Maison

France > Nouvelle-Aquitaine > Gironde > Saint-Émilion

Cette maison occupe la moitié orientale d'une longue parcelle qu'elle partage avec une seconde habitation tournée vers le fossé (maison 380-1). Affrontant la rue de l'Abbé Bergey par son pignon, cette grande maison présente plusieurs phases de construction qu'il est malaisé de démêler sans une étude archéologique approfondie. Des portions de murs en grand appareil témoignent néanmoins de l'existence d'un premier édifice roman en partie reconstruit, et surélevé à la fin du 15e siècle. Peu après, une extension fut encore ajoutée vers le nord pour donner à la maison son plan actuel. Au 18e siècle, d'importants travaux ont fortement perturbé et en grande partie effacé les phases antérieures. En sous-sol, les caves de cette maison communiquent aujourd'hui avec celles de la maison 380-1 sans qu'il soit possible de déterminer à quand remonte cette disposition qui résulte d'un processus d'aménagements progressifs au long de huit siècles.

Périodes

Principale : limite 12e siècle 13e siècle

Principale : limite 15e siècle 16e siècle

Secondaire : 18e siècle

Cet édifice de plan barlong axé est-ouest présente au moins cinq phases de construction réparties entre la fin du 12e siècle-début du 13e siècle et le 18e siècle.

L'emprise du bâti primitif est correspond à la moitié sud de l’édifice. Le mur ouest, constitué de moyen à grand appareil sur deux étages, en est l'élément le mieux conservé. Il s'agit d'un mur écran couronné à l'origine par une assise mince débordant sur la face interne et sur laquelle a été monté le pignon qui sert de support à la toiture actuelle et qui date de la phase de remaniement des années 1500. Ce mur a perdu ses deux chaînes d'angle primitives, oblitérant l'articulation avec les deux gouttereaux qui, présentent pourtant des portions de mur appartenant à cette même première phase de construction. Cet état de fait s’explique très certainement par la présence à ces deux angles d’un conduit ménagé dans l’épaisseur du mur pour drainer les eaux de pluie et eaux usées vers une fosse creusée en sous-sol à son aplomb ; au nord-ouest, le dispositif est attesté par un renfort de maçonnerie faisant saillie d’environ 1 m vers le nord et visible aujourd’hui depuis la galerie latérale nord d’une cave accessible depuis le fossé. La présence d’un conduit ménagé à l’intérieur a pu être vérifiée depuis un trou pratiqué dans la face est du conduit. Du côté sud, un aménagement similaire peut être aussi suspecté : pendant les travaux de réhabilitation menés en 2018-19, un renfort de maçonnerie a été mis au jour pendant le démontage du sol en béton, tandis qu’au-dessus du niveau de ce sol, le démontage systématique de cette maçonnerie en pierre de taille a produit une rupture nette dans la maçonnerie, du côté intérieur comme à l’extérieur. Bouchée par du tout-venant, ce hiatus ne peut s’expliquer que par l’existence préalable d’un vide intentionnel, qui trahit probablement un aménagement de l’angle contenant un conduit, comme à l’angle nord. Ce type d’agencement destiné à gérer les effluents a été observé sur de nombreux autres édifices de Saint-Emilion, et notamment à la maison dite "Salle Gothique" (cad. AP0428).

Côté sud, le parement intérieur du mur est visible sur quelques mètres de long dans la cage d'un escalier moderne en sous-sol. La qualité du parement rappelle celle observée dans le niveau de soubassement de la maison 380-1 et laisse donc supposer là aussi l'existence d'un niveau de cave, peut-être situé à un niveau intermédiaire entre le rez-de-chaussée et les caves inférieures actuelles (la cave voûtée actuelle est moderne).

Ce type de parement de grand appareil est encore visible sur la face externe de ce même mur entre les deux fenêtres occidentales du rez-de-chaussée, ainsi que sur l'ensemble du mur nord, conservé comme le mur ouest sur la totalité des deux étages. Sur la face nord, la fonction d’une portion de corniche en quart-de-rond implantée à hauteur du plafond du rez-de-chaussée n’a pas pu être identifiée de manière satisfaisante ; l’idée d’un support de solive de rive de plancher semble peu probable puisqu’ aucune des maçonneries conservées actuellement du côté nord de ce mur ne peut être rattachée à cette première phase de construction. Il pourrait s’agir d’un coffre de cheminée en encorbellement, mais cette portion de quart de rond est située au revers d’un mur de refend qui semble dater de la phase primitive de construction.

Sur sa face interne (côté sud), ce même mur s'achevait par une seconde corniche, présentant ici un profil en cavet surmonté d'un bandeau, qui recevait les sablières de la charpente.

Sur tous ces murs, aucune trace d’ouverture ou d’aménagement domestique d'origine ne sont conservés.

Enfin, notons un mur de refend disposé nord-sud au centre du bâtiment d’une épaisseur exceptionnelle de 80 cm et que l'on ne saurait rattacher à une phase précise, ses parements étant partout dissimulés par des enduits.

