Patrimoine et inventaire de Nouvelle-Aquitaine

En raison de sa position géographique, à la confluence des ruisseaux du Fôt et de l'Ouchette, qui s'y rejoignaient pour y former le ruisseau de la Ville, la place de Bat constitua dès l'époque médiévale un important carrefour. La célèbre vue d'Aubusson, prise depuis les sommets de La Terrade et datée d'avant 1685, montre que trois itinéraires anciens, descendant du plateau des Buiges, du Mont et du Marchedieu, s'y rencontraient. Elle marquait alors la limite orientale de la cité qui s'était formée autour du château. Cyprien Pérathon mentionne que la défense de son emplacement, hautement stratégique, était assurée par trois portes : la tour de Milan, qui commandait la route de Clermont, une porte dite Portail, qui s'élevait en haut de la rue de Bat, à l'entrée du faubourg de la côte du Mont et une autre porte, qui conduisait au faubourg Saint-Nicolas (actuelle rue Jules Sandeau).

La physionomie de la place changea profondément durant le troisième quart du 18e siècle. Elle fut aménagée sous l'égide de Pierre de Laporte, maire d'Aubusson, entre 1769 et 1772. Ce travail, dicté par la volonté d'ouvrir la cité et de l'assainir, s'accompagna de la couverture du ruisseau de la Ville, qui coulait encore à ciel ouvert et de la destruction des fortifications. Dès lors, le rôle de carrefour de la place de Bat s'en trouva confirmé - et ce d'autant que la nouvelle route royale de Clermont à Limoges, reconstruite à partir de 1731, vint s'y raccorder à la fin du 18e siècle. Elle fut également magnifiée par l'installation, en 1770, sur son côté ouest (en direction de la Grande Rue), d'une fontaine, dont la cuve en granit provenait de l'abbaye du Moutier-Rozeille (voir notice IA23000466).

La place fut rebaptisée en 1812 place d'Espagne, du nom d´un général d´Empire, né en 1769, et décédé à la bataille d´Essling en 1809, qui avait vécu dans le quartier durant sa jeunesse, lorsque son père avait exercé la fonction de bibliothécaire de l'Ecole Centrale d'Aubusson.

En 1830, les maisons qui empiétaient encore sur les voies adjacentes furent frappées d'alignement, ce qui permit de redessiner les contours de la place.

A la toute fin du 19e siècle (1899), la place connut une ultime modification : l'îlot de cinq maisons, limitées par la rue du Proverger, qui en occupait le nord, fut détruit. A l'origine, l'espace ainsi dégagé devait servir à l'édification de la caisse d'épargne. Mais une fois l'îlot démoli, la municipalité, encouragée par de nombreuses pétitions des riverains, décida de le laisser vierge de toute construction, afin d'obtenir un agrandissement notable de la place. C'est finalement à l'angle avec le Prévigier (actuelle place du Marché), en léger retrait par rapport à la place Espagne, que fut bâtie la caisse d'épargne (voir notice IA23000473).

L'agrandissement de la place entraîna la disparition de la rue du Proverger, dont le tracé fut dès lors confondu avec celui de la rue Jules Sandeau. La circulation automobile en direction de la route départementale n° 1 de Tulle à La Châtre, Vierzon et Paris s'en trouva ainsi facilitée.