Site archéologique du Fâ

France > Nouvelle-Aquitaine > Charente-Maritime > Barzan

Les premières occupations humaines du site du Fâ se sont implantées en hauteur, sur les collines entourant le site. Des vestiges de l'époque néolithique (poteries, outils en silex et en os, haches polies, restes de foyer) ont été mis au jour en 1877 et surtout en 1970 à quelques mètres de la pyramide de la Garde. Ils attestent d'une occupation vers 3500 avant J.-C., avec présence d'éléments fortifiés (fossés circulaires...). Plus au nord de ce camp néolithique, près des Piloquets, des haches en bronze de l'âge du Bronze final (vers 1000-900 avant J.-C.) ont été trouvées en 1980 (elles sont aujourd'hui exposées au Musée de Royan).

En 1998, des fouilles ont permis la découverte d'un fossé d'époque gauloise (fin de l'âge du fer, vers 200-100 avant J.-C.) sur le site même du moulin du Fâ, au pied de son soubassement. Il semble que dès cette époque, une cité et un port tenus par le peuple gaulois des Santones aient commencé à se développer, en prospérant grâce au commerce de l'étain, particulièrement actif entre la Cornouaille et la Méditerranée, via, entre autres, la Saintonge.

Après la conquête romaine, le site connaît un développement bien plus important encore, dans le sillage de Saintes, capitale de la province romaine d'Aquitaine, à laquelle elle sert probablement de port avancé. Au cours du premier siècle de notre ère, Une ville d'environ 15000 habitants s'étend sur plus de 100 hectares. Outre le temple du moulin du Fâ et le théâtre de la Garde, elle comprend des thermes, un forum, d'autres temples, de grands entrepôts ou horrea, et une grande avenue, bordée de monuments, menant à un port (voir la description du site). Cette ville atteint son apogée au 2e siècle après J.-C.. Plusieurs monuments sont agrandis et embellis (le temple, les thermes, les horrea). Certains y voient l'antique cité de Novioregum, mentionnée sur l'itinéraire d'Antonin, au 3e siècle.

La ville du Fâ décline pourtant ensuite, peut-être en raison d'un envasement de son port (l'actuelle combe du Rit, où est construit Barzan-Plage). Abandonné, semble-t-il, à partir du 4e siècle, le site du Fâ tombe peu à peu dans l'oubli et sert de carrière de pierres à ciel ouvert, utlisée pour la construction des fermes et hameaux voisins. C'est ainsi que l'on retrouve par exemple des moellons antiques remployés dans les bâtiments de la ferme de la Garde. Un tambour de colonne sert de fonts baptismaux dans l'église d'Epargnes, et un autre de puits à Puyveil, à Arces.

Le site de l'ancien temple est réutilisé à des fins agricoles à partir des 14e et 15e siècles au moins, puis par un meunier qui y construit son moulin, sans doute au 17e siècle ou au 18e (comme le laisse penser la forme des ouvertures du moulin, avec chanfrein). Le Fâ sort de l'oubli vers 1715 lorsque l'ingénieur Claude Masse le décrit dans ses mémoires et l'indique sur ses cartes. L'une d'elles mentionne les vestiges du théâtre demi-circulaire, à la Garde, et un "ancien port" dans la dépression, désormais comblée, formée par la combe du Rit, près de Chant-Dorat. A côté du moulin du Fâ, considéré comme une "ancien fanal" (phare), la carte indique : "Icy étoit autrefois une ville". En 1839, le chevalier de Vaudreuil attire l'attention de la Société d'archéologie de Saintes sur l'existence du site. En 1860, l'abbé Lacurie, secrétaire de la Société archéologique de Saintes, est le premier à émettre l'hypothèse selon laquelle les vestiges du Fâ seraient ceux de Novioregum. Des fouilles sont réalisées en 1882 et 1890, notamment par l'abbé Laferrière et Eutrope Jouan.

Pendant ce temps, la ferme du moulin du Fâ voit ses bâtiments agrandis vers la fin du 19e siècle. Détenue par Paul Jean Lavergne (comme Chant Dorat) en 1798, puis par Michel Augier, géomètre à Talmont, en 1813 et 1820, et en 1833 par Jean-François Moreau fils, la ferme reste dans les mains de la famille Moreau jusqu'à ce qu'elle soit vendue en 1928 à Emile Chauveau.

Il faut attendre les années 1921-1926 puis 1935-1939 et 1942-1943 pour que des fouilles de plus grande ampleur soient menées, sous la direction de Léon Massiou, historien originaire de Saujon, puis de Louis Basalo, architecte et archéologue royannais. A cette occasion, le site du moulin du Fâ (qui perd ses ailes lors d'une tempête en 1936 et sa toiture vers 1950) est fouillé, le soubassement de l'ancien temple commence à être dégagé et l'on découvre un fragment d'une statue en marbre blanc, un pied gauche. Une stèle votive, portant le mention d'un certain C. Caecilius, est mise au jour près de la ferme, de l'autre côté du chemin. Les thermes aussi sont fouillés et l'on découvre un aqueduc souterrain qui devait acheminer l'eau de la source de Chauvignac. On commence également à dégager le théâtre de la Garde. Ces premières découvertes attestent de l'importance et de la qualité du site du Fâ. Les parcelles de terrain concernées sont classées au titre des Monuments Historiques par arrêtés des 3 septembre 1937 et 1er août 1939.

