Maison

France > Nouvelle-Aquitaine > Gironde > Saint-Émilion

Cette maison forme l'angle nord-est de l'enceinte de Saint-Emilion. Implantée à la suite des maisons dites "Palais Cardinal", sa construction est de peu postérieure, soit des premières décennies du 13e siècle. La présence de mâchicoulis ainsi que l'insertion de traverses et des coussièges dans les fenêtres de l'étage témoignent de travaux de reprises réalisés dans le courant de la 2e moitié du 14e siècle.

Sur les cadastres anciens, ce bâtiment apparaît déjà en ruine. Depuis, la seule évolution importante est la construction dans le courant du 19e siècle d'une grande maison sur un côté de la parcelle mais les structures médiévales restantes n'en ont pas souffert. Des clichés anciens indiquent que la majeure partie des parements et des encadrements ont été repris en plusieurs étapes depuis la fin du 19e siècle (la dernière datant de 1990), sans avoir pour autant modifiée la nature du bâti.

Périodes

Principale : limite 12e siècle 13e siècle

Principale : limite 14e siècle 15e siècle

Cette unité ne conserve plus que son mur nord et une partie de sa face est qui forment l'angle nord-est de l'enceinte de la ville. En l'état, le plan masse de l'édifice était difficilement restituable avant que l’existence de caves ne soit révélée lors des travaux de réhabilitation menés sur l’ensemble de la parcelle en 2015-2016. Outre la cave ménagée dans le sous-sol de la partie correspondant aux murs conservés en élévation, un mur de refend percé d’une grande arcade en arc brisé semble pouvoir être retenu comme preuve de l’existence d’une autre unité d’habitation immédiatement voisine au sud. Il est donc probable que la maison formant enceinte à cet angle nord-est de la ville avait pour emprise sensiblement celle que les murs conservés suggèrent, soit un édifice de 16 m de long (d’ouest en est) sur environ 6 m de large.

A l'ouest, le large contrefort plat visible sur la façade nord semble marquer la limite avec la maison mitoyenne (maison 449-3). En partie remonté lors de travaux menés en 1971, ce contrefort avait pour fonction de contenir une logette de latrines à laquelle une simple porte quadrangulaire donnait accès depuis l’intérieur. Côté oriental, le mur apparait sous la forme d’un arrachement, le mur ayant été entièrement arasé sur tout le reste de l’emprise de la parcelle. Cet état permet de vérifier qu’ici comme ailleurs, le mur est constitué de deux parement de pierre de taille liées au mortier de chaux qui retiennent une fourrure constituée de cailloux et de terre.

L'édifice est assis sur le rocher assez régulièrement aplani. Sa maçonnerie est constituée de parements en moyen et grand appareil (jusqu’à 50 cm de hauteur d’assise) de pierres de taille à joints fins, d’aspect très semblable aux autres maisons du front nord.

La face nord de cette unité est cantonnée par un large contrefort plat à l'ouest (qui marque la limite avec l'unité voisine), et par un second de dimensions bien plus modestes qui permet de constituer un cadre à l’ordonnance symétrique des fenêtres. Le socle rocheux est percé de deux fentes qui témoignent de l'aménagement d’une cave, dès l’époque romane : l’escarpe en rocher percé de fentes d’éclairage est doublé à l’intérieur par une maçonnerie de grand appareil formant des embrasures aux baies, ne laissant aucun doute sur l’origine médiévale du creusement. Cette cave a recoupé deux silos, qui par conséquent, peuvent être datés d’une période antérieure à 1200, comme en d’autres endroits de la ville. Un bouchage en maçonnerie grossière signale très certainement, vers l’ouest et contre le mur nord, l’emplacement de l’escalier qui permettait de descendre dans la cave depuis le rez-de-chaussée.

Au rez-de-chaussée, trois fentes d'éclairage sont ouvertes par des linteaux droits échancrés par un arc aveugle. Les encadrements sont chanfreinés et les embrasures couvertes d'arrière-linteaux. La fente percée dans le fin pilastre oriental a peut-être été pratiquée après coup, pour un aménagement qui reste indéterminé (au revers, subsiste la trace d’un montant dans la maçonnerie d’origine, une maçonnerie de pierre de taille, autour d’un petit placard mural, ayant comblé la partie adjacente).

