débouche dans le port de Marans dont l'aménagement en bassin est étudié. Il est question de reporter cette embouchure vers l'ouest, en aval du port. Cette idée ne trouve pourtant pas d'application avant les années 1840, malgré les demandes réitérées des autorités et populations en amont pour utiliser la rivière du Moulin des Marais comme déversoir des crues en hiver et réservoir d'eau douce en été.

L'idée est relancée en 1842 par les Ponts et chaussées, sous la direction de l'ingénieur Dor, et parallèlement à la réflexion menée sur le creusement du canal de Marans à la mer par le Brault. Décision est prise de creuser un nouveau canal servant de lit à la rivière du Moulin des Marais et rejoignant le cours principal de la Sèvre au sud de la ferme des Enfreneaux, en aval du port. Un barrage à sept pertuis inégaux sera construit à l'embouchure du nouveau canal ; un autre barrage prendra place à la tête de la rivière (dans les marais de la Proullière), pour créer un effet de chasse. Après modification du projet en 1843, les travaux sont adjugés le 24 avril 1844 à Jean André Geneys, entrepreneur à Marans. Ils vont durer jusqu'en 1848. L'ancien lit de la rivière, qui se jetait dans le port, est comblé (il sera rouvert en 1868 sous le nom de canal de chasse) ; le barrage qui se situait à sa tête depuis 1825, est supprimé (il sera rétabli au débouché dans le nouveau bassin du port).

Le nouveau barrage d'embouchure de la rivière, aux Enfreneaux, est constaté en très mauvais état dès 1850, et il doit être restauré et modifié dès 1858. Une grave rupture du barrage est évitée en 1862.

La construction du site des Enfreneaux dans les années 1880

De toute façon, sa conception et son emplacement même sont remis en cause par un nouveau programme d'amélioration du port de Marans, approuvé dans son principe dès 1845. Présenté les 12 août 1865 et 30 mai 1866 par l'ingénieur en chef Evrard, le projet consiste à former un nouveau bassin à flot en aval port, fermé par trois ouvrages : en amont, un barrage éclusé au Carreau d'Or ; en aval, un barrage éclusé aux Enfreneaux à créer sur le cours principal de la Sèvre ; également en aval, une écluse à la tête du futur canal de Marans à la mer. Pour le deuxième ouvrage, le site choisi est celui du barrage de la rivière du Moulin des Marais construit en 1844-1848. Evrard propose de transformer radicalement ce site, c'est-à-dire : déplacer vers le nord le point de confluence entre la rivière du Moulin des Marais et le cours principal de la Sèvre ; reconstruire le barrage de la rivière du Moulin des Marais sur ce nouveau cours ; enfin, créer sur le cours décalé de la Sèvre, un barrage éclusé avec maison éclusière, là-même où s'élevait le barrage de la rivière du Moulin des Marais de 1844-1848.

Lorsqu'une importante inondation survient au printemps 1869, le projet d'Evrard n'a pas encore été mis en oeuvre. Le 2 avril, une dépêche ministérielle ordonne de nouvelles études. Le 25 février 1870, l'ingénieur en chef Detzem et l'ingénieur ordinaire Maucher remettent les plans d'un énième projet de barrage éclusé. Après bien des discussions, le projet n'est approuvé dans son principe qu'en 1881, et présenté dans le détail le 9 mars 1882 par l'ingénieur ordinaire Modelski. Son projet englobe le creusement du canal de dérivation, en amont de la rivière du Moulin des Marais. Pour les Enfreneaux, l'idée d'Evrard, sans doute trop ambitieuse, de décaler vers le nord le confluent entre la Sèvre et la rivière est abandonnée : le nouveau barrage sur la rivière du Moulin des Marais (qui sera élargie) sera construit à l'emplacement de l'ancien, avec cette fois huit pertuis égaux, en réutilisant les fondations de plusieurs anciennes piles. Les barrages et l'écluse reposeront sur des radiers en moellons et ciment de Portland, eux-mêmes posés sur des pieux fichés dans le sol. Le sable des maçonneries proviendra de la baie de l'Aiguillon ; les moellons, des carrières du pays ; la pierre de taille, des carrières de Crazanne.

Le chantier de construction du nouveau barrage éclusé des Enfreneaux sur la Sèvre, de sa maison éclusière et du nouveau barrage de la rivière du Moulin des Marais est adjugé le 28 juin 1882 à Edouard Auguste Godard, entrepreneur à Paris, qui vient de réaliser la ligne de chemin de fer entre La Rochelle et La Roche-sur-Yon. Le chantier, colossal, va durer jusqu'en 1889. En septembre 1887, la construction du barrage éclusé est à peine commencée, alors que la rivière du Moulin des Marais a été élargie et que le canal de Marans à la mer, avec son écluse au Brault, est en voie d'achèvement. Le 22 mai 1888, la marée et avec elle la navigation sont arrêtées pour la première fois aux Enfreneaux,par fermeture des batardeaux du barrage. Avec la mise en service de l'écluse du Brault quelques semaines auparavant, le bassin du port à flot est dès constitué. Les travaux du barrage des Enfreneaux ne sont toutefois réceptionnés que le 30 décembre 1890.

En 1889, Pierre Alexandre Poitevineau est nommé premier éclusier des Enfreneaux. Chargé d'assurer le service à la fois de l'écluse et du barrage de la rivière du Moulin des Marais, il loge dans la maison éclusière édifiée à côté de l'écluse. Nommé chef éclusier au Brault en 1911, il prend sa retraite en 1921 et décédera à Marans en 1952.