Une partie des murs est et sud présente un parement de moyen appareil à joints gras différent des maçonneries de la phase initiale mais nécessairement antérieur aux remaniements de la fin du Moyen Age : au sud, la baie du deuxième étage à moulures prismatiques a été insérée après coup dans cette maçonnerie. De même, la baie similaire qui ajoure le second étage du mur côté rue coupe la trace d'un pignon antérieur, confortant l'hypothèse d'une phase de remaniement intermédiaire entre la construction initiale et les réaménagements des années 1500.

Cette nouvelle campagne a consisté en la surélévation du bâtiment de manière à créer un étage supplémentaire. Côté sud, la trace du bouchage quadrangulaire de grandes dimensions de part et d'autre de la fenêtre occidentale de l'étage, suggère le percement d'une baie à croisée. Au deuxième étage, une petite fenêtre est dotée d'un encadrement raffiné, à double baguettes croisées sur bases prismatiques et appui mouluré. Une seconde fenêtre de même typologie ajoure la façade sur rue. La porte murée, couverte d'un haut linteau engravé d'une accolade, qui ouvrait sur la rue au sud de la façade, est également de cette époque. Le tiers nord de cette façade a été construit en pierre de taille un peu plus tard dans le 16e siècle, comme l'atteste le très net collage de maçonnerie. Côté rue, le parement de ce mur est très soigné alors que sur sa face interne, il n'est constitué que de moellons selon un principe rencontré sur les parties du 15e siècle de la maison cad. AP0013 & 14. Des ouvertures de cette phase ne subsiste que la fenêtre du comble dont l'appui est d'un type proche de celui rencontré sur la baie prismatique voisine mais ici, l'encadrement est seulement évidé d'un profond cavet. A noter également les quatre trous de boulins qui encadrent cette fenêtre et qui ont pu accueillir un système de levage.

Du côté ouest, le tiers nord du mur occidental a été remplacé dans les années 1980-90, par un mur de parpaings de béton ; toutefois, la chaîne d'angle nord a été conservée à l'arrière d'un chemisage établi au droit du mur nord. Ce dernier ne semble pas conserver de vestiges antérieurs à l'époque moderne, sinon de nombreuses pierres de grand module en remploi provenant probablement de la démolition d’une construction médiévale. Le rez-de-chaussée de ce mur nord présente plusieurs petites ouvertures de dimensions différentes, percées sans soucis d'ordonnance. L'étage conserve deux petites baies dépourvues d'appui, l'une étant simplement chanfreinée et l'autre présentant une moulure en cavet similaire à celle rencontrée sur la façade côté rue.

Cette maison connut un nouvel agrandissement vers le nord, probablement dans le courant du 16e siècle, sous la forme d'un appentis ajouré de plusieurs petites fenêtres chanfreinées et desservi par une porte à linteau en anse de panier surbaissée ouvrant sur la rue.

La dernière grande phase de travaux sur cet ensemble date de la fin du 17e siècle ou du début du siècle suivant : de nombreuses fenêtres furent percées, un portail aménagé dans un mur de clôture sur la petite ruelle au sud de la maison, et créée une grande porte dans le gouttereau sud. On implanta également un escalier en pierre, rampe sur rampe, dans la partie nord de la maison. Le sol du rez-de-chaussée a depuis été surélevé par une dalle béton pour être mis de plain-pied avec la rue puisque le sol actuel se situe au niveau de l'appui des fenêtres modernes et au niveau du linteau de l'ancienne cheminée (moderne également).

En sous-sol, cette maison conserve deux petites caves voûtées probablement aménagées lors des travaux de la fin du 15e siècle : la première dans l'angle sud-est (son soupirail bouché se situe immédiatement après la porte en accolade sur la rue), et la seconde à l'autre extrémité de la façade sur rue. Ici, le sol de la cave se trouve à 8,60 m sous le niveau actuel de la rue. Ces caves sont aujourd'hui accessibles depuis le fossé par une enfilade de pièces, longue de 31 m, qui relie le sous-sol de la maison 380-1 à la seconde cave de la maison 382-2. La cave sud conserve un escalier taillé dans le rocher et dont la voûte rampante s'appuie contre le gouttereau sud de la maison. L’entrée de cet escalier, dégagée en 2019, se faisait depuis l’angle sud-ouest de la pièce du rez-de-chaussée.

Murs
  1. Matériau du gros oeuvre : calcaire

    Mise en oeuvre : moellon

  2. Mise en oeuvre : moyen appareil

Toits
État de conservation
  1. mauvais état

Localisation

Adresse: Nouvelle-Aquitaine , Gironde , Saint-Émilion , 4 rue de l' Abbé-Bergey

Milieu d'implantation: en ville

Lieu-dit/quartier: Ville haute

Cadastre: 1845 C 279, 2010 AP 380 ([2])

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