Promenade Horizontale
France > Nouvelle-Aquitaine > Pyrénées-Atlantiques > Eaux-Bonnes
Historique
Aménagement emblématique de la station thermale d'Eaux-Bonnes, la Promenade Horizontale est un équipement à la fois révélateur de l'urbanisme des villes d'eaux, des théories hygiénistes et du nouveau modèle urbain du 19e siècle. Dès l'essor de la station thermale sous l'Empire, la nécessité de relier les stations d'Eaux-Bonnes et des Eaux-Chaudes, sur 3,5 km, est déjà évoquée dans un rapport du Conseil des Bâtiments civils, statuant alors sur un projet de construction d'hospice aux Eaux-Chaudes, mais cette idée ne semble pas concrétisée dans l'immédiat.
Durant la Monarchie de Juillet, quatre personnalités, Adolphe Moreau, le comte de Kergorlay, Alexandre de Ville et le comte Dulong de Rosnay, lancent en 1841 une souscription afin d'aménager cet équipement de convalescence, de loisirs et de mondanités qui relie à flanc de montagne d'Eaux-Bonnes à l'autre station ossaloise des Eaux-Chaudes. Leur objectif était d'offrir aux curistes une déambulation confortable, leur permettant de s'extirper du village "enseveli" entre les montagnes en évitant les sentiers exigus et non aménagés. Dans un second temps, les mécènes, auxquels une plaque est dédiée au début du parcours près de l'Hôtel des Princes, font don de la promenade à la commune qui doit, dès lors, en assurer l'entretien. En 1842, 1.700 mètres de chemin, destinés à être prolongés pour relier les Eaux-Chaudes, sont exécutés en 40 jours pendant "la saison des eaux", avec le soutien du Conseil général, des villages d'Aas et d'Assouste et du marquis de Livron - lequel concéda le terrain -, puis ils sont ouverts au public.
La promenade est élargie à plusieurs reprises, en particulier entre 1877 et 1879. Elle était agrémentée de bancs et de kiosques pittoresques parsemés le long du parcours dès l'origine, lesquels ont également été remaniés, d'abord en 1877 par Jules Turon, puis entre 1877 et 1882 par l'architecte départemental Pierre Gabarret pour un montant d'environ 9.000 francs. Les travaux sont exécutés par des entrepreneurs locaux, comme Benjamin Sécula qui achève un "mur d'élargissement" en 1885 et n'en sera complètement rémunéré que sept ans plus tard. La promenade a été bitumée au 20e siècle afin de rallier la route nationale 134, mais elle conserve ses caractéristiques de promenade rurale depuis le casino jusqu'à la Villa Bellevue.
Au 19e siècle, la Promenade Horizontale était un haut lieu de sociabilités et d'activité commerciale où étaient implantés des chalets en bois vendant des produits en tous genres, du livre à l'échantillon minéralogique, de l'oiseau naturalisé à la dentelle traditionnelle, des photographies pyrénéennes du Chalet Huvé au salon de thé. La promenade accueillait en outre des animations diverses et variées, comme un stand de tir réputé, des jeux de toupie et des représentations de danses traditionnelles près des kiosques la jalonnant. Extrêmement fréquentée durant la saison thermale, elle fut le théâtre de nombreux évènements, parfois dramatiques, comme la disparition du Révérend anglais Merton Smith dont la dépouille fut retrouvée deux ans après sa chute au fond d'un précipice.
Les kiosques et les bancs, ponctuant la promenade et participant au bien-être des curistes, ont été reconstruits en béton, probablement dans les années 1950.
Détail de l'historique
Description
La promenade bénéficie d'une accroche urbaine avec son départ situé à côté de l'Hôtel des Princes, devant l'escarpement rocheux où fut apposée une plaque en hommage à ses mécènes. Véritable prolongement et respiration de la station, elle traverse le promontoire où fut implanté le casino, devant lequel l'architecte Henri Geisse décide de la faire passer afin de lui conserver son panorama sur l'ensemble urbain. Elle se prolonge ensuite sur près de 2.000 mètres sinueux en direction de la station des Eaux-Chaudes, mais, en dépit de son environnement accidenté, elle ne présente aucune déclivité et facilite, au 19e siècle, les déambulations des malades à l'attention desquels elle fut aménagée à l'origine. C'est son absence de dénivelé qui lui donne son nom de Promenade Horizontale.
Le chemin est en gravier ou terre foulée entre le départ et la Villa Bellevue, puis il a été goudronné lors de sa jonction avec la route nationale 134. Implantée sur le flanc du Mont Gourzy, dans un cadre naturellement ombragé, elle est bordée en continu de plantations d'arbres centenaires, mis en place tout au long de la seconde moitié du 19e siècle. Il s'y trouve de nombreuses essences endémiques, comme le chêne, le hêtre ou encore le pin de Weymouth et les mélèzes d'Europe, capables de résister à l'exposition aux intempéries et à la faible luminosité. Selon les pratiques de l'époque, des essences ornementales exotiques furent également introduites au 19e siècle telles que le séquoia sempervirent, qui, associé aux autres types d'arbres, constitue un paysage végétal diversifié et changeant. L'omniprésence des arbres et de la roche du flanc de montagne permettait de créer une ambiance sauvage et pittoresque, que réclamaient les élites en villégiature jusqu'à la Grande Guerre.
La promenade est en outre agrémentée de mobilier visant à marquer des pauses régénérantes et contemplatives, notamment lors d'une pluie imprévue ou d'un ensoleillement trop intense. Les kiosques de l'époque, se référant aux fabriques des jardins pittoresques du 18e siècle, ont été remaniés et substitués par des constructions en béton couvertes de toiture en ardoises pyrénéennes. Ils sont implantés sur de petites places aménagées pour dynamiser la promenade et mettre en valeur des points de vue sur la ville de Laruns, située en contrebas, ou sur le village d'Aas, établi en face sur le versant de la Montagne Verte.
Le jeu des points de vue, ménageant des découvertes successives, s'avère fondamental dans la création de la promenade parce qu'ils magnifient à la fois les éléments de la nature, en particulier les montagnes, en créant des tableaux naturalistes vivants, mais aussi l'empreinte humaine dans le paysage par des focus sur les villages voisins et la station thermale. La création de cette promenade, comme celle des autres aménagements et embellissements de la station, s'inscrit pleinement dans l'aspiration à la contemplation, caractéristique de la pensée romantique. Elle permet de prendre de la hauteur d'un point de vue physique et philosophique sur la place de l'homme au sein de l'univers. Elle témoigne, en outre, de l'épanouissement des parcs et promenades urbaines plébiscités sous le Second Empire et répond, en cela, aux théories hygiénistes et aux attentes de la société de loisirs émergeant au 19e siècle.
Localisation
Adresse: Nouvelle-Aquitaine , Pyrénées-Atlantiques , Eaux-Bonnes
Milieu d'implantation: isolé
Cadastre: 2018 AN