Restauration et améliorations à partir des années 1950

Pendant l'Entre-deux-guerres puis la Seconde Guerre mondiale, malgré quelques travaux d'entretien, une partie de l'écluse et de ses portes est abandonnée, voire démontée. Au début des années 1950, l'ouvrage bénéficie d'un nouveau grand programme de grands travaux d'aménagement du cours de la Sèvre. L'écluse des Enfreneaux est désenvasée et restaurée en 1953. De nouvelles portes métalliques, fabriquées par la société Bordeaux-Sud, sont placées à la tête aval de l'écluse en 1954 avec la participation de l'entreprise Durand, de Marans. En 1956, celle-ci remet en état les anciennes portes en bois de la tête aval pour qu'elles soient placées à la tête amont. Toutes ces portes sont celles encore en place de nos jours dans l'écluse.

Dans les années 1980, le barrage à l'embouchure de la rivière du Moulin des Marais passe de huit à trois pertuis. Une passe à anguilles (la première de France) est installée sur ce même barrage en 1984. Entre 2010 et 2013, le site est rénové et relié au système de télégestion des barrages et écluses de la Sèvre Niortaise. Les vannes et portes des barrages sont remplacées, et le mécanisme d'ouverture et de fermeture est revu. L'écluse quant à elle, envasée et restée à l'écart de ces travaux, n'est plus utilisée.

Périodes

Principale : 4e quart 19e siècle

Dates

1882, daté par source

Auteurs Auteur : Modelski

Ingénieur ordinaire des Ponts et chaussées à Niort dans la seconde moitié du 19e siècle.

, ingénieur des Ponts et Chaussées (attribution par source)

Le site hydraulique des Enfreneaux est l'un des principaux exutoires du bassin de la Sèvre Niortaise. Situé à l'interface entre la Sèvre maritime et la Sèvre fluviale, et à la confluence entre la rivière du Moulin des Marais et la Sèvre, il comprend un barrage mobile, un barrage éclusé et une maison éclusière.

La rivière du Moulin des Marais est franchie ici, à son embouchure, par un barrage mobile composé à l'origine de huit pertuis ; seuls trois sont aujourd'hui utilisés, les autres sont condamnés par des panneaux en béton. Les pertuis, équipés de vannes verticales métalliques, s'intercalent entre les piles en pierre de taille. A l'origine, des portes de flot (dirigées vers l'aval) complétaient le dispositif. Le tout est franchi par une passerelle métallique.

Dans le prolongement de ce barrage, vers le sud-ouest, le cours principal de la Sèvre Niortaise est contrôlé par un barrage éclusé : un ouvrage qui allie une écluse et un barrage mobile. Le barrage mobile, à l'est, comprend deux pertuis, avec piles en pierre de taille et vannes verticales métalliques. Là aussi, des portes à flot complétaient autrefois le dispositif. Le barrage est franchi par un pont fixe à garde-corps en métal. Le barrage est précédé, en amont, rive droite, par un perré incliné à 45 degrés, en moellons. En aval, toujours rive droite, un autre perré se prolonge en musoir avec le perré du barrage de la rivière du Moulin des Marais.

L'écluse se trouve sur sa rive gauche de ce barrage mobile. Comme pour ce dernier, l'écluse est précédée, rive gauche, d'un perré incliné à 45 degrés, en moellons. L'écluse est composée d'un sas de 43 mètres de long sur 7 mètres de large (7,80 au niveau des chambres des portes). Les murs ou bajoyers qui l'encadrent sont en pierre de taille. Aux deux extrémités du sas se trouvent à chaque fois deux paires de portes busquées : des portes à flot (pointées vers l'aval) et des portes d'èbe ou portes jusant, tournées vers l'amont. Les portes placées à l'entrée (ou tête) amont du sas (il n'en reste que deux sur quatre) sont en bois de chêne ; celles en aval du sas sont en métal (toutes les quatre encore en place). Chaque vantail de porte est surmonté d'une passerelle de service, et équipé d'une vanne verticale ou vantelle, en fonte. Mue par une crémaillère, cette vantelle permet de remplir ou de vider le sas pour le mettre au niveau de l'amont ou de la mer en aval, selon les besoins. Les portes étaient actionnées à l'aide de treuils placés sur les deux rives et reliés aux vantaux par des câbles. Enfin, l'écluse est franchie par un pont tournant à tablier et garde-corps métalliques. Ce pont s'inscrit dans l'exact prolongement du pont fixe qui franchit le barrage mobile.

La maison éclusière se situe sur la rive gauche de l'écluse, à l'ouest. Son architecture et sa structure, standardisées, répondent à un modèle mis en oeuvre par les Ponts et chaussées, par exemple à l'écluse des Bourdettes (Damvix-Arçais). En rez-de-chaussée avec étage en surcroît, et de plan rectangulaire, la maison est strictement parallèle au sas de l'écluse. Elle est couverte d'un toit à longs pans, en tuile mécanique. La façade présente cinq baies au rez-de-chaussée, autour de la porte centrale (les deux baies latérales semblent correspondre à des agrandissements du bâtiment). Chaque ouverture possède un encadrement saillant et un linteau en arc segmentaire. A l'origine (projet adopté en 1882), l'intérieur se composait, au rez-de-chaussée, d'une pièce sur toute la longueur du bâtiment, d'une chambre d'éclusier et d'une cage d'escalier à l'arrière ; et au niveau du comble, d'un grenier et d'une pièce habitable pour la famille de l'éclusier.

Murs
  1. Matériau du gros oeuvre : calcaire

    Mise en oeuvre : pierre de taille

Toits

Localisation

Adresse: Nouvelle-Aquitaine , Charente-Maritime , Marans , chemin des Enfreneaux

Milieu d'implantation: isolé

Lieu-dit/quartier: Enfreneaux (les)

Cadastre: 2016 AO 57

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