L'étage est ajouré de deux fenêtres barlongues sous linteau droit, avec cordons d'imposte profilés d'un bandeau orné de dents de loup et d'un cavet. Côté intérieur, les embrasures sont couvertes d'arrière-voussures en arc segmentaire, les embrasures très évasés vers l’intérieur étant bien intégrées dans le parement du mur. Pour autant ces fenêtres ont été modifiées : outre la reprise d’un de leur montant pour les baies côté nord (montant ouest chemisé pour la baie ouest, et peut-être, montant est pour la baie orientale), une traverse a été ajoutée, ainsi que des coussièges, alors que le plancher de l’étage était remonté afin que ces embrasure deviennent accessibles (2e ligne de corbeaux). Ces aménagements ont probablement été apportés au moment où la défense de l’édifice a renforcé en partie haute par l’adjonction de mâchicoulis à l’angle nord-est, soit autour du milieu du 14e siècle.

Juste au-dessus de ces fenêtres prend place le chemin de ronde dont les dalles formaient une assise mince portée par une série de modillon, selon une disposition similaire à celles observées sur les maisons cad. AP 010-1 et cad. AP013-14. Le sommet du mur était ainsi encadré côté extérieur par un parapet crénelé, et côté intérieur, par un muret, ces deux garde-corps comportant à espace réguliers des empochements traversants pour accueillir les solives du plancher des combles qui servaient, dans le chemin de ronde, de support pour le plancher du passage.

Côté est, la portion de mur qui subsiste est cantonnée au nord par un large contrefort plat qui marque l'angle et plus au sud par un second contrefort, plus étroit, qui devait à l'origine partager la façade. Entre ces deux contreforts s'étagent au rez-de-chaussée une seule fente de jour (désaxée vers le nord et percée une assise plus haut que les trois de la face nord), et au niveau de l’étage, une baie barlongue semblable à celles de la face nord (mais restée dépourvue de traverse, soit dans son état d’origine).

L'angle nord-ouest a par la suite été renforcé par des mâchicoulis dont les hautes et fines consoles à quatre ressauts devaient porter une terrasse qui, à défaut de véritable tour, assurait le flanquement de cette portion d'enceinte. Ces mâchicoulis ne semblent pas avoir dépassé la limite du large contrefort ; au-delà, le front est conserve la base du chemin de ronde primitif avec l'assise mince du dallage et la première assise du parapet. Cette dernière présente deux ou trois espaces vides, empochements similaires à ceux observés sur la portion nord.

A l'intérieur, le sol actuel de la cour a été surélevé de plus d'un mètre, et règne actuellement à plus de 50 cm au-dessus de la base des quatre fentes de jour qui éclairaient cet espace. Le rez-de-chaussée était couvert d'un plafond dont les solives reposaient sur la première ligne de corbeaux conservée sur le mur nord. Le rang supérieur, à peu près complet, correspond à la mise en place d'un autre plancher, probablement lors de la campagne de réaménagement réalisée au 14e siècle, quand les baies de l’étage ont été équipées de coussièges.

L'étage était sans doute couvert par un plafond reposant sur la corniche à modillons, en place au revers du mur ; la plupart des modillons sont simplement façonnés par des pans coupés, à l'exception d'un qui porte un tonneau. On retrouve là des aménagements identiques à ceux décrits sur les maisons cad. AP010-1 et AP013-14. Cette corniche à modillons porte le dallage du chemin de ronde; ainsi élargi, ce dernier pouvait également recevoir le rebord du toit de la maison et faire fonction de chéneau. A l'est de ce mur, subsistent la trace d'une ancienne ouverture, peut-être une armoire murale, aménagée à un niveau étonnamment élevé par rapport au plancher. A l'autre extrémité de ce même étage, près du mur de la maison du 19e siècle, une étroite porte barlongue, dont le piédroit ouest a été entièrement repris, ouvre sur un petit couloir logé dans une partie du mur épaissie à l'extérieur par le large contrefort plat de la façade. Il s'agit probablement d'anciennes latrines dont le conduit apparait sur une photo de 1970. Au-delà vers l'ouest, le mur est en grande partie détruit et semble appartenir à une autre unité (449-3) à laquelle une notice est consacrée.

Par de nombreux aspects, cette maison présente des caractéristiques proches de ses voisines formant enceinte sur les fronts nord et ouest; on retrouve les contreforts plats, les fentes de jours, la corniche à modillons portant le chemin de ronde, ce qui la place dans une tradition romane. Mais ici, les baies de l'étage témoignent d'une réalisation plus avancée dans le 13e siècle, signe d’une remarquable constance dans les savoirs faire de cette période.

Localisation

Adresse: Nouvelle-Aquitaine , Gironde , Saint-Émilion , impasse Cardinal

Milieu d'implantation: en ville

Lieu-dit/quartier: Ville haute

Cadastre: 1845 C 258, 2010 AP 3 ([1])

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