En 1945, le moulin du Fâ sert de poste d'observation aux FFI, et de nombreux objets découverts lors des fouilles sont égarés. De nouvelles fouilles sont menées en 1956-1959 puis en 1963, sous la direction de Louis Basalo : le soubassement du temple est entièrement dégagé, ainsi que les thermes et une partie du mur extérieur du péribole (enclos sacré) du temple. Des fragments de frises, de colonnes et de corniches sont découverts. Dès les années 1950, un petit musée permet d'exposer les trouvailles aux visiteurs et aux écoliers. Mais, faute de moyens, les fouilles sont suspendues et le site, qui se dégrade, est fermé à la visite après le décès des époux Chauveau en 1965. Pourtant, le potentiel du Fâ reste entier. En 1975 et 1976, une campagne de vues aériennes menée par Jacques Dassier révèle la véritable étendue de la ville antique, bien au-delà des seuls sites du moulin et de la Garde.

Une étape décisive pour la mise en valeur et la sauvegarde du site est franchie en 1993 lorsque la municipalité de Barzan achète la ferme et le moulin du Fâ. Une Association de sauvegarde et de mise en valeur du site archéologique de Barzan (ASSA Barzan) est constituée. Des premiers sondages sont réalisés en 1994, prélude à plusieurs campagnes de fouilles programmées, menées jusqu'à aujourd'hui sous la supervisation des universités de Bordeaux III et de La Rochelle. Depuis 2006, ces fouilles se sont concentrées sur le péribole du temple, les entrepôts, les habitations et sur le théâtre de la Garde. Depuis 1999, le site est la propriété d'un syndicat mixte regroupant la municipalité de Barzan et le Conseil général de Charente-Maritime. Sa gestion et son exploitation sont confiées à l'ASSA Barzan. Un nouveau musée ouvre en 2005 dans l'ancienne maison, et les campagnes de fouilles se poursuivent.

Périodes

Principale : 1er siècle, 2e siècle

Une partie du territoire de la commune actuelle de Barzan, vers l'ouest et le sud-ouest, recèle un site archéologique majeur : le Fâ. Ce site occupe un plateau incliné vers le sud-ouest, vers l'estuaire de la Gironde, et protégé à l'est et au nord par une ligne de collines formant un croissant, depuis Roche Batard jusqu'aux Piloquets. Le site, s'étendant sur environ 150 hectares, ne comprend pas de monuments en élévation (hormis le soubassement du moulin) mais d'importants vestiges en plan, protégés pendant des siècles sous la terre, sur un espace qui n'a pas été construit par la suite, ce qui a permis la préservation de ces vestiges.

Parmi les principaux monuments de l'ancienne ville figure le temple du moulin du Fâ. Construit au 1er siècle, agrandi au 2e, il était de plan circulaire, fait relativement rare. il comprenait un soubassement ou podium de 36 mètres de diamètre, encore visible, sur lequel le moulin a été édifié par la suite. Il était entouré d'un péribole rectangulaire (mur délimitant l'enceinte sacrée), de 106 mètres sur 92. Une colonnade circulaire de 16 mètres de haut, interrompue par un porche d'entrée orné de colonnes et d'un fronton, entourait la cella. Cet espace sacré, lui aussi circulaire (20,80 mètres de diamètre), et haut de 33 mètres, contenait trois puits cultuels. Il était dallé de marbre vert et rose.

Quant au moulin du Fâ lui-même, il ne conserve que sa tourelle en moellons. Pius épaisse à la base, elle est haute de 6,90 mètres pour un diamètre de 5 mètres. Elle se distingue par ses deux portes à encadrement chanfreiné et arc déprimé, tout comme une des petites baies au sommet de la tourelle, côté est. A l'intérieur subistent les vestiges d'un escalier en vis, en pierre, et une cheminée. Des graffiti sont visibles sur plusieurs pierres de taille, notamment autour des portes. Ils représentent des bateaux, dont un tirant son canot.

L'existence d'autres temples a été décelée vers la colline de la Garde : un temple avec cella quadrangulaire entourée d'un péribole ; un temple celtique à cella hexagonale ; un temple avec soubassement rectangulaire (comme pour la Maison Carrée de Nîmes), sans péribole.

Les vestiges de thermes ont été fouillés au sud du moulin du Fâ. La base des murs en a été reconstituée, avec aussi une maquette en 3D. L'alimentation en eau dans les thermes était assurée par un grand puits rectangulaire et par un système d'élévation en bois. L'eau était chauffée à l'aide d'un four.

A 900 mètres à l'est du moulin du Fâ, le site de la Garde présente les ruines d'un théâtre de 80 mètres de large sur 120 de long. Bâti à flanc de colline, il comprenait des gradins en pierre, segmentés par des murs rayonnants.

En plus de ces trois monuments principaux, les sondages, les repérages aériens et les fouilles ont révélé l'existence de vastes entrepôts publics ou horrea, liés à l'activité portuaire, un forum au lieu-dit "le Trésor", et un decumanus, grande voie structurante de 400 mètres de long au moins et 10 de large. Le port devait occuper la dépression qui se dessine au nord du terrain de camping de Barzan-Plage, et qui se poursuit sous et à l'ouest de Barzan-Plage. Peut-être ce port recevait-il les eaux de la source de Chauvignac, acheminées par un aqueduc en grande partie souterrain, dont les vestiges ont été repérés en 1939 au nord-ouest du bourg de Barzan, puis en 2001 au nord du calvaire de la route d'Arces.

Localisation

Adresse: Nouvelle-Aquitaine , Charente-Maritime , Barzan

Milieu d'implantation: bâti isolé

Lieu-dit/quartier: le Moulin du Fâ

Cadastre: 2009 ZB 59, 1833 A 1087 et 1088, 2009 OA 468, 1833 A 172

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